Centre de ravitaillement en Lorraine (0021FN0002) : Différence entre versions

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/ deux soldats discutent
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/ un soldat pose, cigarette en bouche
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/ quatre soldat dont l’un pipe en bouche, sortent des pains d’une camionnette puis se les passent de
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main en main
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/ des soldats descendent d’un bus en mauvais état (N°W721409 peint sur la carrosserie)
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/ un homme en béret fumant la pipe tire la langue à l’opérateur
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/ trois soldats posent devant le bus, l’un portant un autre sur ses épaules
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/ un soldat riant
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|Contexte_et_analyse_fr=Les années précédant la Seconde Guerre mondiale répètent d’une certaine manière celles menant à l’embrasement du premier conflit mondial. Malgré l’action de la Société des Nations fondée en 1920, l’Allemagne nazie noue des partenariats stratégiques avec ses alliés italien et japonais en 1936, procède à l’annexion des Sudètes et de l’Autriche en 1938, et fait pression sur la Slovaquie et la Hongrie pour qu’elles se rangent du côté de l’Axe. De leurs côtés, les anciens vainqueurs de 1918 restent noués par des pactes d’assistance étendus aux nouvelles nations nées au lendemain de la guerre, comme la Pologne. Alors que les pourparlers patinent entre l’URSS officiellement leader du camp antifascistes et les deux dernières grandes puissances démocratiques du continent, le pacte germano-soviétique est signé à Moscou le 23 août 1939. Son protocole secret partageant des zones d’influence en Europe orientale est le prélude à l’invasion allemande de la Pologne le 1er septembre et à la déclaration de guerre des Français et des Britanniques deux jours plus tard.
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Ces deux nations, entravées par leur stratégie défensive, restent plongées dans l’illusion d’un possible règlement diplomatique, qui empêche toute initiative. Commence alors une période tôt qualifiée de « drôle de guerre », au cours de laquelle cinq millions de mobilisés perdent leur temps et leur moral dans une attente vaine. Pendant que la Wehrmacht s’active à l’Est, elle reste sur ses positions à l’Ouest et laisse passer l’hiver. L’état-major rompt cette trêve tacite le 10 mai et conquiert en quelques semaines la Belgique, les Pays-Bas et une partie de la France. L’Alsace se retrouve à nouveau annexée au Reich, ce qui place les anciens mobilisés de l’armée française, comme Émile Breesé ou Alex Schwobthaler, dans une situation très délicate.
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'''Une armée à nourrir'''
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[[Fichier:Screenshot 2019-03-07 Le Char rieur (4 P RES 246) - Mnesys.png|vignette|''Le Char...rieur'', journal de tranchée © La Contemporaine]]
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Comme s’il était en reportage dans les unités de mobilisés, Émile Breesé ne manque aucune occasion de mettre en marche sa caméra. Dans la routine qui s’est installée et l’inégalité des conditions de cantonnement si variables d’un lieu à un autre, celle d’une vie en plein air forcée rendue délicate par un hiver froid et humide, l’alimentation cristallise l’attention des soldats. Les prix ont bondi de 17% en moyenne avec la déclaration de guerre, et même de 30% localement pour certains produits très demandés par la troupe. Si l’alcool ne paraît pas présent, interdit en théorie, il abonde en réalité car il est très facile de s’approvisionner dans les villages. Devant les ravages de l’alcoolisme, Paul Reynaud tente en mars 1940 une timide régulation limitant à trois jours la vente – une mesure ridicule et tout de suite bafouée. Le cinéaste de 37 ans filme l’arrivée d’un bœuf entier qui va être aussitôt dépecé (film) et la livraison par camionnette des miches de pain constituant l’ordinaire de tous les repas. L’arrivée de la nourriture rythme des journées vides d’action et pleine d’ennui. La livraison des aliments se fait dans les gares, chaque unité se chargeant de les acheminer jusqu’aux « cuistots » qui vont préparer les repas et les amener aux soldats grâce à leur cantine mobile appelée « roulante ». Dans le film Centre de ravitaillement en Lorraine, elle réunit les soldats autour d’un café et de quelques miches de pain accompagnées de camembert. Les images de Breesé donnent le sentiment que rien n’a changé ou presque depuis 14-18.
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'''Une camaraderie bon enfant'''
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Contrairement aux appareils photo qui sont légion, une caméra se remarque immédiatement et Breesé a tôt fait d’avoir été identifié comme cinéaste amateur, sans doute le seul de l’unité et même de tout le coin. Bien des soldats croisés lancent un regard indifférent, souvent clope au bec, à cet importun. Mais d’autres réagissent comme des enfants et jouent à faire l’acteur, certains sur demande de l’opérateur sans doute ; un sourire ou même une langue tirée soulignent l’acceptation simple d’un geste qui, contrairement à celui du photographe, ne produit pas de satisfaction de la curiosité à brève échéance, ne peut s’acheter ou s’échanger pour être envoyé aux familles avides de nouvelles. Le ballet du transvasement des miches de pain est ainsi totalement perturbé par les poses face caméra et les clins d’œil. De toute façon, chacun prend son temps, avec une lenteur qui ressemble à un ralenti, car vraiment rien ne presse. Trois gaillards s’amusent à faire une figure de pseudo-gymnastique qui raille avec efficacité la situation burlesque de ces soldats condamnés à l’inactivité. Les rires et les mimiques cachent un profond désarroi qu’amplifient les rumeurs et que ne compensent pas les maigres plaisirs culturels ou sportifs (football film) accordés par l’état-major. La carence de ravitaillement, de discipline et d’esprit combatif, produit des inconséquences de l’état major et des hésitations des responsables politiques, ont contribué à l’effondrement rapide de mai 1940.
