Fête d'école (0093FI0014) : Différence entre versions

 
(Une révision intermédiaire par un autre utilisateur non affichée)
Ligne 15 : Ligne 15 :
 
|droits=MIRA
 
|droits=MIRA
 
|Etat_redaction=Oui
 
|Etat_redaction=Oui
|Etat_publication=Non
+
|Etat_publication=Oui
 
|realisateurs=Daussin, Michel
 
|realisateurs=Daussin, Michel
 
|apercu=Fêteécole.jpg
 
|apercu=Fêteécole.jpg

Version actuelle datée du 6 mars 2020 à 17:34


[1]

Résumé


Ce film en Super 8mm, muet et en couleur, nous montre une sélection de scènes d’un spectacle de fête de fin d’année, dans la cour de l'école maternelle et primaire Notre-Dame-de-Sion à Strasbourg, au courant de l’été 1981. Le réalisateur, Michel Daussin, probablement parent d’élève, filme plusieurs moments de jeux et démonstrations artistiques effectués par différentes classes, chacune placée sous la direction des maîtresses et vraisemblablement sous fond de musique. Le corps enseignant introduit à l’aide d’un microphone les différents moments et anime les intervalles de la fête.

Métadonnées

N° support :  0093FI0014
Date :  1981
Coloration :  Couleur
Son :  Muet
Durée :  00:05:18
Cinéastes :  Daussin, Michel
Format original :  Super 8 mm
Genre :  Film amateur
Thématiques :  Mouvement de jeunesse - Education Scoutisme
Institution d'origine :  MIRA

Contexte et analyse


La première classe (minute 00:12 – 01:38) semble réaliser un jeu de rôle autour du thème des animaux : les enfants miment les gestes des lapins, puis concluent par des rondes, main dans la main. Certains portent des masques d’animaux identiques (probablement confectionnées en classe ou achetées dans une même boutique), tandis que d’autres portent des bonnets ressemblant aux fichus blancs traditionnels alsaciens. La deuxième classe (minute 01:39 – 02:45) fait un spectacle semblable : plusieurs enfants portent des bonnets ou des costumes intégraux d’animaux, dont la plupart sont confectionnés à l’identique ; ils miment leurs gestes d’abord de manière statique les uns face aux autres, puis en réalisent des rondes la main dans la main, et enfin se livrant à un jeu en couple où l’élève débout mime une créature féroce tandis que l’élève assis joue le rôle de la proie. Le spectacle de la troisième classe (minute 02:46 – 03:51) met en scène des élèves habillés à l’identique : répartis en deux équipes, ils effectuent d’abord des gestes de gymnastique rythmique, puis de danse de groupe, de couple et individuelle. La démonstration de la quatrième classe (minute 04:05 – 04:39), composée exclusivement de filles, consiste en une épreuve de chant. Les élèves sont habillées à l’identique et portent toutes une coiffe à nœud rouge issue de la tradition alsacienne. La cinquième classe (minute 04:40 – 05:04) est elle aussi composée exclusivement de filles, ornées de la coiffe traditionnelle alsacienne à nœud rouge ou bleu. Elles exécutent une danse en cercle circassien, tradition d’emprunt écossais depuis la fin du XIXe siècle et devenue populaire dans les milieux folkloriques français dans les années 1970 ; cette pratique est particulièrement adaptée aux enfants du fait de sa simplicité et convivialité. Quant à la coiffe à nœud (Schlupkapp), il s’agit de l’un des habits emblématiques du folklore alsacien, dont les premières traces remontent déjà à la fin du Moyen-Age. Tout comme les costumes alsaciens en général, les coiffes féminines elles aussi ont connu des multiples évolutions au fil des siècles, préfigurant une multitude de variétés en fonction des aires géographies et des cultes professés. Le port de la coiffe a décliné progressivement dès le début du XXe siècle, lorsque l’exode rural, l’urbanisation et l’industrialisation des campagnes ont poussée à l’introduction de coutumes vestimentaires plus sobres et plus pratiques pour l’usage courant, reléguant le port de costumes traditionnels aux occasions de fêtes et célébrations publiques.

