Paysans à Hoffen (0026FN0004) : Différence entre versions

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Jusqu'au début du 20e siècle, dans le milieu rural en particulier le lavage du linge n’avait lieu que deux à trois fois par an et était appelé « la buée ».  
 
Jusqu'au début du 20e siècle, dans le milieu rural en particulier le lavage du linge n’avait lieu que deux à trois fois par an et était appelé « la buée ».  
Cette grande lessive durait en principe trois jours et consistait au lavage du linge de maison et des vêtements peu délicats. Elle était composée de trois étapes aux noms plutôt évocateurs au vu de la dureté de la tâche. D’abord, lors du « Purgatoire », les lavandières laissent tremper le linge dans des grandes cuves en terre ou dans des baquets de bois le plus généralement à domicile, dans un espace dédié ou dans la cuisine, pour le décrasser. La cuve était ensuite recouverte d’un drap plein de cendres de bois fin dont les propriétés (carbonate de potasse) sont nettoyantes et font office de lessive. Alors, c’est l’enfer et ses vapeurs qui débutent : la lavandière verse sur les cendre de l’eau bouillante. Dans les années 1920 cependant, apparaît le savon en paillette, ce qui diminue la longueur de cette étape. Le lendemain enfin, le linge est chargé dans des bassines et des hottes sur des brouettes et amené au lavoir afin d’y être battu et d’en extraire le maximum de lessive, rincé puis essoré auprès d’une source d’eau. Ici, on remarque bien au bord du lavoir les brouettes et les bassines. Le linge retrouve sa pureté : c’est le " Paradis ". Il est à noter que cette étape du rinçage dans des lavoirs publics était une nécessité, puisque l’eau courante et potable n’étaient pas généralisée. Il existait dans les villages des lavoirs privés pour les habitations ayant directement accès à l’eau d’une rivière. Il a fallu attendre 1935 à Strasbourg pour que les ménages disposent de canalisations reliées à leurs intérieurs <ref>BLOCH-RAYMOND Anny. « Bateaux-lavoirs, buanderies et blanchisseries. Des relations entre espaces publics, espaces privés » in ''Revue des Sciences sociales'', n°13, n°13bis, 1984, p.10</ref>. Enfin, le linge était suspendu ou étalé sur l’herbe pour sécher, ou blanchit.  
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Cette grande lessive durait en principe trois jours et consistait au lavage du linge de maison et des vêtements peu délicats. Dans les villages alsaciens, seuls les pièces de linge blanches étaient lavés lors de ces grandes buées : chemises, chaussettes, tabliers… Les éléments les plus fins, comme les bonnets, n’étaient jamais nettoyés. Elle était composée de trois étapes aux noms plutôt évocateurs au vu de la dureté de la tâche. D’abord, lors du « Purgatoire », les lavandières laissent tremper le linge dans des grandes cuves en terre ou dans des baquets de bois le plus généralement à domicile, dans un espace dédié ou dans la cuisine, pour le décrasser. La cuve était ensuite recouverte d’un drap plein de cendres de bois fin dont les propriétés (carbonate de potasse) sont nettoyantes et font office de lessive. Alors, c’est l’enfer et ses vapeurs qui débutent : la lavandière verse sur les cendre de l’eau bouillante. Dans les années 1920 cependant, apparaît le savon en paillette, ce qui diminue la longueur de cette étape. Le lendemain enfin, le linge est chargé dans des bassines et des hottes sur des brouettes et amené au lavoir afin d’y être battu et d’en extraire le maximum de lessive, rincé puis essoré auprès d’une source d’eau. Ici, on remarque bien au bord du lavoir les brouettes et les bassines. Le linge retrouve sa pureté : c’est le " Paradis ", après quoi le linge était suspendu ou étalé sur l’herbe pour sécher, ou blanchi. Même s'il existait dans les villages des lavoirs privés pour les habitations ayant directement accès à l’eau d’une rivière, il est à noter que le rinçage dans des lavoirs publics était une nécessité, puisque l’eau courante et potable n’était pas généralisée. Il a fallu attendre 1935 à Strasbourg pour que les ménages disposent de canalisations reliées à leurs intérieurs <ref>BLOCH-RAYMOND Anny. « Bateaux-lavoirs, buanderies et blanchisseries. Des relations entre espaces publics, espaces privés » in ''Revue des Sciences sociales'', n°13, n°13bis, 1984, p.10</ref>.  
Mais dans les années 1930, le lavage du linge devient hebdomadaire : il est entreposé dans des buanderies propres aux fermes ou dans les caves. Ainsi à Strasbourg, en 1900 des logements nouvellement construits sont équipés de buanderies (BLOCH-RAYMOND Anny, op. cit. p.7), c’est d’ailleurs certainement le cas ici. Les lavoirs communaux étaient gratuits dans les campagnes. Puis, à partir des années 1950, le lave-linge se démocratise. Néanmoins, en 1961, 26% des ménages alsaciens possèdent un lave-linge (BLOCH-RAYMOND, Anny, op. cit. p.14). Encore dans les années 1970, il fait figure d’exception dans la campagne alsacienne. Un film produit par l’Electricité de Strasbourg en 1975, montre l’arrivée et la révolution de l’électricité dans le village d’Oberseebach, avec entre autres, le lave-linge (voir fonds ES, 0030NN0001 : droits ?). Pompage de l'eau sur un puits à balancier, ou « Schwenkelbrunne », comme il en existe de nombreux dans la région de l’Outre Forêt à Hoffen, qui dispose de trois cours d’eau communaux.
