Carnaval de Strasbourg (0119FH0012) : Différence entre versions

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Par le fait de se déguiser, il y a de plus une volonté de s’amuser avec les codes de la société, être quelqu’un que l’on n’est pas habituellement mais aussi s’amuser au sens large du terme. On peut le voir à travers les dernières images. La bonne humeur est alors présente lorsqu’un adulte décida de lancer des confettis à un enfant ou encore qu’une dame, vêtue d’un manteau à carreaux, décida de les lancer au caméraman. Cette dame n’est autre que la femme du cameraman, Mathilde Klein. Elle est alors entourée de sa propre sœur Emmy Maridet, son beau-frère Louis Maridet et leur neveu, le jeune Francis Maridet<ref>Entretien numérique avec la belle-fille de René Klein datant du 13 mars 2020. Cette dernière a souhaité rester anonyme.</ref>. On assiste alors à un moment particulier d’amusements entre un père et son fils. L’extrait s’achève par conséquent sur ces images familiales, entre adultes et enfant, mais aussi entre adultes qui sont donc des proches du cameraman. Leur familiarité peut être également perçue par les sourires adressés à ce dernier mais aussi aux confettis envoyés en sa direction. Cela rappelle donc l’idée que ce document est plus une archive personnelle qu’une archive à but commercial ou un reportage réalisé par la télévision par exemple.  
 
Par le fait de se déguiser, il y a de plus une volonté de s’amuser avec les codes de la société, être quelqu’un que l’on n’est pas habituellement mais aussi s’amuser au sens large du terme. On peut le voir à travers les dernières images. La bonne humeur est alors présente lorsqu’un adulte décida de lancer des confettis à un enfant ou encore qu’une dame, vêtue d’un manteau à carreaux, décida de les lancer au caméraman. Cette dame n’est autre que la femme du cameraman, Mathilde Klein. Elle est alors entourée de sa propre sœur Emmy Maridet, son beau-frère Louis Maridet et leur neveu, le jeune Francis Maridet<ref>Entretien numérique avec la belle-fille de René Klein datant du 13 mars 2020. Cette dernière a souhaité rester anonyme.</ref>. On assiste alors à un moment particulier d’amusements entre un père et son fils. L’extrait s’achève par conséquent sur ces images familiales, entre adultes et enfant, mais aussi entre adultes qui sont donc des proches du cameraman. Leur familiarité peut être également perçue par les sourires adressés à ce dernier mais aussi aux confettis envoyés en sa direction. Cela rappelle donc l’idée que ce document est plus une archive personnelle qu’une archive à but commercial ou un reportage réalisé par la télévision par exemple.  
  
Il faut noter ainsi que le cameraman est un certain René Klein. Il fut cameraman amateur de nombreux films et notamment d’un autre document disponible sur le site de la Cinémathèque du Rhin supérieur : un film consacré au dernier tramway de Strasbourg en mai 1960<ref>https://rhinedits.u-strasbg.fr/w/index.php/Bas:Dernier_tram_de_Strasbourg_(0119FH0012)</ref>. Pour ses images filmées lors du Carnaval, il semble que le caméraman amateur a décidé de placer sa caméra dans le centre-ville de Strasbourg, plus précisément sur la place Saint-Pierre-le-Vieux dont les premières images sont placées en direction du Pont Kuss. De par la foule et pour permettre une vue d’ensemble de la cavalcade, on peut supposer qu’il se plaça sur les marches de l’église pour prendre un peu de hauteur.  
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Il faut noter ainsi que le cameraman est un certain René Klein. Il fut réalisateur amateur de nombreux films et notamment d’un autre document disponible sur le site de la Cinémathèque du Rhin supérieur : un film consacré au dernier tramway de Strasbourg en mai 1960<ref>https://rhinedits.u-strasbg.fr/w/index.php/Bas:Dernier_tram_de_Strasbourg_(0119FH0012)</ref>. Pour ses images filmées lors du Carnaval, il semble que le caméraman amateur a décidé de placer sa caméra dans le centre-ville de Strasbourg, plus précisément sur la place Saint-Pierre-le-Vieux dont les premières images sont placées en direction du Pont Kuss. De par la foule et pour permettre une vue d’ensemble de la cavalcade, on peut supposer qu’il se plaça sur les marches de l’église pour prendre un peu de hauteur.  
  
