Excursion "Manutab" au Haut-Koenigsbourg (0127FS0016) : Différence entre versions

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Saint-Louis au propriétaire Charles Messmer de la nouvelle société Les Tabliers de Saint-Louis.]]
 
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Version du 15 mai 2020 à 17:09


Avertissement[1]

Résumé


Visite du Haut Koenigsbourg par les ouvrières de l’entreprise de textile Les Tabliers de Saint-Louis vers 1955, filmé par Charles Messmer.

Métadonnées

N° support :  0127FS0016
Date :  Entre 1950 et 1955
Coloration :  Noir et blanc
Son :  Muet
Durée :  00:03:56
Cinéastes :  Messmer, Charles
Format original :  16 mm
Genre :  Film amateur
Thématiques :  Sites patrimoniaux et touristiques
Institution d'origine :  MIRA

Contexte et analyse


Charles Messmer, était dessinateur sur tissus aux Ets Wallach à Mulhouse. Il déménagea à Saint-Louis pour travailler avec Monsieur August Schneider aux Tabliers et Textiles de Saint-Louis. Lorsque ce dernier, qui avait deux fils mais trois firmes, l'une en Allemagne, l'autre en Suisse et la troisième en France, décida de prendre sa retraite, il céda celle de Saint-Louis à monsieur Messmer en 1955. Sa fille, Michèle Gower-Messmer avait alors 9 ans. Messmer rebaptise la firme Les Tabliers de Saint-Louis. Sa fille se rappelle qu'il avait dessiné un nouveau sigle sous forme d'étiquette. Ce logo devait être accrochée à chaque robe, tablier ou autres produit confectionné par l’entreprise, elle se souvient qu’elle aimait participer à cette partie du processus de fabrication, « ce que j'adorais faire à mes heures perdues... » se souvient sa fille. D’après cette dernière, il existe aussi un film où Mr Schneider, ses fils et Charles Messmer prennent l'avion à l'aéroport de Bâle-Mulhouse pour Paris où Mr Schneider introduisit probablement Charles Messmer à ses différents contacts, on peut citer parmi eux Le Printemps, La Samaritaine et les Galeries Lafayette. L’entreprise a été obligé de fermer ses portes dans les années 1960.

Les ouvrières regardent le caméraman quand il filme le groupe, ou on l’ignore quand il passe près des employées, personne ne semble lui parler il semble normal qu’il passe son temps à filmer ses employées. On remarque beaucoup de regards à la caméra. Personne ne semble gêné à l’idée d’être filmé, les employées prennent même la pose pour certaines, là où d’autres ne semblent pas prêter attention à la caméra. Au début du film on note un homme qui est filmé, il semble cacher son visage sous son chapeau, à moins qu’il ne soit en train de filmer ou photographier Charles Messmer, en effet il transporte lui aussi une caméra ou un appareil photo sur lui. Les plans ne sont pas souvent fixes, la caméra reste assez mobile pour montrer tout le monde, ou la plus grande partie possible du château, pour cela monsieur Messmer tourne sur lui-même. Il opère ces plans panoramiques de gauche à droite ou inversement. La caméra se déplace pour passer des employées au monument comme lorsqu’il passe de ses employées qui entrent dans l’enceinte du château à la porte, puis aux bas-reliefs au-dessus de cette dernière, jusqu’à filmer le sommet des tours. Vers la fin du film on remarque un cours instant de raté, peut-être à cause de la pellicule. Charles Messmer utilise surtout des plans larges pour filmer l'ensemble du groupe avec tous les employés. On peut noter l’utilisation de plans plus rapprochés sur les employées qui posent devant la porte du château. Le cinéaste amateur filme le château avec des plans assez larges focalisés sur les tours, les murailles et le donjon du château sans effet de zoom, probablement par limitation technique. Le film est muet, il n’a pas de titre connu, il n’y a pas de carton ni de générique. La seule forme de montage repose simplement sur le fait que la caméra s’éteint et se rallume régulièrement ce qui donne des coupures. Tout porte à croire que c’est un film réalisé pour le plaisir de garder une trace de cette journée passée avec ses employées.

