Dans l'armée (0003FH0010) : Différence entre versions

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Si le parachute se développe depuis la fin du XIXe siècle, il n’intègre véritablement les stratégies militaires qu’à partir de la Seconde guerre mondiale, notamment au sein des armées américaines et britanniques. L’armée française ne se met véritablement à l’utiliser qu'après la guerre. Dès la fin des années 1940 et pendant les années 1950, le matériel de parachutisme français est mis au point et connaît plusieurs innovations. Les plans rapprochés sur les camarades de Jean Albert nous offre une opportunité de contempler plus précisément ce matériel. L'entraînement filmé présente des sauts effectués à une altitude d’environs 400 m, qui nécessite des parachutes à ouverture automatique (à la différence des sauts effectués à une altitude de 2500 m qui nécessitent des parachutes à ouverture commandée). Le modèle de parachute dorsal utilisé en 1957 était le TAP 661-12. Utilisé depuis 1953, il avait l’avantage par rapport aux modèles précédents de réduire le choc à l’ouverture. Les parachutistes avaient aussi un parachute ventral de secours qu’ils utilisaient en cas de défaillance du parachute dorsal. Sa voilure était plus petite et se déployait plus rapidement que celle du parachute dorsal. Les voilures pesaient un certain poids (plus de 5 kg pour celle du parachute de secours), auquel s’ajoutait celui des équipements et du matériel que les hommes pouvaient être amenés à porter lors de leur saut (armement, explosifs, radio, rations…). Un système de gaines, que l’on ne distingue pas dans le film, permettait aux parachutistes de sauter avec parfois jusqu’à 35 kg d’équipement. Les largages se font depuis un Nord 2501, ou Noratlas. De conception française, cette avion caractéristique du parachutisme français pouvait contenir jusqu’à 5 tonnes de matériel ou 32 parachutistes.  
 
Si le parachute se développe depuis la fin du XIXe siècle, il n’intègre véritablement les stratégies militaires qu’à partir de la Seconde guerre mondiale, notamment au sein des armées américaines et britanniques. L’armée française ne se met véritablement à l’utiliser qu'après la guerre. Dès la fin des années 1940 et pendant les années 1950, le matériel de parachutisme français est mis au point et connaît plusieurs innovations. Les plans rapprochés sur les camarades de Jean Albert nous offre une opportunité de contempler plus précisément ce matériel. L'entraînement filmé présente des sauts effectués à une altitude d’environs 400 m, qui nécessite des parachutes à ouverture automatique (à la différence des sauts effectués à une altitude de 2500 m qui nécessitent des parachutes à ouverture commandée). Le modèle de parachute dorsal utilisé en 1957 était le TAP 661-12. Utilisé depuis 1953, il avait l’avantage par rapport aux modèles précédents de réduire le choc à l’ouverture. Les parachutistes avaient aussi un parachute ventral de secours qu’ils utilisaient en cas de défaillance du parachute dorsal. Sa voilure était plus petite et se déployait plus rapidement que celle du parachute dorsal. Les voilures pesaient un certain poids (plus de 5 kg pour celle du parachute de secours), auquel s’ajoutait celui des équipements et du matériel que les hommes pouvaient être amenés à porter lors de leur saut (armement, explosifs, radio, rations…). Un système de gaines, que l’on ne distingue pas dans le film, permettait aux parachutistes de sauter avec parfois jusqu’à 35 kg d’équipement. Les largages se font depuis un Nord 2501, ou Noratlas. De conception française, cette avion caractéristique du parachutisme français pouvait contenir jusqu’à 5 tonnes de matériel ou 32 parachutistes.  
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En Algérie, Jean Albert fait parti de la 2e compagnie de livraison par air. Ce film ayant vraisemblablement été tourné que peu de temps avant son départ, il est fort probable qu’il connaisse déjà son unité d’affectation, bien qu’aucun signe ou aucun écusson ne soient visible sur la tenue des hommes filmés, qui sont alors des recrus du contingents en fin de stage, presque près à intégrer leurs unités. Cependant, les entraînements que Jean Albert a filmés intègrent des exercices de largage de matériel, ce qui correspond tout à fait à la mission de la 2e CLA au sein de laquelle il sert quelques semaines voire quelques mois plus tard. C’est en 1947 que la 1ere compagnie du Groupe de Transport 504 devient la 1ere Compagnie de Ravitaillement par air, en reconnaissance de la particularité de cette compagnie de l’armée du Train qui opère par voie aérienne. Basée à Offenburg, les premiers sauts d'entraînements ont lieu à Strasbourg-Entzheim. La nécessité de multiplier ce type de compagnies se fait très vite ressentir, et dès 1948 est créée la 2e Compagnie de Ravitaillement par air. Initialement basée à Hussein-Dey en Algérie, elle est divisée en plusieurs détachement, dont l’un stationné à Telergma où est affecté Jean Albert. Elle devient en 1953 la 2e Compagnie de livraison par air. “Appartenant aux forces permanentes d'Afrique du Nord, la compagnie est chargée du conditionnement, du chargement dans les avions, du largage du matériel et des approvisionnements à acheminer par voie aérienne au profit des forces stationnées en Afrique du Nord”<ref>http://blog-unp.thionville.over-blog.fr/article-unites-de-livraison-par-air-gla-rla-un-peu-d-histoire-41278507.html</ref>. La compagnie est d’autant plus importante que le terrain peut être très accidenté et difficile d’accès dans cet espace et que les infrastructures comme les routes et les chemins de fer n’y sont pas très développées, notamment dans les reliefs algériens où à lieu une véritable guérilla contre les forces françaises. Les largages de matériels et de vivre, comme on peut les observer dans le film, sont donc très importants. Le matériels est largué avec des voilures à usage multiple (VUM), qui sont des voilures à personnel déclassées ou conçues spécialement. Certaines ont un code couleur particulier. On peut observer dans le film le largage de caisse avec des parachutes rouges : ce sont des caisses de munitions. Le matériel largué fait l’objet d’un conditionnement particulier pour éviter qu’il ne s'abîme trop lors de la chute. Les caisses sont sanglées (comme on le voit pour les caisses de munitions dans le film), les objets les plus lourds et les plus volumineux sont chargés sur plateau pour réduire les effets du choc au moment de toucher le sol. C’est ainsi que l’on peut observer dans le film le largage d’un véhicule sur plateau.
 