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|Contexte_et_analyse_de='''<big>Verpflegungszentrum in Lothringen</big>'''
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Die Jahre vor dem Zweiten Weltkrieg wiederholten auf gewisse Weise die Jahre, die zum Ausbruch des Ersten Weltkriegs geführt hatten. Trotz des Vorgehens des 1920 gegründeten Völkerbunds knüpfte Nazi-Deutschland 1936 strategische Partnerschaften mit seinen italienischen und japanischen Verbündeten, annektierte 1938 das Sudetenland und Österreich und übte Druck auf die Slowakei und Ungarn aus, damit sie sich auf die Seite der Achsenmächte stellten. Die ehemaligen Sieger von 1918 waren ihrerseits durch Beistandspakte gebunden, die auf nach dem Krieg geborene Nationen wie Polen ausgedehnt worden waren. Während die Verhandlungen zwischen der UdSSR, offizieller Anführer des antifaschistischen Lagers und den letzten beiden großen demokratischen Mächten des Kontinents ins Stocken gekommen waren, wurde am 23. August 1939 in Moskau der deutsch-sowjetischer Nichtangriffspakt unterzeichnet. Sein geheimes Protokoll, das die Einflusszonen in Osteuropa aufteilte, war das Vorspiel zum Überfall Deutschlands auf Polen am 1. September und zur Kriegserklärung Frankreichs und Großbritanniens zwei Tage später.
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Diese beiden Länder, die durch ihre defensive Strategie gefesselt waren, verharrten in der Illusion einer möglichen diplomatischen Regelung, die jegliche Initiative verhinderte. Anschließend begann eine Zeit, die bald als „Sitzkrieg“ bezeichnet wurde. Fünf Millionen mobilgemachte Soldaten verloren in einem vergeblichen Warten ihre Zeit und ihre Motivierung. Während sich die Wehrmacht im Osten zu schaffen machte, blieb sie im Westen auf ihren Positionen und ließ den Winter vorüberziehen, während sie nur eine winzige Offensive im Saarland startete. Einige Dörfer wie Lauterbach wurden eingenommen, aber die Armee machte Bekanntschaft mit den Antipersonenminen, die eine sehr kostensparende Verteidigung strukturierten. Der deutsche Generalstab brach die Waffenruhe am 10. Mai 1940 und eroberte in nur wenigen Wochen Belgien, die Niederlande und einen Teil Frankreichs.  Das Elsass wurde erneut vom deutschen Reich annektiert, womit die ehemaligen Soldaten der französischen Armee, wie Émile Breesé oder Alex Schwobthaler in eine sehr heikle Lage gerieten.
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'''Eine Armee, die ernährt werden will'''
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Als befände er sich auf einer Reportage in den mobilgemachten Einheiten, lässt sich Émile Breesé keine Gelegenheit entgehen, seine Kamera einzuschalten. Angesichts der Routine, die sich eingestellt hat, der ungleichen Bedingungen von einem Quartier zum anderen und des unfreiwilligen Lebens unter freiem Himmel, das durch den kalten und feuchten Winter unangenehm geworden ist, steht die Verpflegung im Mittelpunkt des Interesses der Soldaten. Die Preise sind seit der Kriegserklärung durchschnittlich um 17 % gestiegen, örtlich für bestimmte Produkte, die bei den Truppen sehr begehrt sind, sogar um 30 %. Alkohol, den es nicht zu geben scheint, da er theoretisch verboten ist, war in Wirklichkeit im Überfluss vorhanden, weil man ihn sich in den Dörfern sehr leicht besorgen konnte. Angesichts der verheerenden Auswirkungen des Alkoholismus versuchte Paul Reynaud im März 1940 eine zaghafte Regelung, die den Verkauf auf drei Tage begrenzte – eine lächerliche und sofort missachtete Maßnahme. Der 37-jährige Filmer filmt die Ankunft eines ganzen Ochsen, der sofort zerlegt wird (Bénestroff), und die Lieferung der Brotlaibe, die es zu jeder Mahlzeit gab. Die Ankunft des Essens bestimmt den Rhythmus der Tage, die von Tatenlosigkeit und Langeweile geprägt sind. Die Lebensmittel wurden an die Bahnhöfe geliefert, jede Einheit war für den Transport zu den „Küchenbullen“ verantwortlich, die die Mahlzeiten zubereiteten und mit den rollenden Feldküchen zu den Soldaten brachten. Im Film Verpflegungszentrum in Lothringen treffen sich die Soldaten bei dieser Feldküche zu einem Kaffee und einigen Laiben Brot mit Camembert. Die Bilder von Breesé erwecken den Eindruck, dass sich seit dem Ersten Weltkrieg nichts oder fast nichts geändert hat.
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'''Eine herzliche Kameradschaft'''
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Im Gegensatz zu den Fotoapparaten, von denen es sehr viele gab, wurde eine Kamera sofort bemerkt und Breesé war bald als Amateurfilmer bekannt, wahrscheinlich der einzige in der Einheit und sogar in der gesamten Gegend. Viele Soldaten, die ihm begegnen, werfen diesem lästigen Kameraden einen gleichgültigen Blick zu, oft mit der Kippe lässig im Mundwinkel. Aber andere reagieren wie Kinder und spielen den Schauspieler, manche wahrscheinlich auf Wunsch des Filmenden; ein Lächeln oder sogar eine herausgestreckte Zunge zeigen das Einverständnis, gefilmt zu werden, obwohl ein Film im Gegensatz zu einer Fotografie ihre Neugierde nicht sofort befriedigt, nicht gekauft oder eingetauscht werden kann, um sie an die Familien zu schicken, die erpicht auf Neuigkeiten sind. Das ballettartige Umladen der Brotlaibe wird durch die Posen und das Zwinkern vor der Kamera völlig gestört. Ohnehin nimmt sich jeder viel Zeit, mit einer Langsamkeit, die wie Zeitlupe aussieht, denn es gibt wirklich keinen Grund zur Eile. Drei junge Männer zeigen eine Art Turnübung und machen sich damit über die groteske Situation der zur Untätigkeit verdammten Soldaten lustig. Das Gelächter und die Mimik verbergen eine tiefe Verzweiflung, die von den Gerüchten noch verstärkt wird und die die mageren kulturellen oder sportlichen Freuden (Fußball), die ihnen der Generalstab gewährt, nicht wettmachen. Der Mangel an Verpflegung, Disziplin und Kampfgeist, die auf die Inkonsequenz des Generalstabs und das Zögern der politischen Führung zurückzuführen war, haben zur schnellen Niederlage im Mai 1940 beigetragen.
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|Bibliographie=François Cochet, ''Les Soldats dans la Drôle de guerre (septembre 1939-mai 1940)'', Paris, Hachette, 2004.
 
