Inauguration du mémorial du Struthof par De Gaulle (0005FH0006)
Événements filmés ou en lien
Résumé
Description
Le monument est dissimulé derrière un drapeau tricolore français d'une quarantaine de mètres. Le général De Gaulle arrive à l'entrée du camps, il monte dans une voiture et reste debout en faisant des saluts militaires à la foule pendant que la voiture roule lentement. On peut voir de nombreux drapeaux militaires français. Il y a un défilé militaire. Puis De Gaulle monte les marches menant au mémorial, il est accompagné de Pierre Sudreau et Edmond Michelet. Le drapeau est levé et l'on découvre un corps de déporté gravé dans la pierre. Un avion de chasse français passe au-dessus du camps. De Gaulle sert quelques mains dans le public puis repart en voiture avec le même rituel qu'à l'aller, il parade ensuite en ville.
Contexte et analyse
Après la défaite de l'Allemagne nazie en 1945, la France découvre brusquement l'ampleur et la nature des camps de concentration et d'extermination. Films, reportages photographiques et témoignages sur l'internement en Pologne et en Allemagne se multiplient dans l'immédiat après-guerre, l'opinion nationale et alsacienne est moins alertée au sujet de l'existence en France de plusieurs camps de transit et de déportation. Rejetant la faute sur l'occupant et les collabos, les nouvelles autorités minorent ou nient l'implication des institutions françaises dans le processus. Certains camps, comme celui de Natzweiler-Struthof en Alsace, servent un premier temps à l'internement de collaborateurs militaires et policiers - on en aurait compté jusqu'à 2000 en tout. C'est bien moins que les 52 000 détenus qui y sont passés entre 1941 et 1945, sans oublier les milliers de morts de mauvais traitement, les centaines d'exécutions, les 86 gazages de Juifs (août 1943).
Le retour des déportés politiques, ethniques et homosexuels qui ont fait l'expérience de Buchewald, Ravensbruck ou Birkenau occupe le devant de la scène nationale, laissant dans l'ombre le cas moins douloureux et problématique des "volontaires" forcés du STO. Mais en Alsace, les familles et les pouvoirs publics ont les yeux rivés sur une Europe de l'Est qui ferme brutalement ses frontières alors que s'y trouvent détenus des milliers d'Alsaciens incorporés (souvent de force) dans les rangs de la Wehrmacht. Ces "Malgré nous", ainsi qu'on les nomme localement, se posent en victimes du nazisme et nient toute faute dans les crimes de guerre à l'Est (qui n'intéressent pas grand-monde en France) et sur le territoire national, notamment à Oradour-sur-Glane. La situation singulière de l'Alsace pendant la guerre fait naître une mémoire à part qui, plus encore qu'ailleurs, reste aveugle et sourde à certains faits.
Un complexe mémoriel exceptionnel
Il faut attendre 1949 pour que le camp construit début 1941 et ouvert en avril perde sa vocation première. Sa gestion passe alors de la Justice aux Anciens combattants, prélude à son classement à l'inventaire des Monuments historiques en 1950. La chambre à gaz découverte en marge du camp, aménagée près du restaurant qui desservait avant-guerre ce lieu de tourisme montagnard, est elle aussi classée en 1951. Le camp installé sur une forte pente est réaménagé avec la destruction de la plupart des baraques, exceptée une servant pour les visites - on ne distingue que l'ensemble filmé à travers les barbelés dans le film de Weiss. En 1960, l’architecte en chef des Monuments historiques Bertrand Monnet fait édifier le Mémorial national de la déportation. Sur ce monument est gravée la forme en creux d'un corps squelettique de déporté, réalisée par le sculpteur Lucien Feugniaux. Le monument mesurant 41 mètres de haut, un drapeau de 500 m2 fut utilisé pour le couvrir jusqu'à son dévoilement lors de la cérémonie, moment bien filmé par le cinéaste amateur qui a pris place au milieu de la foule.
Le général (et la République) en majesté
Outre l'immense drapeau français et la marée de étendards tricolores des unités de l'armée et des anciens combattants, la République, la Nation et la Résistance à la fois sont incarnés par le général de Gaulle qui inaugure le monument dans son traditionnel uniforme de général deux étoiles. Il est accompagné par Pierre Sudreau rescapé du camps de concentration de Buchenwald et Edmond Michelet rescapé du camps de concentration de Dachau. La Ve République, en passe de devenir plus présidentielle encore, montre aussi sa puissance militaire avec l'apparition d'un Mirage III des usines Dassault. Weiss ne suit pas le général lors de sa visite de la baraque avec ses salles de torture et le four crématoire, et n'ose peut-être pas le travelling de la RTF qui place les spectateurs derrière les barbelés, comme on été filmés les détenus libérés en 1944-1945https://www.ina.fr/video/CAF97504345. Le général finit par redescendre jusqu'à Rothau debout dans la DS décapotable, elle aussi emblème de ce président ancien militaire et VRP de la France industrielle. Quoique l'évènement paraisse très chronométré, il prend aussi la peine de saluer à de nombreuses reprises et de serrer quantité de mains: sa popularité est forte en Alsace. On constate dans le reportage de la RTF que le public photographie amplement l'événement, et le filme même - on peut distinguer cinq cinéastes amateur, dont une femme, parmi lesquels se trouve peut-être Robert-Charles Weiss.Personnages identifiés
Lieux ou monuments
Bibliographie
https://www.dna.fr/actualite/2015/04/25/chefs-d-etat-en-memoire
https://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9morial_national_de_la_d%C3%A9portation
Article rédigé par
Audrey Trottier, 06 janvier 2019
- ↑ En tant que partie d'une production amateur, cette séquence n'a pas reçu de titre de son réalisateur. Le titre affiché sur cette fiche a été librement forgé par son auteur dans le but de refléter au mieux son contenu.