Fête d'école juin 1984 (0093FI0017)

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Résumé


Il s’agit d’un spectacle de fête de fin d’année de l’école Notre-Dame de Sion. On peut supposer que le ou les enfants du cinéaste Michel Daussin étaient scolarisés dans cet établissement lorsque la vidéo a été tournée, en 1984.

Description


La vidéo, d’une durée de 4:54 laisse voir trois moments précis qui se sont déroulés lors de la fête de l’école (la ronde des enfants, le spectacle de gymnastique, le lâcher de ballons). Il ne semble pas y avoir eu de montage particulier. Le film est muet, et aucune musique n’a été ajoutée.

- La ronde des enfants (de 0:00 à 2:59).

Des enfants, filles et garçons dansent en ronde sur une estrade. La scène est filmée en contre-plongée, ce qui donne l’impression que le cinéaste se trouve au milieu du public, au pied de l’estrade. Les enfants, qui semblent être âgés d’environ six ans, portent tous les mêmes costumes : une salopette colorée et une chemise blanche pour les garçons et une jupe de couleur arrivant aux genoux avec un chemisier blanc pour les filles. Ces dernières portent sur leur tête un fichu. Tous les enfants ont aux pieds des bottes et à leur poignet gauche des bandes de papier colorées qui soulignent leurs mouvements. Le cinéaste prend d’abord un plan d’ensemble de l’évènement, on peut en effet voir la foule rassemblée au pied de l’estrade pendant que les enfants dansent. On a l’impression que la personne qui filme se rapproche de la scène car le plan se resserre de plus en plus sur les danseurs. L’objectif de la caméra suit les enfants dans leur ronde. Ces derniers dansent ensuite deux par deux. S’il n’y a pas de plan resserré sur un seul des enfants, on remarque tout de même que le cinéaste se focalise sur un petit garçon, vêtu d’une salopette vert pâle, ce qui laisse supposer qu’il s’agit de son fils. Même si le film est muet, on se doute que les enfants sont accompagnés d’une musique, il est cependant impossible de savoir de quelle musique il s’agit. Aux alentours des deux minutes, la qualité de l’image se dégrade l’espace de quelques secondes : l’image n’est plus très bien cadrée, le doigt du cinéaste apparaît à l’écran, et un objet (la scène ?) occupe la moitié du cadre. Une fois ce problème résolu, on observe un plan resserré sur les danseurs, ce qui permet de voir la partie du public se trouvant de l’autre côté de l’estrade. Un homme filme, lui aussi, une femme prend des photos… Les enfants dansent à nouveau en ronde. Fin du spectacle, le cinéaste change de perspective pour filmer les enfants qui descendent de la scène.

- Spectacle de gymnastique (de 3:00 à 4:06).

Des jeunes filles d’environ une quinzaine d’années enchaînent des figures de gymnastique les unes à la suite des autres. Elles portent toutes le même justaucorps bleu foncé. Encore une fois, la personne qui filme se trouve dans le public et change parfois l’angle de la prise de vue pour permettre de capter le mieux possible les différents moments du spectacle. Il s’agit, la plupart du temps de plans d’ensemble. Il n’y a pas de focalisation sur une seule jeune fille, ce qui met l’accent sur la dynamique du spectacle de gymnastique. Plusieurs rushes se suivent pour montrer différents moments du spectacle : cheval d’arçon, saltos, roues, roulades, salut sous forme d’une figure collective. Il est à noter une interruption de la vidéo à 3:23, et ce pendant trois secondes, ce qui pourrait témoigner de l’absence de montage.

- Lâcher de ballons (de 4:07 à 4:53).

La foule, composée d’adultes et d’enfants, sûrement les élèves et leur famille, agitent des ballons colorés. Si le cinéaste réalise des plans d’ensemble de la foule, il est possible de constater qu’il semble se concentrer sur deux enfants, des garçons, en particuliers. Le plus âgé semble avoir une dizaine d’années, le plus jeune a déjà été aperçu, dansant sur l’estrade dans la première partie de la vidéo. Il s’agit certainement des fils de Monsieur Michel Daussin, le cinéaste qui a eu six enfants. A 4:34, les ballons sont lâchés dans le ciel. La caméra suit le mouvement des ballons qui s’élèvent progressivement dans le ciel, dépassant le toit de l’établissement. La vidéo se termine sur ce lancer de ballons. Il est à noter que cette scène est la même que celle de la vidéo Ecole 1985 tourné par Monsieur Daussin lors d’une autre fête à Notre-Dame de Sion, ce qui laisse penser que le lancer de ballon est une tradition dans cette école. Cela est confirmé par une photo récente trouvée sur le site officiel de l’école Notre-Dame de Sion.[1]

Métadonnées

N° support :  0093FI0017
Date :  juin 1984
Coloration :  Couleur
Son :  Muet
Durée :  00:04:54
Cinéastes :  Daussin, Michel
Format original :  Super 8 mm
Genre :  Film amateur
Thématiques :  Mouvement de jeunesse - Education Scoutisme
Institution d'origine :  MIRA

