Fête d'école et pique-nique familial (0093FI0020) : Différence entre versions
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La scène se joue en extérieur. Le sol en graviers, laisse penser qu’elle a lieu soit dans la cour d’une propriété privée, cependant il n’est pas à exclure qu’elle puisse avoir été tournée dans l’enceinte de l’école. Au centre du champ se trouve un homme d’une soixantaine d’années. Il discute avec d’autres personnes assises autour de lui. On aperçoit en arrière-plan deux jeunes filles et une dame d’un certain-âge assis sur les marches d’un escalier. Dans le plan suivant, sont rassemblées de nombreuses personnes, adultes et enfants, assises sur des chaises. On aperçoit, d’abord de dos deux fillettes d’une dizaine d’années, elles se tournent toutes les deux vers la caméra au même moment, ce qui laisse penser que le cinéaste les a appelées. Une troisième fille, un peu plus âgée se retourne en même temps qu’elles. La scène se termine abruptement. Toutes les personnes visibles dans cette scène semblent être habillées de façon élégante. | La scène se joue en extérieur. Le sol en graviers, laisse penser qu’elle a lieu soit dans la cour d’une propriété privée, cependant il n’est pas à exclure qu’elle puisse avoir été tournée dans l’enceinte de l’école. Au centre du champ se trouve un homme d’une soixantaine d’années. Il discute avec d’autres personnes assises autour de lui. On aperçoit en arrière-plan deux jeunes filles et une dame d’un certain-âge assis sur les marches d’un escalier. Dans le plan suivant, sont rassemblées de nombreuses personnes, adultes et enfants, assises sur des chaises. On aperçoit, d’abord de dos deux fillettes d’une dizaine d’années, elles se tournent toutes les deux vers la caméra au même moment, ce qui laisse penser que le cinéaste les a appelées. Une troisième fille, un peu plus âgée se retourne en même temps qu’elles. La scène se termine abruptement. Toutes les personnes visibles dans cette scène semblent être habillées de façon élégante. | ||
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− | Si les trois évènements montrés dans | + | Si les trois évènements montrés dans ce film (fête d’école, pique-nique en forêt, réunion de famille) n’ont pas réellement de lien entre eux, on peut tout de même dire que le fil conducteur est la famille. Le but de Monsieur Daussin (voir [http://Bas:F%C3%AAte_d%27%C3%A9cole_juin_1984_(0093FI0017)#tab=R_C3_A9sum_C3_A9 Fête d’école juin 1984] et [[Bas:Ecole_1985_(0093FI0020)#tab=Th_C3_A9matiques|Fête d’école]]) est de fixer des souvenirs familiaux. On peut aisément s’imaginer que ces films aient été visionnés au sein même du cercle familial, peut-être même visionnés à nouveau des années plus tard. Vincent Pinel, cinéaste et écrivain de cinéma, évoque la « charge émotionnelle » qui se trouve dans les films amateurs.<ref>PINEL Vincent, ''Écoles, genres et mouvements au cinéma'', Paris, Larousse, 2000, p. 21.</ref> C’est cette émotion qui est visible ici. On la retrouve dans les regards des enfants lancés à la caméra, ou très certainement à celui qui se trouve derrière. La fin de la bobine témoigne ainsi de la complicité entre le cinéaste et les sujets filmés : les deux jeunes filles rient lorsqu’elles se rendent compte qu’elles sont filmées. Les maladresses de tournage (cadrage parfois approximatif comme dans la vidéo Fête d’école juin 1984) et l’absence de montage montrent d’ailleurs que l’accent n’est pas mis sur le travail cinématographique, mais bien sur la fixation de souvenirs familiaux. Les fêtes d’écoles sont des moments qui permettent aux parents de constater l’évolution de leurs enfants, et ceux-ci ont souvent hâte de présenter leur spectacle à leurs parents. Le pique-nique aussi permet de créer des souvenirs familiaux. Il n’est donc pas étonnant que ces sujets soient des sujets de prédilection pour des films de famille. |
− | + | '''Le pique-nique, un moment de loisir et de détente en famille''' | |