En Algérie, Jean Albert fait parti de la 2e compagnie de livraison par air. Ce film ayant vraisemblablement été tourné que peu de temps avant son départ, il est fort probable qu’il connaisse déjà son unité d’affectation, bien qu’aucun signe ou aucun écusson ne soient visible sur la tenue des hommes filmés, qui sont alors des recrus du contingents en fin de stage, presque près à intégrer leurs unités. Cependant, les entraînements que Jean Albert a filmés intègrent des exercices de largage de matériel, ce qui correspond tout à fait à la mission de la 2e CLA au sein de laquelle il sert quelques semaines voire quelques mois plus tard. C’est en 1947 que la 1ere compagnie du Groupe de Transport 504 devient la 1ere Compagnie de Ravitaillement par air, en reconnaissance de la particularité de cette compagnie de l’armée du Train qui opère par voie aérienne. Basée à Offenburg, les premiers sauts d'entraînements ont lieu à Strasbourg-Entzheim. La nécessité de multiplier ce type de compagnies se fait très vite ressentir, et dès 1948 est créée la 2e Compagnie de Ravitaillement par air. Initialement basée à Hussein-Dey en Algérie, elle est divisée en plusieurs détachement, dont l’un stationné à Telergma où est affecté Jean Albert. Elle devient en 1953 la 2e Compagnie de livraison par air. “Appartenant aux forces permanentes d'Afrique du Nord, la compagnie est chargée du conditionnement, du chargement dans les avions, du largage du matériel et des approvisionnements à acheminer par voie aérienne au profit des forces stationnées en Afrique du Nord”<ref>http://blog-unp.thionville.over-blog.fr/article-unites-de-livraison-par-air-gla-rla-un-peu-d-histoire-41278507.html</ref>. La compagnie est d’autant plus importante que le terrain peut être très accidenté et difficile d’accès dans cet espace et que les infrastructures comme les routes et les chemins de fer n’y sont pas très développées, notamment dans les reliefs algériens où à lieu une véritable guérilla contre les forces françaises. Les largages de matériels et de vivre, comme on peut les observer dans le film, sont donc très importants. Le matériels est largué avec des voilures à usage multiple (VUM), qui sont des voilures à personnel déclassées ou conçues spécialement. Certaines ont un code couleur particulier. On peut observer dans le film le largage de caisse avec des parachutes rouges : ce sont des caisses de munitions. Le matériel largué fait l’objet d’un conditionnement particulier pour éviter qu’il ne s'abîme trop lors de la chute. Les caisses sont sanglées (comme on le voit pour les caisses de munitions dans le film), les objets les plus lourds et les plus volumineux sont chargés sur plateau pour réduire les effets du choc au moment de toucher le sol. C’est ainsi que l’on peut observer dans le film le largage d’un véhicule sur plateau.
  