 
En conclusion, cet événement peut être vu alors comme un moment hors du temps, propice à l’amusement, un moment que permet donc le carnaval par ces déguisements ou encore ces chars évoquant ainsi l’imaginaire. Néanmoins, la réalité reste implicitement présente par des distorsions, par le biais de figures historiques caricaturées comme c’est le cas avec le général De Gaulle par exemple ou des allusions au contexte contemporain entourant l’année 1960.
 
En conclusion, cet événement peut être vu alors comme un moment hors du temps, propice à l’amusement, un moment que permet donc le carnaval par ces déguisements ou encore ces chars évoquant ainsi l’imaginaire. Néanmoins, la réalité reste implicitement présente par des distorsions, par le biais de figures historiques caricaturées comme c’est le cas avec le général De Gaulle par exemple ou des allusions au contexte contemporain entourant l’année 1960.

Version du 19 mars 2020 à 15:27


Avertissement[1]

Résumé


D’une durée de plus de sept minutes, ce film muet et en couleurs est un montage de différents moments capturés lors du Carnaval de la ville de Strasbourg durant la journée du 28 février 1960. On y voit différents chars, des scènes de vies urbaines mais aussi des moments plus personnels, mettant en scène la famille par exemple.

Métadonnées

N° support :  0119FH0012
Date :  1960
Coloration :  Couleur
Son :  Muet
Durée :  00:07:00
Cinéastes :  Klein, René
Format original :  8 mm
Genre :  Film amateur
Thématiques :  Carnaval
Institution d'origine :  MIRA

Contexte et analyse


Le carnaval est un événement qui englobe de nombreux acteurs, du particulier aux institutions comme par exemple la ville de Strasbourg mais aussi ses différents acteurs économiques. On peut le voir de ce fait à travers ce film. Tout d’abord, on put remarquer ces acteurs économiques à travers leurs participations au défilé et notamment par leur présence sur les chars. Ces derniers étaient en effet porteurs de slogans publicitaires et notamment de slogans rappelant l’économie locale. Par exemple, on retrouva un char Kronenbourg ou encore un char Ancre Pils. Les deux noms évoquent donc des noms de bières alsaciennes dont la brasserie, nommée aussi la brasserie de l’Espérance, se trouvant même près de Strasbourg, à Schiltigheim. La bière alsacienne est aussi présente quand deux personnes déguisées en verres à bières défilèrent, verres associés aux bières « Pêcheur », nom associé à la brasserie Fischer, autre brasserie schilikoise. Les références à la région alsacienne furent aussi présentes lors d’un défilé de quatre grands personnages représentant des chefs cuisiniers apportant plats et desserts et dont un apporta un kougelhopf, une brioche aux raisins considérée comme une spécialité alsacienne. En outre, on devine également que les images ont été filmées dans l’Est de la France lorsque par-dessus le défilé se distingue le sigle SADAL sur un bâtiment, indiquant probablement une antenne de la Société d’Alimentation d’Alsace et de Lorraine.

Le carnaval étant un moment de fête où souvent il est demandé de se déguiser et de jouer un rôle qui peut être éloigné de la personne que l’on est réellement dans la société de tous les jours, on remarque qu’en-dehors du défilé, certaines personnes étaient également déguisées. On le voit à travers certaines personnes filmées à leurs balcons par le cinéaste mais aussi dans la rue avec un homme déguisé, affublé d’un faux nez et d’un petit chapeau, un enfant, mais aussi vers la fin de la vidéo quand le cinéaste se concentre plus sur le plan d’une famille, d’un couple et d’un enfant et où l’homme porte lui aussi un faux nez. Dans la rue, on peut remarquer des décorations à travers de sortes de guirlandes. En outre, dans les cheveux de certaines personnes, on peut distinguer des confettis. Aux passages de certains chars, des confettis ont en effet été lancés dans la foule urbaine. Les confettis rappellent donc également l’imaginaire de la fête et dans ce contexte plus précisément l’imaginaire autour des carnavals.