− | Si depuis la Renaissance, soupers et collations en pleine air font partie du mode de vie aristocratique, c’est avec l’industrialisation que la pratique du déjeuner en extérieur se démocratise.<ref>BARTHE-DEMOISY Francine (dir.), ''Le pique-nique ou l’éloge d’un bonheur ordinaire'', Paris, Bréal, 2008, p. 24-28.</ref> L’apparition du tourisme, l’augmentation de la mobilité et la mise en place des congés et jours de repos favorisent son expansion. Francine Barthe-Demoisy insiste dans son ouvrage ''Le pique-nique ou l’éloge d’un bonheur ordinaire'', publié en 2008, sur la convivialité présente lors de cet événement. Elle explique qu’en cherchant un endroit à l’écart de la ville, à l’écart des autres, « on recherche la mise en l’écart, à l’abri, un repli dehors, on forme un cocon, une bulle. »<ref>BARTHE-DEMOISY Francine (dir.), ''Le pique-nique ou l’éloge d’un bonheur ordinaire'', Paris, Bréal, 2008, p. 16.</ref> Etre loin des autres permettant ainsi de consolider les liens internes à la famille. Le pique-nique est alors un temps de loisir et de « sociabilité familiale ».<ref>BARTHE-DEMOISY Francine (dir.), ''Le pique-nique ou l’éloge d’un bonheur ordinaire'', Paris, Bréal, 2008, p. 28.</ref> C’est ce qu’on voit dans la deuxième partie du film de Monsieur Daussin. Parents et enfants se retrouvent en forêt, loin des autres. Le repas, préparé à l’avance, permet à tous de manger ensemble. Pas de cuisine de dernière | + | Si depuis la Renaissance, soupers et collations en pleine air font partie du mode de vie aristocratique, c’est avec l’industrialisation que la pratique du déjeuner en extérieur se démocratise.<ref>BARTHE-DEMOISY Francine (dir.), ''Le pique-nique ou l’éloge d’un bonheur ordinaire'', Paris, Bréal, 2008, p. 24-28.</ref> L’apparition du tourisme, l’augmentation de la mobilité et la mise en place des congés et jours de repos favorisent son expansion. Francine Barthe-Demoisy insiste dans son ouvrage ''Le pique-nique ou l’éloge d’un bonheur ordinaire'', publié en 2008, sur la convivialité présente lors de cet événement. Elle explique qu’en cherchant un endroit à l’écart de la ville, à l’écart des autres, « on recherche la mise en l’écart, à l’abri, un repli dehors, on forme un cocon, une bulle. »<ref>BARTHE-DEMOISY Francine (dir.), ''Le pique-nique ou l’éloge d’un bonheur ordinaire'', Paris, Bréal, 2008, p. 16.</ref> Etre loin des autres permettant ainsi de consolider les liens internes à la famille. Le pique-nique est alors un temps de loisir et de « sociabilité familiale ».<ref>BARTHE-DEMOISY Francine (dir.), ''Le pique-nique ou l’éloge d’un bonheur ordinaire'', Paris, Bréal, 2008, p. 28.</ref> C’est ce qu’on voit dans la deuxième partie du film de Monsieur Daussin. Parents et enfants se retrouvent en forêt, loin des autres. Le repas, préparé à l’avance, permet à tous de manger ensemble. Pas de cuisine de dernière minute, tout le monde est présent pour partager ce moment en famille. Dans ce contexte, on comprend que l’importance émotionnelle de cet évènement dans la vie d’une famille, et donc l’intérêt de fixer ces souvenirs en les filmant. |
− | Si l’implication émotionnelle des protagonistes des films de famille est un élément non-négligeable | + | Si l’implication émotionnelle des protagonistes des films de famille est un élément non-négligeable, les images tournées sont loin de se résumer à cet unique aspect. C’est notamment visible ici dans la partie consacrée à la fête de fin d’année de l’école Notre-Dame de Sion. |
− | + | '''La pédagogie de l’école Notre-Dame de Sion, entre respect des programmes et particularités régionales''' | |
− | L’école Notre-Dame de Sion, créée à Strasbourg en 1919, est une école privée sous contrat d’association avec | + | L’école Notre-Dame de Sion, créée à Strasbourg en 1919, est une école privée sous contrat d’association avec l’État depuis 1959 suite à la mise en application de la loi Debré. Elle se doit de respecter les programmes édictés par le Ministère de l’Éducation nationale. C’est dans ce cadre que l’enseignement de la musique est décrit. En 1985, année de réalisation du film, une heure par semaine est réservée à l’enseignement musical des élèves de l’école élémentaire. Les programmes de cette année-là expliquent d’ailleurs que « l’école donne à l’enfant l’expérience du beau dans l’œuvre musicale ».<ref>''Arrêté du 15 mai 1985'' indiquant les programmes de l’école élémentaire (Ministre de l’Education nationale, J.-P. Chevènement), p. 22.