Version du 21 mai 2020 à 16:12


Avertissement[1]

Résumé


Ce film 8mm muet et en couleur de Jean Albert présente des vues au sol de phases d’entraînements de parachutistes (largages de personnel et de matériel) ayant eu lieu vers 1957 à Haguenau et à Kehl.

Description


Parachutistes au sol maîtrisant leur parachute pour le replier. Largage de parachutistes. Plan rapproché sur la descente d'un parachutiste. Parachutistes maîtrisant leur parachute pour le replier. Parachutiste repliant la toile de son parachute. Parachutiste qui atterrit. Plan rapproché sur un parachutiste qui ramasse ses affaires. Avions en vol. Parachutistes quittant le terrain d'entrainement. Décollage de deux chasseurs. Descente et atterrissage de matériel. Atterrissage d'un parachutiste au loin. Caisse de matériel au sol près d'un fumigène. Largage de matériel. Caisses de matériel et leur parachute au sol. Balise de position en feu produisant beaucoup de fumée. Largage de matériel. Largage de véhicule. Véhicule à terre.

Métadonnées

N° support :  0003FH0010
Date :  1957
Coloration :  Couleur
Son :  Muet
Durée :  00:04:49
Cinéastes :  Albert, Jean
Format original :  8 mm
Genre :  Film amateur
Thématiques :  Autres guerres : guerre d'Indochine - guerre d'Algérie
Institution d'origine :  MIRA

Contexte et analyse


Dès les premières heures du 1er novembre 1954, l’Algérie est réveillée par des bruits d’explosions qui retentissent à travers tout le pays. Une trentaine d’attentats visant les militaires et la police français, menés par le FLN, sonnent le commencement d’une guerre qui ne dit pas son nom. Le gouvernement français, pour venir en soutien aux soldats de métier, décide rapidement de faire appel au contingent, quelques mois seulement après le début des “opérations de maintien de l’ordre”, qui prennent alors plus ouvertement l’allure d’une guerre. C’est ainsi que Jean Albert est appelé à servir comme sous-lieutenant dans la 2e compagnie de livraison par air basée à Telergma. Durant les mois qui précèdent son départ pour l’Algérie, Jean Albert se prépare aux opérations militaires lors de nombreuses séances d'entraînement au parachutisme. Cinéaste amateur et passionné, il a laissé de nombreuses et précieuses images de l’Algérie durant les années de guerre, mais aussi de divers moments de sa vie. C’est ainsi que, peu avant son départ pour l’Algérie en janvier 1957, il se munie de sa caméra pour filmer diverses séances d'entraînement au parachutisme dont il a rassemblé des extraits dans un film unique. Ce film de Jean Albert nous plonge dans la réalité d’un entraînement militaire, dans sa dimension technique autant que dans sa dimension sociale et humaine.

Une démonstration technique

Parachutistes à l'intérieur d'un Nord 2501 durant la guerre d'Indochine

Le film de Jean Albert présente différents moments de l'entraînement des parachutistes, alternance d’images de largages et d’images du sol. Ces scènes nous permettent d’appréhender toute la technique nécessaire au parachutisme militaire. Le film donne principalement à voir une succession de largages, réalisés lors de différents entraînements, certainement sur plusieurs jours. Le premier filmé est celui de jeunes parachutistes largués depuis un Nord 2501 en “charrette”, c’est-à-dire que l’ensemble des parachutistes présents dans l’avion (au maximum 32) sautent tous ensemble en un seul passage. Ses hommes sont les camarades de Jean Albert, qui doit lui certainement se trouver au sol, derrière la caméra. Il fait très probablement parti des premiers à avoir sauter, comme le laissent supposer les premiers plans de son film, où l’on voit ses camarades replier leur parachute, sans pour autant avoir vu leur saut. Les parachutistes doivent d’abord maîtriser leur parachute pour que la voilure ne soit plus en prise avec le vent et se couche sur le sol. Ils procèdent ensuite à un pliage sommaire, il n’est que provisoire. Les parachutes sont ensuite envoyés dans des ateliers de reconditionnements, où ils sont pliés convenablement, en sorte qu’ils soient à nouveau utilisables.