Le carnaval de Strasbourg de 1960 est également une sorte de miroir à des références contemporaines de l’événement. On peut le voir ainsi avec un char présentant le général Charles de Gaulle, alors président de la France depuis au moins un an au moment du carnaval, dont la tête repose sur une reproduction à échelle réduite de la Tour Eiffel. Ce char est même suivi dans le film par un autre où se trouve des astronautes tournant autour d’un globe, pouvant soit évoquer la planète Terre soit aussi Spoutnik 1, le premier satellite artificiel envoyé dans l’espace en 1957 soit trois ans avant le carnaval. Un des astronautes semble être américain, l’autre soviétique. On peut également noter qu’auparavant, au cours des années 1950, l’URSS (l'Union des Républiques Socialistes Soviétiques) envoya également dans l’espace Laïka, une chienne, considérée comme le premier être vivant en orbite autour de la Terre. Un an après le carnaval, le 12 avril 1961, c’est un homme, également envoyé par l’URSS, Youri Gagarine, qui devient le premier être humain à effectuer un vol dans l’espace. Le char peut alors rappeler la course à l’espace qui opposa donc les États-Unis et l’URSS. Toutefois, en outre de ces allusions réelles à l’actualité, l’imaginaire est présent quand on note la présence sur des chars de monstres violets et verts. Il s’agit peut-être d’une tentative de représentation d’extraterrestres. On note aussi encore de ce qui peut être perçu comme Dieu dans la religion chrétienne avec une reproduction d’un vieil homme, une barbe et tunique blanche, assis sur une sorte de globe déjà évoquée plus haut.

De plus, des figures de danseuses sont accompagnées de figures d’hommes d’un certain âge, portant des hauts de formes dont l’un d’eux en porte un à l’effigie de l’Union Jack. On peut supposer que celui-ci doit être Britannique. La présence de cet homme britannique peut faire penser aussi que le premier ministre de la Grande-Bretagne d’alors, Harold Macmillan, avait prononcé un discours nommé plus tard ‘Wind of change’ (‘vent du changement’ en français) quelques temps avant la tenue du carnaval, au début du mois février 1960. Ce discours eut une importance car il marquait une forme d’accord pour la décolonisation de la Grande-Bretagne envers ses colonies africaines. Pourtant, les références coloniales pouvaient peut-être être aperçues au cours de ce carnaval avec la présence et le passage d’hommes noirs (à 1.44 de l’extrait) car la France possédait encore en 1960 des colonies notamment l’Algérie française (alors en conflit avec celle-ci). Ce fut également en 1960 et donc la même année que le carnaval que quatorze colonies du continent africain devinrent indépendantes. Par exemple, la république de la Côte d’Ivoire et la république du Dahomey (aujourd’hui le Bénin) proclamèrent leurs indépendances en août 1960. Bien que jours de fêtes, le carnaval et son défilé le 28 février évoquèrent néanmoins donc implicitement les actualités de l’époque.

Il est important de noter également que le carnaval s’inscrit dans une histoire particulière. En effet, le carnaval est un événement populaire lié au folklore et aux traditions anciennes malgré la modernité des chars et des images véhiculées par le défilé de 1960. Tradition du carnaval et donc participant au folklore, une reine de carnaval a été élue et défila sur un char au début de la cinquième minute du document. Celle-ci salua la foule, accompagnée de deux dauphines assises un peu plus en-dessous.

Néanmoins, comme l’a indiqué dans une autre fiche Valentine Vis, le carnaval de Strasbourg a eu une histoire mouvementée[2]. Le carnaval avait en effet disparu pendant un long moment durant l’occupation allemande mais également auparavant, lorsque l’Alsace faisait alors parti du Reich allemand depuis l’annexion à la fin de la guerre franco-prussienne en 1870. Ce n’est qu’à la fin des années 1956 que deux figures vont vouloir relancer le carnaval à Strasbourg : Raymond Vogel et Germain Muller. Pour plus d’informations concernant la tentative de relancer le carnaval par les deux hommes, on pourra se tourner donc vers la fiche réalisée par Valentine Vis.