</ref> Le chant (comptines, chansons…) constitue la majorité de l’éducation musicale prodiguée à l’école élémentaire. On peut d’ailleurs voir dans la première partie du film une chorale de filles chanter, accompagnée de garçons munis de guitare en papier, ce qui témoigne de l’éducation musicale donnée à l’école Notre-Dame de Sion. Toujours selon les programmes, les élèves doivent être sensibilisés à la culture musicale. L’enseignant doit leur parler de « quelques grandes figures de la musique (classique, moderne et contemporaine », de leur vie, de leurs productions musicales,…<ref>''Arrêté du 15 mai 1985'' indiquant les programmes de l’école élémentaire (Ministre de l’Education nationale, J.-P. Chevènement), p. 22.</ref> La pratique d’un instrument de musique est aussi prévue. L’apprentissage de la flûte à bec est par exemple répandu dans 60% des établissements scolaires avant 1995, visiblement aussi à Notre-Dame de Sion puisque on voit dans la vidéo un concert de flûte à bec donné par de jeunes élèves. |
− | Si l’école respecte les programmes institués par le Ministère de | + | Si l’école respecte les programmes institués par le Ministère de l’Éducation nationale, il est tout de même à noter qu’elle met en avant certains éléments du folklore alsacien. Les tenues portées par les jeunes filles lors du concert de flûtes peuvent d’ailleurs faire penser à des costumes régionaux. Chemisiers blancs, jupes bleues pâles froncées à la ceinture et ornées sur le bas de fleurs cousues en bleues foncées, rappellent les jupes du costume traditionnel alsacien : colorées et décorées sur le bas.<ref>LEGIN Philippe, ''Coutumes et costumes alsaciens'', Ingersheim-Colmar, S.A.E.P., 1993, p. 89.</ref> De plus, ''Fête d’école'', elle aussi tournée par Monsieur Daussin lors de fête d’école à Notre-Dame de Sion en 1981, montre des filles d’environ quatre ans porter la Schlupkapp (coiffe à nœud frontale traditionnelle alsacienne). Apparue au XIXème siècle entre Strasbourg et Colmar, cette coiffe est devenue emblématique de l’Alsace. Un dernier élément visible dans la vidéo analysée ici qui peut être rattaché au folklore alsacien est la danse effectuée par les enfants. En effet, cette ronde collective qui se transforme ensuite en danse à deux, un garçon et une fille tournant sur eux-mêmes, pourrait ainsi faire penser aux danses traditionnelles alsaciennes, qui, bien que n’étant plus pratiquées par toute la population dans les années 80, sont considérées par l’imaginaire collectif comme représentatives de la culture alsacienne. |
Pour plus d’information sur la création de l’école ou sur les écoles privées en France, se référer à la fiche d’analyse du film de Monsieur Daussin Fête d’école juin 1984. | Pour plus d’information sur la création de l’école ou sur les écoles privées en France, se référer à la fiche d’analyse du film de Monsieur Daussin Fête d’école juin 1984. |
Version actuelle datée du 6 mars 2020 à 17:34
Résumé
Description
Cette vidéo se divise en trois parties distinctes qui s’enchainent sans transition ou travail de montage. La première témoigne de plusieurs moments de la fête de fin d’année de l’école Notre-Dame de Sion. La deuxième partie montre une scène de pique-nique familial en forêt. Quant aux images de la dernière partie, on y voit un rassemblement de personnes de plusieurs générations.
- Fête de l’école Notre-Dame de Sion (de 0:00 à 2:19).
Des garçons d’environ 7 ans s’installent au fond de la scène, derrière un micro, accompagnés d’une femme (leur institutrice ?). Ils ont dans les mains une guitare fabriquée en papier. Des filles du même âge se placent sur le devant de la scène. Elles portent un chemisier blanc et une jupe longue. Elles tiennent dans leur main droite, une fleur en papier crépon. Si la caméra filme alternativement le groupe des filles, et celui des garçons, on a cependant l’impression que le cinéaste s’attarde plus particulièrement sur celui des garçons. Le fils de Monsieur Daussin se trouve-t-il dans ce groupe ? De la mise en scène de ce spectacle on peut déduire que les garçons font office d’orchestre, tandis que les filles composent la chorale. C’est la femme du début de la vidéo qui dirige l’ensemble du pied de l’estrade. La vidéo étant muette, il est impossible de savoir quelle musique a été chantée.