La tradition des fêtes scolaires dans les écoles maternelles et primaires est plutôt récente en Alsace au moment où le film est tourné. Avant 1871, il n’existe pas de véritable tradition française de ce genre de fêtes, laissées plutôt à la discrétion des corps enseignants et divergeant ainsi tant en termes de géographie que de temporalité. Dans le Reichsland s’installe une tradition de fêtes scolaires à vocation propagandiste, censée célébrer les grandes victoires et les moments-clés de la vie politique impériale, afin de gagner la jeunesse alsacienne-lorraine à la cause de pro-allemande. Lorsque les deux provinces redeviennent françaises en 1918, se diffuse dans le pays à partir des années 1920 la tradition des « Fêtes de la jeunesse des écoles publiques », mettant en avant annuellement les valeurs républicaines, la centralité de l’école publique ainsi que la dimension de socialisation des élèves. L’organisation est confiée aux municipalités et aux directions d’établissement, mais un cadrage national émerge quant à la temporalité, puisque ces fêtes se tiennent majoritairement à la fin de l’année scolaire. Parfois, la date choisie par les communes tenues par la gauche correspond à celle du jeudi de l’Ascension, préfigurant un défi ouvert du modèle laïque et publique contre celui confessionnel et privé, ce qui peut expliquer la faible diffusion de ces fêtes officielles en Alsace jusqu’à la Deuxième Guerre mondiale. En outre, pendant ce genre de fêtes, la créativité des enfants n’est que peu mise en valeur : en présence des corps enseignants et des autorités civiles et militaires locales, les élèves sont encadrés et se cantonnent bien souvent à des défilés en uniforme accompagnés de fanfares, tandis que la pratique gymnastique, sportive et musicale est laissée pour compte. La parenthèse de l’occupation de l’Alsace pendant le Seconde Guerre mondiale voit s’y réinstaller une pratique de fêtes propagandistes pro-allemandes. A partir des années 1950-1960, la tradition des fêtes scolaires rigidement encadrées et institutionnalisées décline au profit d’une plus grande marge de liberté laissée aux établissements. Avec l’essor et la démocratisation du tourisme, le concept de zonage scolaire est introduit dans les années 1960 pour différer les départs en vacances d’été : la recherche d’une date praticable au niveau national pour les fêtes de fin d’année devient ardue. En parallèle des fêtes précédant les vacances estivales, commencent à se tenir également des fêtes de Noël et de Pâques. Les établissements profitent des occasions festives – et notamment de la présence de parents d’élèves souvent munis d’appareils photos et de caméras – pour se montrer performants, mettant en avant leurs atours et la polyvalence des enseignements dispensés. La fête constitue une sorte de bilan de l’année scolaire qui vient de s’achever.

Ainsi, dans le film, nous pouvons assister à des démonstrations artistiques variées, des mimes à la danse, des gymnastiques au chant, mettant en évidence la manière dont l’établissement réalise les consignes de l’Arrêté du 7 août 1969 relatives au développement corporel dans le cadre du « tiers temps pédagogique ». Grâce aux marges de liberté dont jouissent les établissements, ceux-ci peuvent choisir de s’écarter des codes de la tradition nationale française au sens strict pour mettre en valeur les traditions locales et régionales, ou encore emprunter des pratiques artistiques étrangères : dans le film nous assistons ainsi à des danses d’origine écossaise, à une chorale et à une danse en tenue alsacienne. Parfois, les spectacles des élèves lors des fêtes de fin d’année scolaire se complémentent de kermesses d’artistes adultes censées collecter des fonds pour l’école et le développement de ses divers projets.