Autre imagerie évoquée par un des chars, on peut mentionner un char où des figures de fausses danseuses de cabarets ont été représentées avec un homme au centre, portant une marinière et un béret (à 2.44 de l’extrait). Cela peut évoquer les stéréotypes du français portant ce genre de vêtements mais aussi l’association des cabarets à la France. En effet, les cabarets ou encore aussi appelés les cafés concerts devinrent populaires au XIXe siècle et notamment à Paris avec des institutions comme les Folies Bergère ou encore le Moulin Rouge. A Strasbourg, on peut par exemple penser au Barabli, cabaret bilingue crée par Germain Muller et Raymond Vogel. Ces derniers sont même, comme on l’a indiqué plus haut, derrière le renouveau du carnaval de Strasbourg. Ceci n’est donc peut-être pas un hasard de retrouver des références à leur encontre lors du défilé.

La foule étant présente et jouant un rôle important de par son assistance et sa présence à la parade, il s’agit donc bien d’un événement populaire. Par le fait de se déguiser, il y a de plus une volonté de s’amuser avec les codes de la société, être quelqu’un que l’on n’est pas habituellement mais aussi s’amuser au sens large du terme. On peut le voir à travers les dernières images. La bonne humeur est alors présente lorsqu’un adulte décida de lancer des confettis à un enfant ou encore qu’une dame, vêtue d’un manteau à carreaux, décida de les lancer au caméraman. Cette dame n’est autre que la femme du cameraman, Mathilde Klein. Elle est alors entourée de sa propre sœur Emmy Maridet, son beau-frère Louis Maridet et leur neveu, le jeune Francis Maridet[3]. On assiste alors à un moment particulier d’amusements entre un père et son fils. L’extrait s’achève par conséquent sur ces images familiales, entre adultes et enfant, mais aussi entre adultes qui sont donc des proches du cameraman. Leur familiarité peut être également perçue par les sourires adressés à ce dernier mais aussi aux confettis envoyés en sa direction. Cela rappelle donc l’idée que ce document est plus une archive personnelle qu’une archive à but commercial ou un reportage réalisé par la télévision par exemple.

Il faut noter ainsi que le cameraman est un certain René Klein. Il fut réalisateur amateur de nombreux films et notamment d’un autre document disponible sur le site de la Cinémathèque du Rhin supérieur : un film consacré au dernier tramway de Strasbourg en mai 1960[4]. Pour ses images filmées lors du Carnaval, il semble que le caméraman amateur a décidé de placer sa caméra dans le centre-ville de Strasbourg, plus précisément sur la place Saint-Pierre-le-Vieux dont les premières images sont placées en direction du Pont Kuss. De par la foule et pour permettre une vue d’ensemble de la cavalcade, on peut supposer qu’il se plaça sur les marches de l’église pour prendre un peu de hauteur.

En conclusion, cet événement peut être vu alors comme un moment hors du temps, propice à l’amusement, un moment que permet donc le carnaval par ces déguisements ou encore ces chars évoquant ainsi l’imaginaire. Néanmoins, la réalité reste implicitement présente par des distorsions, par le biais de figures historiques caricaturées comme c’est le cas avec le général De Gaulle par exemple ou des allusions au contexte contemporain entourant l’année 1960.

Lieux ou monuments


Strasbourg; Place Saint-Pierre-le-Vieux; Pont Kuss

Bibliographie


Ressources

CERF, Eve, « Carnavals en Alsace : tradition, évolution, manipulation », Revue des Sciences Sociales de la France et de l'Est, 7, 1978, p.24-37.

VIS, Valentine, fiche « Le carnaval de Strasbourg de 1960 » : https://rhinedits.u-strasbg.fr/w/index.php/Carnaval_de_Strasbourg_(0020FH0012)

Entretien réalisée sous formes de courriels avec la belle-fille de René KLEIN au cours du mois de mars 2020. Cette dernière a souhaité rester anonyme.


Article rédigé par

Mathilde Vettard, 19 mars 2020


  1. Cette fiche est en cours de rédaction. À ce titre elle peut être inachevée et contenir des erreurs.
  2. https://rhinedits.u-strasbg.fr/w/index.php/Carnaval_de_Strasbourg_(0020FH0012)
  3. Entretien numérique avec la belle-fille de René Klein datant du 13 mars 2020. Cette dernière a souhaité rester anonyme.
  4. https://rhinedits.u-strasbg.fr/w/index.php/Bas:Dernier_tram_de_Strasbourg_(0119FH0012)