Un groupe de filles d’une dizaine d’année attend son tour à l’écart de la scène. Elles portent toutes les mêmes jupes bleues claires et un chemisier blanc. Elles s’apprêtent visiblement à jouer un morceau de flûte à bec puisqu’elles tiennent dans leurs mains cet instrument et, pour certaine, une partition. A côté d’elles, le groupe des « guitaristes ». Le cinéaste passe d’un plan d’ensemble à un plan resserré sur un garçon qui se rapproche visiblement de lui, ce qui semble confirmer l’hypothèse qu’il s’agisse du fils de Monsieur Daussin.
La prochaine partie du spectacle est une ronde dansée par des enfants de maternelle. Les filles portent des robes et tous les élèves ont une fleur en papier, rouge ou jaune, dans leurs cheveux. Les enfants font d’abord une ronde collective avant de danser deux par deux, un garçon et une fille.
Dans la scène suivante réapparaissent les jeunes filles à la flûte. Toutes sont accroupies sur scène et jouent, une seule reste debout et semble jouer le rôle de chef d’orchestre. Comme pour toutes les autres scènes, la personne qui filme est dans le public, au pied de la scène, ce qui crée une contre-plongée mettant en valeur les élèves. Le cinéaste ne se concentre jamais sur une seule personne, mais préfère plutôt les plans d’ensemble. On peut apercevoir en arrière-plan qu’une partie du public observe le spectacle depuis les fenêtres du bâtiment de l’école.
Cette première partie sur la fête de l’école s’achève sur une scène de lancer de ballons de baudruches de couleur. A ces ballons de couleur sont accrochés des papiers sur lesquels sont sûrement écrits des messages. Cela rappelle la scène d’une autre vidéo tournée par Monsieur Daussin, Fête d’école juin 1984, ce qui laisse supposer que ce moment était une sorte de tradition dans l’école Notre-Dame de Sion. Cela est confirmé par une photo récente trouvée sur le site officiel de l’école Notre-Dame de Sion.[1] Comme pour la vidéo précédente, le cinéaste suit les ballons qui s’élèvent dans le ciel, bien au-dessus des bâtiments de l’école. L’objectif de la caméra se concentre alors sur la foule, plus particulièrement sur un groupe de filles qui se trouvent au centre du champ, avant de filmer à nouveau les ballons dans le ciel.
- Pique-nique en forêt (de 2:20 à 3:04).
Dans un mouvement de travelling horizontal, la caméra balaie la scène de pique-nique en forêt, ce qui permet de donner une vue d’ensemble de la situation. On voit tout d’abord deux femmes et un homme sortir paniers et glacière du coffre d’une voiture bleue foncée, puis un homme en short avec une casquette chercher quelque chose dans le coffre d’une voiture rouge. Une femme donne une assiette en carton à un enfant, tandis que d’autres personnes sont assises sur des troncs d’arbres coupés. Paniers et boîtes en plastiques très en vogue à l’époque, sont sortis pour le pique-nique. On voit une dernière voiture, le coffre ouvert, ce qui laisse apercevoir les sacs de provisions. Onze personnes au total sont visibles dans cette scène, ils étaient donc au moins douze en comptant la personne qui filme. Tous sont habillés de manière décontractée. S’ensuit un plan resserré sur un service d’assiettes à dessert, et une cagette contenant deux tartes aux fruits, une femme s’apprête visiblement à servir le dessert. La scène se termine sur des gros plans de certains participants du pique-nique.
- Rassemblement (de 3:05 à 3:24).
La scène se joue en extérieur. Le sol en graviers, laisse penser qu’elle a lieu soit dans la cour d’une propriété privée, cependant il n’est pas à exclure qu’elle puisse avoir été tournée dans l’enceinte de l’école. Au centre du champ se trouve un homme d’une soixantaine d’années. Il discute avec d’autres personnes assises autour de lui. On aperçoit en arrière-plan deux jeunes filles et une dame d’un certain-âge assis sur les marches d’un escalier. Dans le plan suivant, sont rassemblées de nombreuses personnes, adultes et enfants, assises sur des chaises. On aperçoit, d’abord de dos deux fillettes d’une dizaine d’années, elles se tournent toutes les deux vers la caméra au même moment, ce qui laisse penser que le cinéaste les a appelées. Une troisième fille, un peu plus âgée se retourne en même temps qu’elles. La scène se termine abruptement. Toutes les personnes visibles dans cette scène semblent être habillées de façon élégante.