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On le voit sur cette séquence, l'accès à l'eau est encore rudimentaire en 1928 : une femme à Hoffen pompe de l'eausur un puits à balancier, ou ''Schwenkelbrunne'', comme il en existe de nombreux dans la région de l’Outre Forêt, et la porte ensuite dans un seau. Pourtant, c'est à cette période que le lavage du linge devient hebdomadaire, comme cela doit être le cas ici à Châtenois. Les techniques changent avec la laveuse, la possibilité d'acheter et d'entreposer plus de linge dans des buanderies et l'apparition graduelle de l'eau courante. Les fermes possédaient parfois leur propre buanderie. Les lavoirs communaux étaient gratuits dans les campagnes. Puis, à partir des années 1950, le lave-linge se démocratise. Néanmoins, en 1961, 26% des ménages alsaciens possèdent un lave-linge (BLOCH-RAYMOND, Anny, op. cit. p.14). Encore dans les années 1970, il fait figure d’exception dans la campagne alsacienne. Un film produit par l’Electricité de Strasbourg en 1975, montre l’arrivée et la révolution de l’électricité dans le village d’Oberseebach, avec entre autres, le lave-linge (voir fonds ES, 0030NN0001 : droits ?).  
Le travail est difficile, on le voit bien ici. Les femmes sont sur les genoux, courbées vers l’eau et frottent vigoureusement le linge sur les planches. On note que certaines sont agenouillées dans des caisses, qui servent à les protéger des giclures de l’eau. Elles devaient encore battre le linge puis ramener les baquets dans la charrette.
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Il est à noter aussi la présence d’un petit enfant, accompagnant certainement sa mère et qui lui aussi frotte le linge. Laver le linge est une transmission de mère en fille. Fait
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Le travail est difficile, on le voit bien ici. Les femmes sont sur les genoux, courbées vers l’eau et frottent vigoureusement le linge sur les planches. On note que certaines sont agenouillées dans des boîtes à laver, caisses de bois qui servent à les protéger des de l’eau, et qui agrémentées de paille et de tissus, rendait leur position moins inconfortable. Mais elles devaient encore battre le linge puis ramener les lourds baquets dans des charrettes. Le ruisseau communal passant à Châtenois a, de mémoire d’homme, toujours été utilisé pour laver le linge et pour éteindre les incendies. Les femmes y venaient encore dans les années 1950 pour faire leur linge, jusqu’à la condamnation du ruisseau au moment de la canalisation de la ville dans les années 1970 <ref>d’après Jean-Philippe Dussourd, Président du Groupe patrimoine de Châtenois, entretien réalisé le 3 août 2018 </ref>.  
Ainsi, ce que l’on peut voir à l’image dans la rue ici est l’étape du rinçage. Le ruisseau communal passant à Chatenois a, de mémoire d’homme, toujours été utilisé pour laver le linge et pour éteindre les incendies. Les femmes y venaient encore dans les années 1950 pour faire leur linge, jusqu’à la condamnation du ruisseau au moment de la canalisation de la ville dans les années 1970(d’après Jean-Philippe Dussourd, Président du Groupe patrimoine de Châtenois, interview réalisée le 3 août 2018).  
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Concernant le costume alsacien, seul les éléments en blanc étaient lavés lors de ces grandes buées : chemises, chaussettes, tabliers… Les pièces plus fines, comme les bonnets, n’étaient jamais nettoyés.
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La lavandière est devenue une image d'Epinal lorsqu'on évoque la vie rurale d'antan. Elle est même entourée de vieilles croyances comme celle des Lavandières de nuit, revenantes lavant le linge des défunts la nuit, annonciatrice d’une mort prochaine ou expiant un pêché, comme avoir lavé le linge un dimanche. Dans les Vosges du nord, à Oberbronn, l’apparition d’une dame blanche lavant son linge était présage de décès dans la famille d’une laveuse<ref>GIRAUDON Daniel, Lavandières de jour, lavandières de nuits. Bretagne et pays celtiques. Mémoire, CRBC, 1996, p.20</ref>.
La lavandière est aussi entourée de vieilles croyances comme celle de la Lavandière de nuit, revenantes lavant le linge la nuit ou celui des défunts était annonciatrice d’une mort prochaine ou expiant un pêché, comme avoir lavé le linge un dimanche. Dans les Vosges du nord, à Oberbronn, l’apparition d’une dame blanche lavant son linge était présage de décès dans la famille d’une laveuse (source : GIRAUDON Daniel, Lavandières de jour, lavandières de nuits. Bretagne et pays celtiques. Mémoire, CRBC, 1996, p.20).
 
 
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Version du 7 août 2018 à 17:11

Métadonnées

Coloration :  Noir et blanc
Son :  Muet
Durée :  00:01:11
Cinéastes :  Spindler Paul
Format original :  9,5 mm
Genre :  Film amateur
Thématiques :  Identité
Institution d'origine :  MIRA

Personnages identifiés


Spindler Charles (1865-1938); Elzingre Edouard (1880-1966)

Lieux ou monuments


Hoffen; Oberseebach; Châtenois