Vendanges à Riquewihr (0010NN0011) : Différence entre versions
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La banalité de la scène se déroulant au cœur de l’automne n’est qu’apparente. La présence du propriétaire sur les parcelles n’est ni systématique, ni continue. Or il arrive avec sa caméra X, un accessoire en contraste total avec le caractère traditionnel de l’activité viticole. C’est ce qui justifie aussi la ribambelle de jeunes enfants et leurs jeux, leurs exclamations. Les vendanges représentent en effet un épisode singulier pour la communauté des ouvriers, qui sait si l’année va être bonne et qui fête la fin d’un cycle. La production, elle, ressort du travail du vigneron dans sa cave installée au milieu de Riquewihr depuis 1902. | La banalité de la scène se déroulant au cœur de l’automne n’est qu’apparente. La présence du propriétaire sur les parcelles n’est ni systématique, ni continue. Or il arrive avec sa caméra X, un accessoire en contraste total avec le caractère traditionnel de l’activité viticole. C’est ce qui justifie aussi la ribambelle de jeunes enfants et leurs jeux, leurs exclamations. Les vendanges représentent en effet un épisode singulier pour la communauté des ouvriers, qui sait si l’année va être bonne et qui fête la fin d’un cycle. La production, elle, ressort du travail du vigneron dans sa cave installée au milieu de Riquewihr depuis 1902. | ||
− | La dernière séquence saisit la vingtaine d’employés agricoles de la maison Hugel lors de la pause du déjeuner. En 1949, celle-ci comptait outre quatre employés de bureau, six à huit hommes à la vinification, et, comme en 1929, 12 hommes et 10 femmes dans les vignes. Un double panoramique fixe le groupe assis, aligné le dos aux ceps | + | La dernière séquence saisit la vingtaine d’employés agricoles de la maison Hugel lors de la pause du déjeuner. En 1949, celle-ci comptait outre quatre employés de bureau, six à huit hommes à la vinification, et, comme en 1929, 12 hommes et 10 femmes dans les vignes. Un double panoramique fixe le groupe assis, aligné le dos aux ceps. Les quelques hommes et les nombreuses femmes boivent (peut-être) du vin dans des gobelets ou à même un tonnelet. Ils mangent un repas fruste composé surtout d’une miche de pain, peut-être accompagnée d’un morceau de fromage. L’Alsace demeure encore dans une ruralité dense et peu enrichie où les différences de classe persistent. |
|Bibliographie=Isabelle Bianquis, ''Alsace, de l'homme au vin'', Gérard Klopp, Thionville, 1988. | |Bibliographie=Isabelle Bianquis, ''Alsace, de l'homme au vin'', Gérard Klopp, Thionville, 1988. | ||
André Lucius, "Le vignoble alsacien", ''Annales de géographie'', 1922, n°171, p. 205-214. | André Lucius, "Le vignoble alsacien", ''Annales de géographie'', 1922, n°171, p. 205-214. | ||
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+ | Jean Tricard, "Le vignoble alsacien", ''L'Information Géographique'', 1949, vol. 13, n°1, p. 21-27. | ||
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Version du 19 décembre 2018 à 08:55
Résumé
Description
Deux hommes mettent une cuve en bois pleine de raisins sur une charrette
Un homme porte une hotte en bois marche vers la charrette : il y vide sa hotte
Un homme touille avec un bâton
Foule de gens dans les vignes
Deux chevaux tirent la charrette remplie de cuves à raisins
Plans des vignes où les vendangeurs s'activent
Les hommes sont assis dans les vignes et mangent, ainsi que de nombreuses femmes
Contexte et analyse
La présence du vignoble est attestée en Alsace depuis l’Antiquité romaine. Cette culture a connu un premier pic au Moyen Age, profitant comme les voisins de Champagne d’une position clef au carrefour d’importants axes de communication. Les viticulteurs ont longtemps produit surtout en quantité, même si s’est peu à peu dessinée une carte tributaire des terroirs sur lesquels s’épanouit la vigne. Dans le Haut-Rhin, les collines sous-vosgiennes et la vallée du Rhin offrent un terrain idéal qui favorise l’émergence de propriétaires-récoltants-vignerons. C’est le cas de la famille Hugel, installée depuis 1639 dans le village médiéval de Riquewihr, devenu l’un des centres d’excellence du vin d’Alsace suite à l’interdiction en 1575 d’utiliser des plants non nobles.