Contexte et analyse
Le film de famille, un support nostalgique
Si les trois évènements montrés dans ce film (fête d’école, pique-nique en forêt, réunion de famille) n’ont pas réellement de lien entre eux, on peut tout de même dire que le fil conducteur est la famille. Le but de Monsieur Daussin (voir Fête d’école juin 1984 et Fête d’école) est de fixer des souvenirs familiaux. On peut aisément s’imaginer que ces films aient été visionnés au sein même du cercle familial, peut-être même visionnés à nouveau des années plus tard. Vincent Pinel, cinéaste et écrivain de cinéma, évoque la « charge émotionnelle » qui se trouve dans les films amateurs.[2] C’est cette émotion qui est visible ici. On la retrouve dans les regards des enfants lancés à la caméra, ou très certainement à celui qui se trouve derrière. La fin de la bobine témoigne ainsi de la complicité entre le cinéaste et les sujets filmés : les deux jeunes filles rient lorsqu’elles se rendent compte qu’elles sont filmées. Les maladresses de tournage (cadrage parfois approximatif comme dans la vidéo Fête d’école juin 1984) et l’absence de montage montrent d’ailleurs que l’accent n’est pas mis sur le travail cinématographique, mais bien sur la fixation de souvenirs familiaux. Les fêtes d’écoles sont des moments qui permettent aux parents de constater l’évolution de leurs enfants, et ceux-ci ont souvent hâte de présenter leur spectacle à leurs parents. Le pique-nique aussi permet de créer des souvenirs familiaux. Il n’est donc pas étonnant que ces sujets soient des sujets de prédilection pour des films de famille.
Le pique-nique, un moment de loisir et de détente en famille
Si depuis la Renaissance, soupers et collations en pleine air font partie du mode de vie aristocratique, c’est avec l’industrialisation que la pratique du déjeuner en extérieur se démocratise.[3] L’apparition du tourisme, l’augmentation de la mobilité et la mise en place des congés et jours de repos favorisent son expansion. Francine Barthe-Demoisy insiste dans son ouvrage Le pique-nique ou l’éloge d’un bonheur ordinaire, publié en 2008, sur la convivialité présente lors de cet événement. Elle explique qu’en cherchant un endroit à l’écart de la ville, à l’écart des autres, « on recherche la mise en l’écart, à l’abri, un repli dehors, on forme un cocon, une bulle. »[4] Etre loin des autres permettant ainsi de consolider les liens internes à la famille. Le pique-nique est alors un temps de loisir et de « sociabilité familiale ».[5] C’est ce qu’on voit dans la deuxième partie du film de Monsieur Daussin. Parents et enfants se retrouvent en forêt, loin des autres. Le repas, préparé à l’avance, permet à tous de manger ensemble. Pas de cuisine de dernière minute, tout le monde est présent pour partager ce moment en famille. Dans ce contexte, on comprend que l’importance émotionnelle de cet évènement dans la vie d’une famille, et donc l’intérêt de fixer ces souvenirs en les filmant.
Si l’implication émotionnelle des protagonistes des films de famille est un élément non-négligeable, les images tournées sont loin de se résumer à cet unique aspect. C’est notamment visible ici dans la partie consacrée à la fête de fin d’année de l’école Notre-Dame de Sion.
La pédagogie de l’école Notre-Dame de Sion, entre respect des programmes et particularités régionales
L’école Notre-Dame de Sion, créée à Strasbourg en 1919, est une école privée sous contrat d’association avec l’État depuis 1959 suite à la mise en application de la loi Debré. Elle se doit de respecter les programmes édictés par le Ministère de l’Éducation nationale. C’est dans ce cadre que l’enseignement de la musique est décrit. En 1985, année de réalisation du film, une heure par semaine est réservée à l’enseignement musical des élèves de l’école élémentaire. Les programmes de cette année-là expliquent d’ailleurs que « l’école donne à l’enfant l’expérience du beau dans l’œuvre musicale ».[6] Le chant (comptines, chansons…) constitue la majorité de l’éducation musicale prodiguée à l’école élémentaire. On peut d’ailleurs voir dans la première partie du film une chorale de filles chanter, accompagnée de garçons munis de guitare en papier, ce qui témoigne de l’éducation musicale donnée à l’école Notre-Dame de Sion. Toujours selon les programmes, les élèves doivent être sensibilisés à la culture musicale. L’enseignant doit leur parler de « quelques grandes figures de la musique (classique, moderne et contemporaine », de leur vie, de leurs productions musicales,…[7] La pratique d’un instrument de musique est aussi prévue. L’apprentissage de la flûte à bec est par exemple répandu dans 60% des établissements scolaires avant 1995, visiblement aussi à Notre-Dame de Sion puisque on voit dans la vidéo un concert de flûte à bec donné par de jeunes élèves.
