Bas:Démonstration d'escrime (0086FS0001)
Résumé
Description
00:00-00:03 : carton « AFGA »
00:04-00:10 : plan large d’une démonstration d’escrime en plein air. Présence d’un enfant en bas âge en arrière plan. Aperçu du lieu de pratique : en bord de route, sans doute devant une habitation.
00:11-00:24 : plan large depuis l’autre côté du plan précédant. Échanges de coups d’estoc des escrimeuses. Sur l’arrière plan gauche : une grange et un vélo. En arrière plan, une grande maison.
00:25-00:33 : retour au plan initial pour une séquence de coups d’estoc.
00:34-00:50 : retour au plan large de dos à la route, pas tout à fait cadré comme le deuxième plan.
00:51-01:02 : plan rapproché de l’une des escrimeuses. Arrière plan informatif : homme à vélo, présence d’un lampadaire, d’un panneau de rue.
01:03-01:11 : retour au plan large de dos à la route, pas tout à fait cadré comme le deuxième plan. Arrière plan animé : arrivée d’une femme à vélo, présence d’un homme qui passe le balai.
01:12-01:25 : plan large de dos à la route, cadré comme le deuxième plan. Les escrimeuses retirent leur casque se saluent et saluent la caméra.
Contexte et analyse
Fritz Süffert (1891-1945) était un entomologiste allemand spécialisé dans l’étude des papillons, en particulier leur aspect mimétique. Au cours des années 1920, Süffert est étudiant en biologie à l’Université de Munich et devient l’assistant du généticien Richard Goldschmidt (1878-1956). Entre 1924 et 1936, Süffert travaille à l’Université de Fribourg en collaboration avec Hans Spemann (1869-1941), lauréat du prix Nobel de médecine en 1935. En 1933, Süffert effectue un voyage en Indonésie et s’essaie au film amateur, capturant quelques séquences à Bali. En 1935, Süffert et sa famille s’installent à Berlin. Süffert est marié à Maria Forrer, fille de l’archéologue Robert Forrer (1866-1947) et devient rédacteur en chef de la revue Die Naturwissenschaften, consacrée à l’étude des sciences naturelles. Süffert meurt le 24 avril 1945 lors de la bataille de Berlin, à quelques jours de la mort d’Hitler et de la capitulation de l’Allemagne nazie. Sa famille s’est ensuite installée à Strasbourg en 1947. Dans l’immédiat après-guerre, l’Allemagne connut la pire crise économique de son histoire, marquée par une hyperinflation sous la République de Weimar. Au début des années 1920, Weimar est en effet dans l’impossibilité de payer les réparations faramineuses fixées par le traité de Versailles. Le plan Dawes, signé à Paris en août 1924, permet à l’Allemagne d’alléger le coût des réparations. En France, les Jeux Olympiques de Paris ont lieu sans la délégation allemande, qui ne fut pas invitée par le conseil d’organisation. C’est toutefois lors de ces Jeux d’été de 1924 que l’escrime au fleuret fut ouverte aux femmes, vingt-huit après leur entrée masculine lors des premiers Jeux, organisés à Athènes en 1896. Pourtant, le caractère mixte des rencontres d’escrime remonte au Moyen Âge, au XIVe siècle. Maître escrimeur, Johannes Liechtenauer prône une mixité de l’escrime, bien que minoritaire pour le genre féminin dans ses Fechtbücher (ou traités d’escrime).