Une excursion culturelle

Le film se passe dans un décor bien connu en Alsace, le Haut-Koenigsbourg. Le Haut-Koenigsbourg est le château le plus connu d’Alsace, la première mention dont on dispose sur un château qui se trouve à cet emplacement remonte à 1147. Le château est en ruine depuis 1633, après un siège de 52 jours, il est incendié par les Suédois puis abandonné en état de ruine jusqu’à la moitié du XIXe siècle. On dispose de preuves qui attestent que les visites du château se font en toute illégalité depuis sa destruction, mais à partir de 1840 les premières visites des ruines sont organisées. En 1862 le château est classé monument national et entretenu en attendant une restauration. La construction est assurée par la Société pour la conservation des monuments historiques d’Alsace entre 1856 et 1864, puis la ville de Sélestat prend la relève entre 1865 et 1899. Le château est offert en cadeau par la ville de Sélestat à Guillaume II, l’empereur allemand, en 1899 car la ville ne peut plus supporter le poids financier de la rénovation. Le coût de la restauration s’élève à 2.250.000 marks, et étant donné le prix très important, il est accepté que ce projet soit financé à parts égales entre le Reichsland Elsass-Lothringen, Guillaume II et l’Empire. Lors de l’incendie de le bibliothèque Strasbourg en 1870 pendant le siège de la ville, on perd les plus anciennes représentations du château qui dataient du milieu du XVIIIe siècle. La reconstruction doit donc se faire avec des visions d’artistes et en aucun cas comme un authentique château fort du Moyen ge. Guillaume II saisit l’opportunité de rénover le Haut-Koenigsbourg comme un symbole du passé germanique de l’Alsace, en effet, la région est annexée en 1871 à l’Empire allemand, il faut donc maintenant légitimer cet état de fait. C’est pourquoi on retrouve l’aigle des Habsbourg surmonté de l’aigle des Hohenzollern, la famille de Guillaume II, en bas-reliefs au-dessus de la porte principale. Après l'organisation des rénovations, les travaux reprennent en 1901 et en 1908 le château est inauguré. Les premières phases des travaux consistent à déblayer les gravats, la quantité de gravure sur pierre découverte est impressionnante et encore aujourd’hui toutes n’ont pas été référencées. Quant à la décoration intérieure, elle s’étendra entre 1904 et 1918. Les travaux sont confiés à l’architecte Bodo Ebhardt.

Le textile en Alsace

Dans le film, on suit la visite du Haut-Koenigsbourg par les employées d’un atelier textile en Alsace, cette activité n’est alors pas nouvelle. En effet en Alsace la première manufacture d’impression textile a été créée en 1746. Il s’agit d’un des pôles de compétence de la région, on peut noter la fondation en 1947 du Centre de Recherches Textiles de Mulhouse. A partir de la révolution industrielle les usines se multiplient dans le Sud de la région. Les indiennes fabriquées en Alsace se multiplient, de plus c’est un secteur qui fait également travailler les industries chimiques et mécaniques de la région. Dans les années 1950, le textile emploie 65.000 travailleurs en Alsace, c’est près du tiers du total des salariés de l’industrie dans la région. Les patrons sont souvent issu de la bourgeoisie protestante qui est formée dans la région, notamment à Mulhouse. On remarque une crise du secteur du textile en Alsace à partir de 1951 jusqu’au début du XXIe siècle, les causes sont multiples, on peut noter la réduction des débouchés sur les marchés coloniaux surtout l’Indochine, la concurrence des pays émergents, car c’est dans ces mêmes années que la baisse du prix du transport rend les délocalisations intéressantes pour les industriels, et on remarque aussi une modification des habitudes de consommation des ménages au profit d’équipements plus durables. En 1962 on compte déjà l’arrêt de 61 entreprises de textile dans la région, on en compte au total 147 depuis les années 1950 et à partir des années 1970 les fermetures d’entreprises traditionnelles s’accélèrent jusqu’à perdre sa place de premier employeur en Alsace en 1975. Aujourd’hui l’industrie textile emploie environ 8.500 employés répartis sur 250 entreprises dans la région.