Si l’école respecte les programmes institués par le Ministère de l’Éducation nationale, il est tout de même à noter qu’elle met en avant certains éléments du folklore alsacien. Les tenues portées par les jeunes filles lors du concert de flûtes peuvent d’ailleurs faire penser à des costumes régionaux. Chemisiers blancs, jupes bleues pâles froncées à la ceinture et ornées sur le bas de fleurs cousues en bleues foncées, rappellent les jupes du costume traditionnel alsacien : colorées et décorées sur le bas.[8] De plus, Fête d’école, elle aussi tournée par Monsieur Daussin lors de fête d’école à Notre-Dame de Sion en 1981, montre des filles d’environ quatre ans porter la Schlupkapp (coiffe à nœud frontale traditionnelle alsacienne). Apparue au XIXème siècle entre Strasbourg et Colmar, cette coiffe est devenue emblématique de l’Alsace. Un dernier élément visible dans la vidéo analysée ici qui peut être rattaché au folklore alsacien est la danse effectuée par les enfants. En effet, cette ronde collective qui se transforme ensuite en danse à deux, un garçon et une fille tournant sur eux-mêmes, pourrait ainsi faire penser aux danses traditionnelles alsaciennes, qui, bien que n’étant plus pratiquées par toute la population dans les années 80, sont considérées par l’imaginaire collectif comme représentatives de la culture alsacienne.
Pour plus d’information sur la création de l’école ou sur les écoles privées en France, se référer à la fiche d’analyse du film de Monsieur Daussin Fête d’école juin 1984.Bibliographie
Arrêté du 15 mai 1985 indiquant les programmes de l’école élémentaire (Ministre de l’Education nationale, J.-P. Chevènement).
- Ouvrages scientifiques :
BARTHE-DEMOISY Francine (dir.), Le pique-nique ou l’éloge d’un bonheur ordinaire, Paris, Bréal, 2008.
LEGIN Philippe, Coutumes et costumes alsaciens, Ingersheim-Colmar, S.A.E.P., 1993.
PINEL Vincent, Ecoles, genres et mouvements au cinéma, Paris, Larousse, 2000.
POUCET Bruno, L’enseignement privé en France, « Que sais-je ? », Paris, PUF, 2012. Programme de 1985.
- Site internet :
http://nds67.toutemonecole.fr/pages/123401 (site officiel de l'école Notre-Dame de Sion, dernière consultation le 30 décembre 2019).
Article rédigé par
Pauline Wolf, 05 janvier 2020
- ↑ http://nds67.toutemonecole.fr/pages/123401
- ↑ PINEL Vincent, Écoles, genres et mouvements au cinéma, Paris, Larousse, 2000, p. 21.
- ↑ BARTHE-DEMOISY Francine (dir.), Le pique-nique ou l’éloge d’un bonheur ordinaire, Paris, Bréal, 2008, p. 24-28.
- ↑ BARTHE-DEMOISY Francine (dir.), Le pique-nique ou l’éloge d’un bonheur ordinaire, Paris, Bréal, 2008, p. 16.
- ↑ BARTHE-DEMOISY Francine (dir.), Le pique-nique ou l’éloge d’un bonheur ordinaire, Paris, Bréal, 2008, p. 28.
- ↑ Arrêté du 15 mai 1985 indiquant les programmes de l’école élémentaire (Ministre de l’Education nationale, J.-P. Chevènement), p. 22.
- ↑ Arrêté du 15 mai 1985 indiquant les programmes de l’école élémentaire (Ministre de l’Education nationale, J.-P. Chevènement), p. 22.
- ↑ LEGIN Philippe, Coutumes et costumes alsaciens, Ingersheim-Colmar, S.A.E.P., 1993, p. 89.