Contexte et analyse


Le but visé par Monsieur Daussin en réalisant cette vidéo était certainement de fixer des souvenirs familiaux, de garder à jamais une trace de la fête d’école de ses enfants. L’absence de montage et le cadrage parfois approximatif souligne bien le fait que l’important n’était pas les techniques cinématographiques, mais bien l’émotion, la nostalgie, provoquée, au visionnage de ces moments. Il s’agit ici bien d’un film de famille, destiné à être visionner dans un cercle privé. Pour analyser cette vidéo, nous mettrons de côté cet aspect émotionnel et nous concentrerons sur l’école Notre-Dame de Sion ainsi que sur l’enseignement qui y est dispensé.

L’école Notre-Dame de Sion, un établissement fondé par une Congrégation

C’est à l’initiative de Théodore (1802-1884) et d’Alphonse Ratisbonne (1814-1884), deux juifs convertis au catholicisme, qu’est fondée en 1843 la Congrégation de Notre-Dame de Sion.[2] Plusieurs établissements sont alors fondés hors de France, une maison est par exemple créée en 1866 en Roumanie.[3] Bien que les deux frères soient originaires de Strasbourg, ce n’est qu’en 1919, soit trente-cinq ans après leur mort que la congrégation ouvre un établissement dans cette ville. Cette nouvelle école, tout d’abord exclusivement réservée aux filles, accueille la première année huit élèves, la plus jeune est âgée de quatre ans.[4] La maison de Strasbourg est placée sous l’autorité d’une Mère supérieure. L’enseignement religieux qui y est dispensé est très important. L’objectif est avant tout d’éduquer de bonnes chrétiennes. Les professeurs sont en majorité des religieux, mais certains laïques travaillent aussi dans cet établissement. L’école s’agrandit peu à peu, des élèves de 4 à 18 ans y étudient. En 1950 est inaugurée l’école primaire au 2 rue Erckmann-Chatrian à Strasbourg. C’est très certainement dans la cour de cette école à l'architecture reconnaissable qu’a lieu la fête d’école filmée. L’école est mixte depuis 1962. La scolarité privée étant payante, il est à noter que ces élèves proviennent la plupart du temps de familles aisées. C’est ce qu’a remarqué Kaczmarek Sandrine lors de ses recherches de Master sur l’Institution Notre-Dame de Sion. Elle observe ainsi que les filles scolarisées entre 1919 et 1939 ont souvent des parents militaires, médecins, chefs d’entreprise…[5] Si ces recherches ne s’intéressent pas à l’année où a été tourné le film, on peut tout de même considérer que l’école semble fréquentée par des familles d’un milieu social assez favorisé. Cela est visible par les vêtements portés, ou encore par la possession de caméra par les parents d’élèves. Aujourd’hui, l’école Notre-Dame de Sion est séparée en deux établissements : celui situé rue Erckmann-Chatrian (école maternelle et élémentaire), et un collège au 8 boulevard de la Dordogne. Elle accueille plus de 660 élèves.

Notre-Dame de Sion, un établissement privé sous contrat

On estime qu’en 2012 deux millions d’élèves étaient scolarisés dans des établissements privés en France.[6] I Si les lois Ferry de 1882 et 1886 mettent en place la laïcisation de l’école, le gouvernement de Vichy place l’accent sur l’instruction religieuse la reconnaissant d’utilité publique.[7] Le Gouvernement provisoire à Alger explicite au contraire les principes fondamentaux de l’école républicaine qui sont les suivants « gratuité, obligation scolaire, laïcité ».[8] Ce débat entre intégration de l’enseignement privé et religieux fait beaucoup couler d’encre. Ce n’est qu’avec la loi Debré de 1959 que sont proposés trois statuts différents pour ces établissements. Ils peuvent être sous contrat associé avec l’État, ce qui implique un contrôle de l’État sur les programmes d’enseignement, en échange de quoi les établissements privés reçoivent des aides. L’autre type de contrat est le contrat simple. Moins contraignant en ce qui concerne l’enseignement dispensé, il implique aussi des aides financières moindres. Dans le cas où l’établissement privé refuse les deux contrats avec l’État, il ne reçoit aucune aide, son enseignement est libre mais doit être soumis à des contraintes d’hygiène, de moralité et de niveau.[9] L’année même de la mise en application de la loi Debré, Notre Dame de Sion devient un établissement privé sous contrat d’association avec le Ministère de l’Éducation nationale. L’Alsace bénéficiant d’un Régime local, la question de la liberté de conscience et de la liberté des cultes posée par l’Article 1er de la loi ne s’y applique pas.[10]

L’importance de l’appréhension du corps dans la pédagogie

École privée sous contrat d’association avec l’État, l’établissement de Notre-Dame de Sion se doit de respecter les instructions et les programmes publiés par le Ministère de l’Éducation nationale. L’arrêté du 7 août 1969 met officiellement en place dans l’enseignement primaire le « tiers temps pédagogique » qui met l’accent sur trois domaines d’activité : la langue (le français), les mathématiques, et le développement du corps. Six heures par semaine sont alors dévolues à l’éducation physique et sportive.[11] Cet enseignement n’est pas réservé au cycle primaire mais s’applique aussi au cycle secondaire. Ce qui est bien visible avec la démonstration de gymnastique réalisée par les jeunes filles dans la vidéo.