Nord 2501 en vol
Parachutiste équipé d'un paquetage supplémentaire

Si le parachute se développe depuis la fin du XIXe siècle, il n’intègre véritablement les stratégies militaires qu’à partir de la Seconde guerre mondiale, notamment au sein des armées américaines et britanniques. L’armée française ne se met véritablement à l’utiliser qu'après la guerre. Dès la fin des années 1940 et pendant les années 1950, le matériel de parachutisme français est mis au point et connaît plusieurs innovations. Les plans rapprochés sur les camarades de Jean Albert nous offre une opportunité de contempler plus précisément ce matériel. L'entraînement filmé présente des sauts effectués à une altitude d’environs 400 m, qui nécessite des parachutes à ouverture automatique (à la différence des sauts effectués à une altitude de 2500 m qui nécessitent des parachutes à ouverture commandée). Le modèle de parachute dorsal utilisé en 1957 était le TAP 661-12. Utilisé depuis 1953, il avait l’avantage par rapport aux modèles précédents de réduire le choc à l’ouverture. Les parachutistes avaient aussi un parachute ventral de secours qu’ils utilisaient en cas de défaillance du parachute dorsal. Sa voilure était plus petite et se déployait plus rapidement que celle du parachute dorsal. Les voilures pesaient un certain poids (plus de 5 kg pour celle du parachute de secours), auquel s’ajoutait celui des équipements et du matériel que les hommes pouvaient être amenés à porter lors de leur saut (armement, explosifs, radio, rations…). Un système de gaines, que l’on ne distingue pas dans le film, permettait aux parachutistes de sauter avec parfois jusqu’à 35 kg d’équipement. Les largages se font depuis un Nord 2501, ou Noratlas. De conception française, cette avion caractéristique du parachutisme français pouvait contenir jusqu’à 5 tonnes de matériel ou 32 parachutistes.


Insigne de la 2e Compagnie de Livraison par Air
Véhicule sur plateau chargé dans un Nord 2501

En Algérie, Jean Albert fait parti de la 2e compagnie de livraison par air. Ce film ayant vraisemblablement été tourné que peu de temps avant son départ, il est fort probable qu’il connaisse déjà son unité d’affectation, bien qu’aucun signe ou aucun écusson ne soient visible sur la tenue des hommes filmés, qui sont alors des recrus du contingents en fin de stage, presque près à intégrer leurs unités. Cependant, les entraînements que Jean Albert a filmés intègrent des exercices de largage de matériel, ce qui correspond tout à fait à la mission de la 2e CLA au sein de laquelle il sert quelques semaines voire quelques mois plus tard. C’est en 1947 que la 1ere compagnie du Groupe de Transport 504 devient la 1ere Compagnie de Ravitaillement par air, en reconnaissance de la particularité de cette compagnie de l’armée du Train qui opère par voie aérienne. Basée à Offenburg, les premiers sauts d'entraînements ont lieu à Strasbourg-Entzheim. La nécessité de multiplier ce type de compagnies se fait très vite ressentir, et dès 1948 est créée la 2e Compagnie de Ravitaillement par air. Initialement basée à Hussein-Dey en Algérie, elle est divisée en plusieurs détachement, dont l’un stationné à Telergma où est affecté Jean Albert. Elle devient en 1953 la 2e Compagnie de livraison par air. “Appartenant aux forces permanentes d'Afrique du Nord, la compagnie est chargée du conditionnement, du chargement dans les avions, du largage du matériel et des approvisionnements à acheminer par voie aérienne au profit des forces stationnées en Afrique du Nord”[2]. La compagnie est d’autant plus importante que le terrain peut être très accidenté et difficile d’accès dans cet espace et que les infrastructures comme les routes et les chemins de fer n’y sont pas très développées, notamment dans les reliefs algériens où à lieu une véritable guérilla contre les forces françaises. Les largages de matériels et de vivre, comme on peut les observer dans le film, sont donc très importants. Le matériels est largué avec des voilures à usage multiple (VUM), qui sont des voilures à personnel déclassées ou conçues spécialement. Certaines ont un code couleur particulier. On peut observer dans le film le largage de caisse avec des parachutes rouges : ce sont des caisses de munitions. Le matériel largué fait l’objet d’un conditionnement particulier pour éviter qu’il ne s'abîme trop lors de la chute. Les caisses sont sanglées (comme on le voit pour les caisses de munitions dans le film), les objets les plus lourds et les plus volumineux sont chargés sur plateau pour réduire les effets du choc au moment de toucher le sol. C’est ainsi que l’on peut observer dans le film le largage d’un véhicule sur plateau.