Cartons et coups d’estoc
Artifice récurrent du cinéma muet, l’intertitre est un complément écrit à l’image qui a progressivement disparu avec les progrès du cinéma sonore. Sur le carton d’ouverture de ce film, on peut retrouver l’acronyme AFGA pour Aktiengesellschaft für Anilinfabrikation, entreprise qui produisait des produits chimiques utilisés dans la fabrication de pellicules, de papier photo ainsi que de matériel de photographie et de cinéma amateur. Le caractère de ce carton semble ici plus publicitaire qu’autre chose. Il est fort probable que Fritz Süffert ait été client de l’enseigne allemande. On peut supposer que la caméra et la pellicule utilisée par Süffert provient sans doute d’un magasin de cette filiale. Un premier plan large révèle qu’il s’agit d’une démonstration amicale d’escrime en plein air, entre deux escrimeuses. Contrastant avec une activité majoritairement pratiquée par des hommes, s’ouvrant toutefois aux femmes en 1924 avec les Jeux de Paris, on peut imaginer l’intérêt exceptionnel de cette scène pour le filmeur. Les escrimeuses portent l’équipement de protection complet. On peut clairement identifier le masque, la cuirasse, le gant et le pantalon. À noter qu’elles portent également une sorte de tunique. Elles brandissent une arme d’estoc, en l’occurrence un fleuret, arme de convention par excellence de la pratique de l’escrime. Les échanges sont d’une fluidité remarquable, pouvant suggérer que les escrimeuses n’y sont pas à leur premier combat. Pour Süffert, sans doute qu’il fut également question d’illustrer le corps en mouvement, ici celui de la femme, dans le cadre de la pratique de l’escrime. Il ne s’agit donc pas d’une rencontre emprunte d’animosité et d’une atmosphère où plane l’esprit de compétition. On ressent à plusieurs reprises le caractère amical et purement ludique de la rencontre. À visage découvert, les deux escrimeuses se saluent d’une poignée de main, symbole de respect sportif par excellence. Un regard est alors adressé par chacune des compétitrices à la caméra, preuve qu’elles savaient qu’il s’agissait de filmer le combat, acquiescent également de la présence de la caméra et du filmeur.
Un arrière plan vivant : un film dans le film
Ce qui ressort de ce film de Fritz Süffert, c’est également la richesse de ses arrière-plans. Sur chacun de ses plans, l’arrière-plan se distingue par une petite scène de la vie quotidienne. Ces faits et gestes spontanés rapprochent alors davantage ce petit combat d’escrime à une pratique ludique qu’à un affrontement sportif compétitif, codifié et réglé. On distingue d’abord une route, ce qui indique qu’on pourrait être au devant d’une habitation. Toujours sur ce plan, un enfant en bas âge apparaît et se baisse pour ramasser quelque chose qui ressemble à des feuilles mortes. Sur un autre plan, filmé dos à la route, on aperçoit une grange sur le côté gauche, un vélo reposant contre la façade en bois. On ne sait pas s’il appartient à l’une des protagonistes, ni au filmeur. En arrière-plan se dresse une large habitation, suggérant que l’activité a lieu dans un espace où l’on vit plutôt aisément. Le cinquième plan se distingue des précédentes prises de vue, plus rapproché de l’une des protagonistes. Celle-ci apparaît presque de face, contrastant avec l’horizontalité des profils des combattantes des premiers plans. On remarque également la présence d’un lampadaire et d’un panneau de rue dans l’arrière-plan droit. Ce sont des signes d’urbanité et de modernité, signe que l’on se trouve bel et bien dans un endroit où il fait bon vivre. Dans l’arrière-plan toujours, un homme a vélo, visiblement plutôt bien vêtu, entre dans le champ de droite à gauche. De retour dos à la route et en face de l’habitation, une femme passe à vélo dans l’arrière-plan droit et tourne la tête en direction du combat. Notre attention se porte surtout sur le protagoniste présent dans l’arrière-plan gauche. Sans doute de passage au moment des faits, l’homme s’est arrêté, est descendu de son vélo pour regarder le combat, s’autorisant même une cigarette ! Il s’agit donc bel et bien d’un spectateur.Bibliographie
Escrime,
BOFFA Sergio, Les manuels de combat : Fechtbücher et Ringbücher, Turnhout, Brepols, 2014.
TERRET Thierry (dir) et VAUCELLE Serge, Le genre du sport, Toulouse, Presses Universitaires du Mirail, 2006.
Histoire du sport,
TERRET Thierry, Histoire du sport, Paris, Presses Universitaires de France, 2016.
Cinéma,
BIMBENET Jérôme, Film et histoire, Paris, Armand Colin, 2007.
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