Croisière dans le Port du Rhin avec Batorama (0113FH0034)


Avertissement[1]

Résumé


En 1947, Robert Lehmann filme sur un bateau à passagers de la compagnie Batorama, qui navigue à la découverte des infrastructures et des industries portuaires du quartier du Port du Rhin, à l’Est de Strasbourg.

Description


La séquence s’ouvre sur un groupe de personnes qui vont et viennent sur le ponton extérieur du bateau. En arrière-plan, la Capitainerie du Port du Rhin, bâtiment d’architecture néo-gothique, situe l’embarcation dans le bassin du commerce. Parmi les personnes à bord pour la visite, on distingue une dizaine d’hommes en uniformes de marins, les autres passagers – hommes, femmes et enfants – sont vêtus de leurs habits de tous les jours. Un homme et deux dames posent en plan moyen devant la caméra, à l’arrière plan les quais défilent le long du bassin, deux péniches sont accostées.

Dans le plan suivant, la caméra effectue un léger panoramique de la droite vers la gauche en plan large sur le ponton du bateau, nombreux passagers autour de la cheminée principale et les installations portuaires du bassin du commerce en arrière plan. Contre-champ avec les têtes des passagers au premier plan, l’eau du bassin, péniches amarrées au quai, des grues de transbordement de marchandises et le bâtiment des entrepôts publics.

Travelling latéral sur le quai où l’on aperçoit voies de chemin de fer, bâtiments et cheminées fumantes, un tas de rondin de bois, des grues de transbordement de marchandises. Plan court sur les vagues causées par le bateau sur les bords du quai. Gros plan sur Mme Lehmann - la mère du déposant – qui sourit à la caméra. Léger panoramique sur la gauche, un homme de dos en uniforme et béret de marin, fume une cigarette. Mme Lehmann, au sourire mutin, regarde à nouveau vers la caméra puis tourne la tête vers les berges.

La foule amassée sur le ponton du bateau, l’ancienne tour de manutention des silos et greniers à céréales exploités par la société SANARA ainsi que l’entrepôt de stockage attenant, Les Grands Moulins de Strasbourg à l’architecture monumentale en arrière-plan. Un groupe de passagers filmé de dos, deux femmes agitent leur mouchoir vers la rive et le passage d’écluse nord à la sortie du Port. Mme Lehmann au côté d’un homme plus âgé en béret et nœud papillon, tous les deux adressent de grands sourires enjoués à la caméra.

Travelling depuis le bateau sur un autre, le « Franz Haniel IX », accosté au quai, puis sortie du bassin du commerce avec vue sur le poste de gardien au bout du quai. M.Lehmann, père, vêtu d’un manteau, d’une cravate et d’un couvre-chef, filmé en plan moyen sur le bateau. L’arrière du bateau et les remous de l’eau, le drapeau français qui flotte au vent. Le bateau à présent sorti des bassins du Port et naviguant sur le Rhin.

Métadonnées

N° support :  0113FH0034
Date :  1947
Coloration :  Noir et blanc
Son :  Muet
Durée :  00:01:15
Cinéastes :  Robert Lehmann
Format original :  8 mm
Genre :  Film amateur
Thématiques :  Le Rhin, symbole transfrontalier, Tourisme transfrontalier, Identité, Lieux, Paysages naturels et transformés
Institution d'origine :  MIRA

Contexte et analyse


Le Port du Rhin : poumon commercial et industriel de Strasbourg

Depuis l’Antiquité, les activités portuaires ont toujours été étroitement liés au développement économique de la ville. Les premiers aménagements portuaires sont situés en retrait du Rhin ; le fort débit et les nombreuses crues empêchent dans un premier temps leur installation à proximité du fleuve. A l’époque médiévale, le port de Strasbourg s’établit sur le site du Kaufhaus, au cœur de la ville - qui devient l’« Ancienne Douane » au 18ème siècle - et s’étend aux quais des pêcheurs et des bateliers.

A partir de 1871, Strasbourg devient capitale du Reichsland et cherche à s’équiper d’un port moderne pour faciliter la circulation des péniches et répondre au besoin d’un trafic commercial rhénan en plein essor. Le bassin d’Austerlitz, relié au Rhin par une écluse, est inauguré le 15 juin 1892, suivi du bassin Dusuzeau. Le Port s’installe définitivement sur le fleuve une fois celui-ci canalisé, dans le courant de la deuxième moitié du 19ème siècle. La construction des bassins du Commerce et de l’Industrie est achevée en 1901. La mise à disposition des terrains à proximité du Rhin favorise le développement des activités portuaires ; le trafic annuel du Port connaît une hausse majeure pour atteindre près de deux millions de tonnes à l’orée du premier conflit mondial. Le 1er janvier 1926, le Port devient Port autonome de Strasbourg, en plein cœur de l’espace du Rhin supérieur. Son nouveau statut lui confère un régime d’exploitation libéral similaire à celui d’un port maritime. Aucune taxe, péage ni redevance n’est appliqué au trafic de sorte que l’activité fluviale et industrielle en est largement stimulée.