Le travaille du cinéaste amateur

La diversité et l’hétérogénéité des scènes filmées par Jean Albert laissent de fait penser que le film présente des extraits de diverses séances d'entraînements. Jacques Poswiat, moniteur-para entre 1969 et 1971 puis ayant servi à l’Antenne de la Base Opérationnelle Mobile Aéroportée, estime de fait que les séquences rassemblées par Jean Albert “n’ont pratiquement aucune liaison entre elles”[3]. Selon lui, ses prises de vue n’ont pas d’intérêt particulier si ce n’est la volonté de conserver un “souvenir” d’une “belle journée aéronautique”. Ce film est le résultat du travail d’un passionné, souhaitant conserver les souvenirs de sa vie de parachutiste mais aussi, et c’est peut-être une des raisons principales, souhaitant présenter sa vie de parachutiste, qui sort de l’ordinaire, à sa famille et à ses amis. Jean Albert était assurément un cinéaste amateur passionné. Né le 7 novembre 1935, il n’a alors que 26, peut-être 27 ans quand il prend sa caméra 8mm pour filmer son entraînement au parachutisme, caméra qu’il ne possède que depuis peu de temps. Le film est donc l’œuvre d’un débutant dont les images trahissent le manque expérience. Ses prises de vues sont parfois mal cadrées, ses bougés panoramiques sont hésitants, souvent tremblants et il y a quelques ratés, autant dans les prises de vue que dans le montage. Le plan d’un avion en vol apparaît ainsi pendant une fraction de seconde avant de laisser place à la scène suivante.

Jean Albert a coupé des scènes, en a rassemblé d’autres pour ne laisser dans ce film que les plans qu’il a jugé pertinents et intéressants en s’appuyant visiblement surtout sur des critères esthétiques. Certaines images donnent l’impression que le jeune Jean Albert s’est amusé avec sa caméra durant ses entraînements, choisissant des angles particuliers pour des prises de vue originales. Il filme ainsi l’un de ses camarades au sol à travers l’ouverture au cœur de son parachute encore gonflé par le vent, ou encore deux autres parachutistes, s’en allant du terrain de manœuvre, en plaçant la caméra près du sol. Jean Albert devait assurément être un passionné de cinéma, s'inspirant de scènes qu’il a pu voir pour en expérimenter certaines avec sa propre caméra. Il semble également apprécier filmer des éléments surprenants, qui sorte quelque peu de l’ordinaire, comme les chasseurs qui décollent (qui donnent lieu à la réalisation d’un bougé panoramique de droite à gauche peu commun) ou la balise fumigène en train de se consumer (donnant lieu à un plan fixe de plusieurs secondes).