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Version actuelle datée du 20 mars 2019 à 12:32

Événements filmés ou en lien


Drôle de guerre

Résumé


Scènes de ravitaillement pendant la drôle de guerre en Lorraine.

Description


/ des soldats dont certain en tablier posent avec un chien de type berger allemand / deux soldats discutent / les soldats une la carcasse d’un animal ? / un soldat pose, cigarette en bouche / quatre soldat dont l’un pipe en bouche, sortent des pains d’une camionnette puis se les passent de main en main / des soldats descendent d’un bus en mauvais état (N°W721409 peint sur la carrosserie) / un homme en béret fumant la pipe tire la langue à l’opérateur / trois soldats posent devant le bus, l’un portant un autre sur ses épaules / un soldat riant

Métadonnées

N° support :  0021FN0002
Date :  1939
Coloration :  Noir et blanc
Son :  Muet
Durée :  00:01:24
Cinéastes :  Breesé, Emile
Format original :  9,5 mm
Genre :  Film amateur
Thématiques :  Manger et Festoyer, Seconde Guerre mondiale : avant-guerre
Institution d'origine :  MIRA

Contexte et analyse


Les années précédant la Seconde Guerre mondiale répètent d’une certaine manière celles menant à l’embrasement du premier conflit mondial. Malgré l’action de la Société des Nations fondée en 1920, l’Allemagne nazie noue des partenariats stratégiques avec ses alliés italien et japonais en 1936, procède à l’annexion des Sudètes et de l’Autriche en 1938, et fait pression sur la Slovaquie et la Hongrie pour qu’elles se rangent du côté de l’Axe. De leurs côtés, les anciens vainqueurs de 1918 restent noués par des pactes d’assistance étendus aux nouvelles nations nées au lendemain de la guerre, comme la Pologne. Alors que les pourparlers patinent entre l’URSS officiellement leader du camp antifascistes et les deux dernières grandes puissances démocratiques du continent, le pacte germano-soviétique est signé à Moscou le 23 août 1939. Son protocole secret partageant des zones d’influence en Europe orientale est le prélude à l’invasion allemande de la Pologne le 1er septembre et à la déclaration de guerre des Français et des Britanniques deux jours plus tard.