Capitainerie.jpg

« Celui-ci est désormais pour l’Est de la France le port d’importation des charbons métallurgiques et industriels en provenance essentiellement d’Allemagne, des hydrocarbures, des céréales, des bois et produits alimentaires d’Outre-mer, et le port d’exportation des charbons flambants en provenance de Sarre et de lorraine, des potasses d’Alsace, des soudes et des produits métallurgiques des mines de Lorraine, ainsi que de nombreux produits fabriqués dans les industries de la région. » extrait du Second dépliant général datant de 1951, édité par le Port autonome de Strasbourg.

Nombre d’entreprises et d’usines s’installent dans le quartier du port du Rhin dont certaines font parti de la mémoire industrielle et ouvrière de la région. Parmi elles, on peut citer Les Forges de Strasbourg, la Scar (Société des chantiers et ateliers du Rhin) qui a pour mission la construction et la réparation du matériel fluvial et portuaire, la briqueterie Starlette, la Cellulose de Strasbourg à partir de 1930.

Sanara.jpg

Deux imposants bâtiments appartenant à ces entreprises historiques apparaissent dans la séquence filmée : Les Grands Moulins de Strasbourg, premiers usagers du Port du Rhin, en 1903. Un bâtiment de stockage et la tour de manutention des silos et greniers à céréales de la société SANARA, Société Alsacienne de Navigation Rhénane. Enfin au début de la séquence, dominant à l’extrémité du bassin du Commerce, la Capitainerie, édifice d’architecture néo-gothique, ancien poste de commandement du Port, construit en même temps que le bassin du commerce sous administration allemande.

Le quartier du Port du Rhin et ses industries portuaires connaîssent une intense activité à l’écart du centre et de la vie des strasbourgeois, qui évitent cette partie de la ville. Pour beaucoup en effet, passer le Pont Vauban qui délimite le quartier du même nom avec celui du Port du Rhin de l’autre côté, c’est pénétrer un autre univers, sale (dû aux rejets des usines charbonnières), bruyant et malodorant. Pourtant c’est bien ce monde qui est garant de l‘essor puis de la prospérité économique de la ville jusqu’à aujourd’hui.


La découverte des installations portuaires autour du Rhin avec Batorama

A partir de 1939, le Port autonome de Strasbourg cherche à faire connaître ses installations portuaires au grand public. Il fait l’acquisition de la vedette « Le Paris », utilisée lors de l’exposition universelle de Paris en 1937, pour assurer ses visites touristiques à travers le Port. Après une longue interruption due au conflit mondial de 1939-45, les visites du Port connaissent un véritable essor et se généralisent à toute la population. « Le Paris » - ainsi qu’un bateau plus ancien « Le Strasbourg », au gabarit plus important - embarque ses premiers passagers en 1947. C’est à cette date que la société Batorama, filiale du Port autonome de Strasbourg, voit officiellement le jour.

La séquence filmée nous donne ici à voir une des premières croisières (si ce n'est la première) organisées dans le quartier du Port du Rhin, en 1947. C’est un évènement pour la société de tourisme fluvial ainsi que toutes les personnes à bord. Le ponton du bateau est empli de passagers de tous âges qui semblent s’être apprêtés pour l’occasion. Les hommes portent chemises et cravates, les femmes sont en robes et imperméables, leurs coiffures bien mises. Même les enfants, nombreux sur ces images, ont revêtu leurs habits du dimanche.

Affiche publicitaire du Port autonome.jpg

La finesse de leurs vêtements indique que les passagers sont des gens issus d’un milieu social plutôt favorisé. L’équipage composé de marins en uniformes laisse d’ailleurs supposer que la sortie en bateau a été organisée spécialement pour une élite (strasbourgeoise) et leur famille. Au départ, c’est en effet à destination des services de l’état, des chefs d’entreprises, de délégations externe que ces traversées sont organisées pour la visite industrielle du Port et faire découvrir les infrastructures mises à disposition du développement de la ville. Les passagers semblent s'émerveiller de la découverte de ces installations portuaires monumentales. M. Lehmann filme les gens à bord et les membres de sa famille qui l’accompagnent. L’excitation et la joyeuse effervescence suscitées par l'excursion en bateau se lisent sur leurs visages, un sentiment grisant émane de l’atmosphère de cette séquence.

A partir de 1949, des brochures publicitaires vantent les mérites du plus grand port français sur le Rhin et invitent les voyageurs à partir à sa découverte grâce aux bateaux mis en place par le Port autonome. Le point de vue inédit qu’offre la ballade en bateau sur les installations portuaires est l’argument phare de la compagnie.

« C’est incontestablement une visite en vedette automobile qui permet d’avoir le meilleur aperçu de l’ampleur des installations du Port de Strasbourg. Le visiteur y trouvera la possibilité d’admirer tous les bassins du port, des plus anciens jusqu’aux plus modernes, ses écluses, ses vastes chantiers et entrepôts, son puissant outillage, ainsi que les nombreux types de bâtiments qui le fréquentent. L’intérêt d’une telle visite est encore relevé par une courte descente du Rhin qui conduit les visiteurs de l’Avant-Port Sud à l’Avant-Port Nord en passant sous les ponts de Kehl. » (extrait de la brochure publicitaire)

La fréquentation dépasse les 10 000 visiteurs par an en 1947 pour atteindre le cap des 20 000 en 1956. C’est un énorme succès jusqu'aux années 70 où l’intérêt pour le tourisme industriel portuaire diminue au profit des visites du centre-ville.



  1. Cette fiche est en cours de rédaction. À ce titre elle peut être inachevée et contenir des erreurs.