Le travail des femmes

La main d’oeuvre de l’usine est majoritairement constituée de femmes, la croyance répandue consiste à croire que les femmes ont découvert les usines pendant la Première Guerre mondiale et qu’elles ont commencé à y être massivement représentées après la Seconde Guerre mondiale. Pourtant les femmes ont toujours travaillé, les femmes ont toujours été paysannes et dès la Révolution industrielle elles ont été ouvrières. Même si elles n’ont pas commencé à travailler dans les années 1960 leur travail constitue souvent un salaire d’appoint. Les femmes représentent 36.9% de la population active en 1911, 39.9% en 1926, 40.3% en 1982. Ainsi elles sont de plus en plus nombreuses à travailler mais on ne peut pas dire qu’elles n’ont pas travaillé comme les hommes. En 1960 en France on compte 6.5 millions de femmes au travail. Le textile français est en déclin depuis la Première Guerre mondiale car la main d’oeuvre principale, les femmes, s’oriente déjà de plus en plus vers le domaine tertiaire. En 1914 deux femmes sur trois qui travaillent en usine travaillent dans le textile, les effectifs féminins dans les usines de manière générale sont d’environ 36%, par contre elles sont seulement 14% à être qualifiées. Vers la fin des années 1950 les femmes se dirigent vers les emplois de bureau moins éprouvant physiquement. À ce moment-là un ouvrier sur cinq est une femme en France. Elles travaillent alors dans les conserveries, les ateliers d’abattages, le travail du textile est alors de plus en plus domestique. Les femmes occupent souvent des emplois répétitifs, peu rémunérés et sans perspectives d’évolution de carrière. Le textile est un secteur très féminin car l’apprentissage de la couture est encore très répandu. Ces ouvrières connaissent des problèmes de santé qui sont récurrents chez elles, comme des problèmes de vue à cause de la poussière de laine dans les yeux. Leurs nerfs sont amenés à lâcher lorsqu’elles supportent mal les cadences et le règlement mis en place par des hommes qui regardent de haut leurs subalternes. La fille de Charles Messmer se souvient « Je me rappelle aussi la forte imprégnation des tissus de l'époque et dont l'émanation irritait les yeux ! ». Elles acceptent de subir ces conditions de travail pour devenir indépendantes car à la maison le travail ne s’arrête jamais non plus.

Lieux ou monuments


Château du Haut-Koenigsbourg

Bibliographie


BARD Christine, Les femmes dans la société française au XXe siècle, Paris, Armand Colin, 2003.

BARD Christine avec EL AMRANI Frédérique et PAVARD Bibia, Histoire des Femmes dans la France des XIXe et XXe siècle, Paris, Ellipses, 2013.

BARIDON Laurent, PINTUS Nathalie, Le château du Haut-Koenigsbourg, à la recherche du Moyen ge, Paris, CNRS éditions, 1998.

BATTAGLIOLA Françoise, Histoire du travail des femmes, Paris, Éd. la Découverte, 2004.

THÉBAUD Françoise (dir), DUBY Georges et PERROT Michelle, Histoire des femmes en Occident V. Le XXe siècle, Paris, Perrin, 2002.

KILL René, Le château du Haut-Koenigsbourg de la destruction au projet de restauration, Saverne, Association Alsace Médiévale, 2018. WACHTER Maryvonne, NOTO CAMPANELLA Yves, Haut-KOENIGSBOURG, Sarreguemines, Pierron, 1999. ZANCARINI-FOURNEL Michelle, Histoire des femmes en France XIXe-XXe siècles, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2005.

Les familles professionnelles dans la zone emploi-formation « Haut-Rhin Sud », Direction régionale du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle, Strasbourg, DRTEFP, 1996.

Les industries de l’habillement en Alsace monographie économique et socio-professionnelle, service d’Études, Bureau d’Économie Théorique et Appliquées, Strasbourg, 1984.

Nicolas Stoskopf, Pierre Vonau. L’Alsace du second XXe siècle : la grande mutation industrielle. Revue d’Alsace, Fédération des sociétés d’histoire et d’archéologie d’Alsace, 2004, pp.159-192 [en ligne, consulté le 15 avril 2020]

https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01164228/document

Documents annexes


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Trois photos prises lors d’un repas de Noël de l’entreprise. Sur la première photo les deux femmes en blanc à gauche sont les contremaîtresses, les demoiselles Umschneider.
Capture issue du film dans lequel Charles Messmer accompagne August Schneider pour rencontrer ses clients à Paris, ils s’y rendent en avion depuis Bâle.
Le nouveau logo dessiné par Charles Messmer pour sa société qui était attaché à chaque produit confectionné.
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Dépliant commercial annonçant la cession par August Schneider des Tabliers et Textiles de Saint-Louis au propriétaire Charles Messmer de la nouvelle société Les Tabliers de Saint-Louis.



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