Au cœur de l'entraînement

Quoi qu’il en soit, le film de Jean Albert nous permet d’entrer dans l’intimité d’un entraînement de parachutistes. Constatons tout d’abord qu’il n’y a que des hommes présent sur ces images. Les premières femmes ne sont autorisées qu’en 1965 a postuler pour le stage du brevet de parachutiste. Les futurs parachutistes étaient en fait recrutés parmi les appelés du contingent. Jacques Poswiat nous explique dans quelles conditions certains hommes étaient amenés a intégrer les troupes aéroportées : “ A l'époque, le Service Militaire était en vigueur. Cela signifie que les jeunes futurs appelés du contingent effectuaient avant leur incorporation une période de 3 jours au centre de recrutement le plus proche de leur domicile. Au cours de celle-ci, le futur « bidasse » passait une visite médicale d'aptitude au Service Armé, des tests de sélection pour connaître leurs compétences en vue de leur affectation future dans une Arme (Infanterie, Artillerie, Génie, Cavalerie, Aviation, Marine, etc… ), ainsi que leurs capacités, connaissances... en vue d'un emploi particulier au sein de celle-ci (radio, secrétaire, mécano, boulanger, serveur etc...). S'agissant d'une future incorporation dans les Troupes Aéroportées, deux critères principaux influençaient le Responsable de la sélection : l'aspect physique (taille, poids, corpulence, vision, audition… ) et aussi et surtout le volontariat à servir dans les T.A.P”. Jacques Poswiat, qui a lui même participer à la formation de paras dans les années 1970, sait tout de même qu’il arrivait que l’armée passe outre la question du volontariat pour incorporer des hommes aux forces aéroportées lorsque les effectifs manquaient. La bonne forme physique était cependant la condition principale pour être incorporé en tant que parachutiste. Le saut en parachute demande en effet certaines aptitudes physiques, notamment au moment de l’atterrissage caractéristique des parachutistes, le “roulé-boulé” (que l’on peut voir dans le film), qui permet d’amortir au mieux le choc lors du contact avec le sol et de diminuer ainsi le risque de blessure.

Les images de Jean Albert semble témoigner d’une relative bonne entente et d’une bonne humeur au sein du groupe de parachutistes participant à l'entraînement. Le plan rapproché sur l’un de ses camarades nous laisse percevoir un homme souriant, qui semble s’amuser de la présence de la caméra, adressant quelques mots, sans que l’on ne sache ce qu’ils étaient, ni à qui ils étaient adressés : parlait-il à la caméra ou à celui qui la tenait ? En tout cas, il semble régner une bonne ambiance et on lit dans les comportements des hommes filmés une certaine camaraderie. A ce sujet, Jacques Poswiat aime à rappeler que de par la nature du service militaire, des jeunes hommes de tous horizons sociaux se côtoyaient. Qu’ils aient été “ouvriers, étudiants, fils à papa, clodos, tous étaient égaux devant l'effort. [...] Il régnait un esprit de la « gagne » et nous, les gradés de la Section, du caporal au sergent, du chef de section au capitaine commandant de la compagnie d'instruction, on les tirait, on les poussait pour qu'ils soient meilleurs que ceux de la section d'à côté…”. Les appelés étaient quotidiennement ensemble et ils devaient faire face aux mêmes épreuves, ce qui ne pouvait que favoriser une cohésion au sein du groupe que les images de Jean Albert laissent transparaître.

Les entraînements comme celui-ci n’étaient pas rares : il faut garder la forme et parfaire la technique. Comme le précise Jacques Poswiat, les jeunes hommes ont, avant d’effectuer leur premier saut, suivi des cours théoriques et des entraînements au sol. Sur les images de Jean Albert, les parachutistes semblent avoir une certaine aisance, peut-être même une certaine assurance dans leur saut, qui laisserait penser que leur formation touche à sa fin. Le fait que Jean Albert est emmené sa caméra indique peut-être qu’il s’agit de l’un de leur derniers entraînements avant le départ pour l’Algérie, qui ne survient que quelques semaines, peut-être mois pour certains d’entre eux, ou en tout cas que la confiance et la sérénité ait été assez grande pour prendre le temps de filmer. Mais tout cela ne saurait cacher la pression et l’anxiété qui existe avant un saut en parachute. Encore une fois, le témoignage de Jacques Poswiat nous donne - non sans une pointe d’humour - une petite idée de ce qu’on pu ressentir les hommes que l’on voit sur les images avant leur saut : “Le stress ? Bien sûr. [...] Trouvez-vous normal, quand on est si bien sur le « Plancher des Vaches », de monter à 400 mètres dans un avion qui fait un bruit épouvantable avec ses portes ouvertes, pour en sauter afin d'y revenir pour renifler les pâquerettes ?”.

Lieux ou monuments


Kehl; Haguenau



  1. Cette fiche est en cours de rédaction. À ce titre elle peut être inachevée et contenir des erreurs.
  2. http://blog-unp.thionville.over-blog.fr/article-unites-de-livraison-par-air-gla-rla-un-peu-d-histoire-41278507.html
  3. L'ensemble des citations attribuées à Jacques Poswiat sont tirées d'un échange de courriers électroniques entre l'auteur de la fiche et Jacques Poswiat entre le 3 et le 26 mars 2020