Ces deux nations, entravées par leur stratégie défensive, restent plongées dans l’illusion d’un possible règlement diplomatique, qui empêche toute initiative. Commence alors une période tôt qualifiée de « drôle de guerre », au cours de laquelle cinq millions de mobilisés perdent leur temps et leur moral dans une attente vaine. Pendant que la Wehrmacht s’active à l’Est, elle reste sur ses positions à l’Ouest et laisse passer l’hiver. L’état-major rompt cette trêve tacite le 10 mai et conquiert en quelques semaines la Belgique, les Pays-Bas et une partie de la France. L’Alsace se retrouve à nouveau annexée au Reich, ce qui place les anciens mobilisés de l’armée française, comme Émile Breesé ou Alex Schwobthaler, dans une situation très délicate.

Une armée à nourrir

Le Char...rieur, journal de tranchée © La Contemporaine

Comme s’il était en reportage dans les unités de mobilisés, Émile Breesé ne manque aucune occasion de mettre en marche sa caméra. Dans la routine qui s’est installée et l’inégalité des conditions de cantonnement si variables d’un lieu à un autre, celle d’une vie en plein air forcée rendue délicate par un hiver froid et humide, l’alimentation cristallise l’attention des soldats. Les prix ont bondi de 17% en moyenne avec la déclaration de guerre, et même de 30% localement pour certains produits très demandés par la troupe. Si l’alcool ne paraît pas présent, interdit en théorie, il abonde en réalité car il est très facile de s’approvisionner dans les villages. Devant les ravages de l’alcoolisme, Paul Reynaud tente en mars 1940 une timide régulation limitant à trois jours la vente – une mesure ridicule et tout de suite bafouée. Le cinéaste de 37 ans filme l’arrivée d’un bœuf entier qui va être aussitôt dépecé (film) et la livraison par camionnette des miches de pain constituant l’ordinaire de tous les repas. L’arrivée de la nourriture rythme des journées vides d’action et pleine d’ennui. La livraison des aliments se fait dans les gares, chaque unité se chargeant de les acheminer jusqu’aux « cuistots » qui vont préparer les repas et les amener aux soldats grâce à leur cantine mobile appelée « roulante ». Dans le film Centre de ravitaillement en Lorraine, elle réunit les soldats autour d’un café et de quelques miches de pain accompagnées de camembert. Les images de Breesé donnent le sentiment que rien n’a changé ou presque depuis 14-18.

Une camaraderie bon enfant

Contrairement aux appareils photo qui sont légion, une caméra se remarque immédiatement et Breesé a tôt fait d’avoir été identifié comme cinéaste amateur, sans doute le seul de l’unité et même de tout le coin. Bien des soldats croisés lancent un regard indifférent, souvent clope au bec, à cet importun. Mais d’autres réagissent comme des enfants et jouent à faire l’acteur, certains sur demande de l’opérateur sans doute ; un sourire ou même une langue tirée soulignent l’acceptation simple d’un geste qui, contrairement à celui du photographe, ne produit pas de satisfaction de la curiosité à brève échéance, ne peut s’acheter ou s’échanger pour être envoyé aux familles avides de nouvelles. Le ballet du transvasement des miches de pain est ainsi totalement perturbé par les poses face caméra et les clins d’œil. De toute façon, chacun prend son temps, avec une lenteur qui ressemble à un ralenti, car vraiment rien ne presse. Trois gaillards s’amusent à faire une figure de pseudo-gymnastique qui raille avec efficacité la situation burlesque de ces soldats condamnés à l’inactivité. Les rires et les mimiques cachent un profond désarroi qu’amplifient les rumeurs et que ne compensent pas les maigres plaisirs culturels ou sportifs (football film) accordés par l’état-major. La carence de ravitaillement, de discipline et d’esprit combatif, produit des inconséquences de l’état major et des hésitations des responsables politiques, ont contribué à l’effondrement rapide de mai 1940.

Bibliographie


François Cochet, Les Soldats dans la Drôle de guerre (septembre 1939-mai 1940), Paris, Hachette, 2004.


Article rédigé par

ALEXANDRE SUMPF, 18 décembre 2018