Au XIXe siècle, le vignoble alsacien connaît un lent déclin en quantité et en qualité. L’annexion de la région par le Reich de Guillaume II en 1870 a coupé en bonne partie les liens commerciaux avec la France. Si au départ la région est le plus grand producteur du Reich, sa production n’est pas valorisée (on l’utilise pour couper d’autres vins) et l’importation de vins français, espagnols ou italiens fait reculer sa part. Après 1919, le vin d’Alsace a dû reconquérir sa place sur le marché national, très concurrentiel avec des régions bien mieux organisées et connues. Il s’opère par une quête de qualité avec le replantage de cépages sélectionnés, pour l’essentiel du pinot (noir et gris), du riesling et du gewurztraminer. La vendange filmée par Alfred Hugel, le propriétaire, a été comme celle de 1928 un excellent millésime qui a permis une politique de commercialisation ambitieuse.
Une vendange manuelle
La vigne présente un profil particulier typique du paysage alsacien de l’époque. La culture dite en quenouille qui lance les ceps à plus de deux mètres du sol afin de leur éviter les brumes matinales particulièrement favorables au développement des parasites tels que le mildiou et le gel. Ce type de plantation atteste de l’ancienneté de cette parcelle, les plus récentes en plaine, avec des cépages de moindre qualité, ayant plutôt opté pour un espacement de 5 mètres et la pousse sur fil de fer.
Le faible écartement entre les rangées explique le recours à la main d’œuvre humaine et à la traction animale. L’entretien des vignes suit le calendrier classique, avec la particularité de l’utilisation de fumure l’hiver. La vendange proprement dite se fait à la main plutôt par les femmes, les hommes se destinant au travail très physique du transport des lourdes hottes et du geste spécifique du versement, ou au contrôle expert de la quantité (on tasse les cuves). Les chevaux attelés qui emmènent les cuves en bois signalent l’aisance de l’exploitation.
Sociabilité dans les vignes
La banalité de la scène se déroulant au cœur de l’automne n’est qu’apparente. La présence du propriétaire sur les parcelles n’est ni systématique, ni continue. Or il arrive avec sa caméra X, un accessoire en contraste total avec le caractère traditionnel de l’activité viticole. C’est ce qui justifie aussi la ribambelle de jeunes enfants et leurs jeux, leurs exclamations. Les vendanges représentent en effet un épisode singulier pour la communauté des ouvriers, qui sait si l’année va être bonne et qui fête la fin d’un cycle. La production, elle, ressort du travail du vigneron dans sa cave installée au milieu de Riquewihr depuis 1902.
La dernière séquence saisit la vingtaine d’employés agricoles de la maison Hugel lors de la pause du déjeuner. En 1949, celle-ci comptait outre quatre employés de bureau, six à huit hommes à la vinification, et, comme en 1929, 12 hommes et 10 femmes dans les vignes. Un double panoramique fixe le groupe assis, aligné le dos aux ceps. Les quelques hommes et les nombreuses femmes boivent (peut-être) du vin dans des gobelets ou à même un tonnelet. Ils mangent un repas fruste composé surtout d’une miche de pain, peut-être accompagnée d’un morceau de fromage. L’Alsace demeure encore dans une ruralité dense et peu enrichie où les différences de classe persistent.Bibliographie
Isabelle Bianquis, Alsace, de l'homme au vin, Gérard Klopp, Thionville, 1988.
André Lucius, "Le vignoble alsacien", Annales de géographie, 1922, n°171, p. 205-214.
Jean Tricard, "Le vignoble alsacien", L'Information Géographique, 1949, vol. 13, n°1, p. 21-27.
Article rédigé par
ALEXANDRE SUMPF, 13 décembre 2018
- ↑ En tant que partie d'une production amateur, cette séquence n'a pas reçu de titre de son réalisateur. Le titre affiché sur cette fiche a été librement forgé par son auteur dans le but de refléter au mieux son contenu.