Saverne:Fête Dieu (0052FN0037)
Avertissement[1]
Événements filmés ou en lien
Résumé
Description
Plan 1 : Commence par un gros plan sur la Grand Rue et sur la foule qui l’occupe. On y distingue une bannière religieuse. Le cinéaste fait ensuite un traveling de gauche à droite, semble suivre une femme qui se déplace du même mouvement que la caméra, puis film pendant une seconde les passants sur le trottoir.
Plan 2 : Montre un homme marchand avec un religieux.
Plan 3 : Plan large sur la procession en elle-même. On y distingue des religieuses marchant d’un pas lent.
Plan 4 : Plan plus resserré sur la suite de la procession. On y voit de jeunes adultes dont le visage semble fermé, suivis par des prêtres.
Plan 5 : Procession continue avec cette fois une mise en valeur des bannières religieuses, ainsi que deux statues : l’une de la Vierge Marie et l’autre de ce qui semble être Jésus.
Plan 6 : Arrivée d’une fanfare (de pompiers ?) Le cinéaste semble être légèrement plus en hauteur que les autres (peut-être debout sur un banc ?).
Plan 7 : Plan en contre-plongée sur la fanfare, et en particulier sur les saxophonistes qui arrivent en premier plan.
Plan 8 : Plan très court sur les galons des pompiers.
Plan 9 : Plan à nouveau en hauteur sur la procession, mettant en valeur ce qui semble être en premier plan des élus, et en fond des enfants habillés de blanc, suivis par un dai.
Contexte et analyse
Histoire de la Fête-Dieu
La fête Dieu, aussi appelée « la fête du Corpus Christi » ou « la fête du Saint-Sacrement », est une fête religieuse catholique, célébrée soixante jours après Pâques, ou dans certains pays bénéficiant d’une dérogation, le dimanche d’après Pâques, comme en France. Cette fête se traduit par une procession traversant la ville afin de commémorer l’Eucharistie, c’est-à-dire la présence réelle du Christ dans le pain et le vin servis lors de la messe.
Les origines de cette fête remontent au XIIIe siècle, du fait d’un miracle qui s’est déroulé à Bolsena, une petite ville italienne située entre Florence et Rome. Lors d’une messe, l’hostie aurait pris une couleur rosée, et du sang aurait taché le corporal (vêtement liturgique, généralement de forme carrée, représentant le linge sur lequel est posé le corps du Christ). Suite à cet événement, le pape Urbain IV décide de créer officiellement la fête du Corps du Christ (Corpus Christi ou Fête-Dieu) le 8 septembre 1264. Quelques siècles plus tard, alors que la Réforme (qui entre autres, conteste la présence réelle du Christ dans l’Eucharistie) prend de la vitesse, le Concile de Trente (1547-1563) mets l’accent sur cette fête, et en particulier sur le faste qui doit y être montré dans un objectif de propagande, mais aussi de peur de la fin du monde.
Des indulgences (remise de peine au Purgatoire) sont mises en place : Deux-cents jours pour celle ou celui qui jeûne la veille, trois-cents pour ceux qui participent à la procession, deux-cents pour ceux qui assistent aux heures canoniales (quatre messes réparties dans la journée). D’autres indulgences sont encore prévues pour l’office de l’Octave (la messe du dimanche). Dans un contexte où les gens ont une peur panique de la vie après la mort, et en particulier de l’enfer, on peut s’imaginer l’impact que ces mesures ont pu avoir sur la participation des croyants à cette fête. 400px|thumb|right|Photographie d'enfants défilant à Geispolsheim en 1910 ©NUMISTRAL
Déroulé théorique de la Fête-Dieu
La Fête-Dieu consiste en une longue procession, réunissant tous les fidèles d’une commune. Cette fête commence dès l’aube avec une messe, puis par l’ornement de quatre autels répartis sur le parcours de la procession. Pour les habitants, cette fête est l’occasion de se retrouver entre voisins et participe à la formation d'un sentiment d’appartenance et de cohésion au sein de la communauté. La procession est menée par un prêtre portant l’Eucharistie, suivis par une foule de croyants, et du Saint-Sacrement abrité sous un dais, qui est porté par des notables de la commune, bien souvent des élus pour le cas de la France. On porte également des statues, pouvant représenter des saints protecteurs ou importants pour les habitants de la commune, ainsi que l’incontournable Vierge-Marie. Les quatre autels que l’on a mentionnés précédemment sont l’occasion d’un arrêt où le prêtre bénit la foule et/ou prononce une courte messe. Les rues sont souvent richement décorées, des fleurs recouvrent les façades et des pétales de rose le sol. Ces décorations sont souvent accompagnées de draperies et de guirlandes, ainsi que de musique (ce rôle souvent tenu par la fanfare des pompiers ou celle de la ville).