Les fêtes d’école deviennent de plus en plus populaires dans les dernières décennies du XXe siècle : moments de loisir, de jeu et de détente collective, elles réaffirment la finalité pédagogique du développement de liens fraternels entre les élèves, favorisant en outre le partage intergénérationnel tout comme le contact entre corps enseignant et familles. Si les fêtes sont de moins en moins institutionnalisées, elles demeurent néanmoins des moments solennels. Le film nous montre en effet, au-delà de l’amusement des élèves, que le nombreux public assistant aux spectacles porte une grande attention au déroulement de la fête, signe de l’importance qu’un tel moment avait assumé dans la vie locale. Par ailleurs, la plupart des assistants sont bien habillés, certains portent même des prestigieux parapluies d’été : dans ce moment de contact entre plusieurs univers - celui des familles, des enseignants et des élèves -, chacun fait de son mieux pour bien se présenter en société. Les tenues et l’attitude distinguées du public nous confirment que les parents d’élèves de l’établissement de Notre-Dame de Sion sont majoritairement issus de milieux aisés. La Congrégation de Notre-Dame de Sion avait été fondée en 1843 par les frères strasbourgeois Théodore et Alphonse Ratisbonne, juifs convertis au catholicisme. C’est en 1919 que leur institution ouvre une école à Strasbourg : établissement privé et payant, il dispense un enseignement d’empreinte religieuse d’abord aux seules filles, et dès 1962 en mixité. L’école est installée en 1950 au 2 rue Erckmann-Chatrian à Strasbourg et, depuis la loi Debré de 1959, a accédé au statut d’école privée sous contrat d’association avec l’Etat.

Pour plus d’informations sur la création de l’école et ses particularités pédagogiques, se référer à la fiche d’analyse des films Fête d'école juin 1984 et Ecole 1985

Bibliographie


Jeanne Benay, Jean-Marc Leveratto (dir.), Culture et histoire des spectacles en Alsace et en Lorraine. De l’annexion à la centralisation (1871-1946), Berne, Peter Lang, 2005.

Pierre Bleze, Georges Fischer, Jean Claude Streicher, Histoire des Alsaciens, Luçon, Fernand Nathan, 1979.

Jean-Marie Gillig, Bilinguisme et religion à l'école : la question scolaire en Alsace de 1918 à nos jours, Strasbourg, la Nuée bleue, 2012.

Jean-Marie Gillig, L'école laïque en Alsace et en Moselle : Une histoire inachevée, Paris, L’Harmattan, 2017.

Sandrine Kaczmarek, L’institution Notre-Dame de Sion à Strasbourg de 1919 à 1939, Mémoire de Maîtrise d’Histoire sous la direction de Catherine Maurer, Université Marc Bloch (Strasbourg II), 2000.

Jacques Lavigne, L'école primaire en Alsace de 1830 à 1870, Mémoire de Maîtrise d’Histoire sous la direction de Bernard Vogler, Université Marc Bloch (Strasbourg II), 1994.

Robert Muller, Jean-Paul Schimpf, Parlons alsacien, Paris, L'Harmattan, 1998.

Bernard Vogler, Histoire culturelle de l'Alsace: du Moyen Âge à nos jours. Les très riches heures d'une région frontière, Strasbourg, La Nuée bleue, 1994.

Anne Wolf, Jean-Luc Neth, Quelques paillettes, un peu de soie. Coiffes d'Alsace du XVIIe et du début du XIXe siècle, Colmar, Musée Unterlinden, 2009.

Angela Xavier De Brito, « Comment devient-on une congrégation enseignante ? Le cas de Notre-Dame de Sion », Chrétiens et sociétés, n. 25, 2018, URL : http://journals.openedition.org/chretienssocietes/4556


Article rédigé par

Lola Romieux, 20 janvier 2020


  1. En tant que partie d'une production amateur, cette séquence n'a pas reçu de titre de son réalisateur. Le titre affiché sur cette fiche a été librement forgé par son auteur dans le but de refléter au mieux son contenu.