De plus, la ronde effectuée par les enfants lors de la fête de l’école répond tout à fait aux consignes de l’Éducation nationale. Solange Sanchis, ancienne directrice d’école maternelle explique ainsi dans son livre Jeux de doigts, rondes et jeux dansés, publié en 2004, les bénéfices de cet exercice pour les enfants : « Lors de diverses figures, [l’enfant] exerce des activités motrices fondamentales […]. Tous ces exercices le conduisent à une connaissance de plus en plus fine de son schéma corporel ».[12] Apprendre à se situer dans l’espace, à tenir compte de la chorégraphie, des règles, à interagir avec les autres, tous ces éléments se retrouvent dans l’exécution de la ronde et participent à l’évolution de l’enfant. À cet aspect pédagogique s’ajoute en Alsace un aspect plus culturel. Il est en effet peut-être possible de faire une analogie entre la ronde des enfants de ce film (ou celle du film Ecole 1985 du même réalisateur), et les danses traditionnelles alsaciennes. Tout d’abord, les costumes portés par les enfants ressemblent aux costumes traditionnels alsaciens : une coiffe dans les cheveux pour les filles, une jupe longue, le chemisier blanc,… Les différences avec les costumes alsaciens traditionnels peuvent être expliquées par le fait que l’école ne peut pas payer des vrais costumes à tous les enfants.

Pour plus d’informations sur l’influence de la culture alsacienne sur la pédagogie de l’école Notre Dame de Sion, consulter la fiche d’analyse du film Ecole 1985.

Bibliographie


- Ouvrages scientifiques :

COMBES Jean, Histoire de l’école primaire élémentaire en France, « Que sais-je ? », Paris, PUF, 1997.

DALTROFF Jean, Les Ratisbonne Paris et Jérusalem au XIXe siècle : Regards croisés au début du XXIe siècle, Bernardswiller, I. D. L’Edition, 2017.

KACZMAREK Sandrine, L’institution Notre-Dame de Sion à Strasbourg de 1919 à 1939, Mémoire en Sciences historiques sous la direction de MAURER Catherine, Strasbourg, 1999-2000.

POUCET Bruno, L’enseignement privé en France, « Que sais-je ? », Paris, PUF, 2012.

SANCHIS Solange, Jeux de doigts, rondes et jeux dansés, Paris, Retz, 2004.

- Site internet :

http://nds67.toutemonecole.fr/pages/123401 (Site internet de l'école Notre-Dame de Sion, dernière consultation le 30 décembre 2019).


Article rédigé par

Pauline Wolf, 05 janvier 2020


  1. http://nds67.toutemonecole.fr/pages/123401
  2. DALTROFF Jean, Les Ratisbonne Paris et Jérusalem au XIXe siècle : Regards croisés au début du XXIe siècle, Bernardswiller, I. D. L’Edition, 2017, p.84.
  3. KACZMAREK Sandrine, L’institution Notre-Dame de Sion à Strasbourg de 1919 à 1939, Mémoire en Sciences historiques sous la direction de MAURER Catherine, Strasbourg, 1999-2000, p. 8.
  4. KACZMAREK Sandrine, L’institution Notre-Dame de Sion à Strasbourg de 1919 à 1939, Mémoire en Sciences historiques sous la direction de MAURER Catherine, Strasbourg, 1999-2000, p.47.
  5. KACZMAREK Sandrine, L’institution Notre-Dame de Sion à Strasbourg de 1919 à 1939, Mémoire en Sciences historiques sous la direction de MAURER Catherine, Strasbourg, 1999-2000, p. 53.
  6. POUCET Bruno, L’enseignement privé en France, « Que sais-je ? », Paris, PUF, 2012, p. 3.
  7. POUCET Bruno, L’enseignement privé en France, « Que sais-je ? », Paris, PUF, 2012, p. 34.
  8. COMBES Jean, Histoire de l’école primaire élémentaire en France, « Que sais-je ? », Paris, PUF, 1997, p. 112.
  9. POUCET Bruno, L’enseignement privé en France, « Que sais-je ? », Paris, PUF, 2012, p. 3.
  10. POUCET Bruno, L’enseignement privé en France, « Que sais-je ? », Paris, PUF, 2012, p. 79.
  11. COMBES Jean, Histoire de l’école primaire élémentaire en France, « Que sais-je ? », Paris, PUF, 1997, p. 116-117.
  12. SANCHIS Solange, Jeux de doigts, rondes et jeux dansés, Paris, Retz, 2004, p. 7.