Religion et politique dans les années 1930
La scène montrée dans le film se déroule dans les années 1930, soit peu de temps après la Première Guerre mondiale et le retour de l’Alsace à la France, en 1918. Durant la période allemande (1871-1918), la population alsacienne s’est forgé une image mythique de la France, comme pays idéal démocratique qui autorisera aux Alsaciens de conserver leur langue, et leur permettra d’obtenir les droits régionaux que l’Allemagne leur avait refusé. La déception est rude puisque la France refuse de reconnaître les alsaciens comme une minorité nationale, et mets en place une lourde politique d’assimilation. En juin-juillet 1924 le gouvernement Herriot essaie d’abroger le Code Civil, applicable en Alsace depuis 1900. Cette mesure entraîne une augmentation drastique des tensions, avec, en fer de lance, le clergé catholique alsacien, dont une partie appelle à l’action contre la République.
Ce « malaise alsacien » débouche sur le procès de Colmar en 1928, durant lequel les principaux leaders du parti autonomiste alsacien sont jugés pour « atteinte à la sûreté de l’État ». Malgré des bases juridiques douteuses et l’incapacité des autorités à pouvoir démontrer l’existence d’un complot, l’autonomisme alsacien tend à refluer à la suite de ce procès. Cependant, une partie des leaders des partis autonomistes restants, notamment Hermann Bickler et Joseph Rossé refusent la conciliation avec les partis nationaux, et vont même jusqu’à proclamer leur admiration envers le partis Nazi, arrivé au pouvoir en Allemagne au début de l’année 1933, qui pourtant prône le rattachement de l’Alsace-Moselle au Reich.
La Fête-Dieu à Saverne en images
Ce film, d’une cinquantaine de secondes, est composé de neuf plans. La procession est exclusivement filmée dans la Grand ’Rue de la ville, et semble se situer entre l’église catholique et le château des Rohan. Le film commence par un plan élevé au-dessus de la foule, montrant le nombre important de fidèles présents. Le cinéaste est probablement debout sur un banc, afin d’avoir un meilleur point de vue. Il tourne ensuite lentement sa caméra vers la droite, dévoilant ainsi un groupe de fidèles portant une bannière blanche, puis, toujours dans le même mouvement, suis le visage d’une femme qui marche dans le sens opposé à la procession. Ce premier plan est relativement long (00:00:00 – 00:00:09) et est le moyen pour le cinéaste de porter l’attention sur le nombre de fidèles réunis au centre-ville en utilisant deux échelles de grandeurs : la masse en surplombant la foule puis les individus, en montrant les gens remontant la rue tout en longeant les écluses.
Les plans suivants (00:00:15 -00:00:43) offrent des plans plus rapprochés de la foule. On y voit défiler des hommes, au visage grave, habillés pour l’occasion, suivis de la fanfare des pompiers qui semble jouer un air lent. On peut par ailleurs noter que l’orchestre n’est composé que de cuivres et de percussions. A l’arrivée de la fanfare, le cinéaste descend du banc et filme l’orchestre en contre-plongée, comme pour renforcer l’importance de la fanfare pour le reste de la procession. On remarque en effet que les participants semblent avancer au rythme de la musique qui est jouée.
Le dernier plan (00:00:43 – 00:00:51) montre l’arrivée des enfants, lançant des pétales de roses devant le Saint-Sacrement qui est abrité sous son dais traditionnel. Au premier plan défilent des hommes au visage très solennels, probablement des élus municipaux.
Ce film permet d’entrevoir le déroulement d’une procession religieuse, dans une Alsace où les tensions entre autonomistes et républicains sont encore relativement fortes. Ce document nous montre une grande mobilisation des habitants, ainsi que des services publics de la commune (notamment des pompiers) et du Conseil municipal. En outre, il permet d’indiquer l’investissement religieux de la population, dans une société qui s’athéise progressivement.Lieux ou monuments
Bibliographie
BERTHOLET, Jean, Histoire de l’institution de la Fête-Dieu, Liège, 1746
DEBUS KEHR, Monique, « La Fête-Dieu à Colmar à la fin du Moyen Âge », Revue d’Alsace n°141, 2015
FUCHS, Julien, "La jeunesse alsacienne et la question régionale (1918-1939)", Histoire Politique n°4, 2008
JORDAN, Benoît, « Fêtes et processions, une occupation rituelle de l'espace public », Revue d'Alsace n°141, 2015
VAN GENNEP, Arnold, Le folklore français - tome 2. Cycles de mai, de la Saint-Jean, de l’été et de l’automne, Robert Laffont, 1999 (rééd.)
Article rédigé par
Clément Brestel, 07 décembre 2019
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