Cinq cent Club d'Stindler sur la route du vin (0033FN0001)
Résumé
Description
Carton « Cinq cent Club « d’Stindler » Excursion en autocar. Sur la route du Vin. ». Plan fixe et sombre sur des gens qui marche vers la caméra sur une grande place. Ils portent des sacs. Mouvement panoramique du bas vers le haut sur une tour et la nef d’une église. Plan fixe sur la cathédrale de Strasbourg depuis une rue. Des gens regroupés attendent sur le trottoir. Une enseigne à l’arrière : « Chaussures. Grandes Arcades ». Un couple arrive. Une autre enseigne au fond : « Zuem Stadtwappe ». On continue à arriver. À l’arrière-plan, un bâtiment est en travaux. Plan fixe sur un autocar « Astra Voyages ». Les gens se regroupent vers l’entrée du bus. Un homme (Charles Veltz) avec un papier dans les mains fait monter les gens dans l’autocar. À gauche un homme avec un uniforme et un chapeau. Les gens continuent à monter. Plan fixe en légère contre-plongée sur une église/chapelle blanche qui domine un champ et des vignes. Des gens habillés élégamment descendent et quittent le site de l’édifice. On observe la vue aux jumelles. On s’embrasse devant la caméra. Mouvement panoramique sur l’édifice religieux. Un grand homme descend sur le chemin, seul, avec les mains dans les poches. Plan fixe sur une rue et une porte de ville médiévale. Plan composé de caméra embarquée : le paysage qui défile avec vignes et église sur une colline et le rétroviseur du véhicule. Plan de caméra embarquée : les vignes, la même église et un grand château perché sur le haut d’une montagne. Plan sombre et mouvement panoramique du bas vers le haut : une rue pavée, une grande tour avec des colombages, une horloge et un petit clocher. Même plan en plus clair. Mouvement panoramique sur les gens qui posent sur une grande fontaine sculptée d’armes médiévales, puis sur la tour aux colombages en plan rapproché. On descend l’escalier d’un bâtiment avec l’enseigne « Hôtel Restaurant ». On est ivre ou on feint de l’être. On salue la caméra. Avec Charles Veltz descend également l’homme en uniforme et chapeau. Un autre tombe presque dans l’escalier en rigolant. Les gens sortent d’un bâtiment sur une route pavée. Au-dessus de la porte un emblème : une tête de cheval blanc. Quatre hommes sortent à la queue leu leu et s’avancent de face vers la caméra. Plan fixe en contre-plongée d’un château médiéval perché sur une butte au-dessus des habitations. On chante bras-dessus bras-dessous et on chahute. On fait une ronde autour de la fontaine sur la place pavée. Les gens discutent devant l’autocar.
Contexte et analyse
Des Strasbourgeois visitent l’Alsace
En 1952, Charles Veltz profite d’une excursion du groupe strasbourgeois « Cinq cent Club ‘’d’Stindler » pour sortir sa caméra et capturer des images de hauts lieux touristiques locales. Le club se rassemble dans les rues de Strasbourg pour partir dans le vignoble alsacien. Le trajet emprunté sera officiellement nommé « Route du Vin d’Alsace » en mai 1953, soit un an après le tournage de ce film. Mais ce nom est sûrement déjà bien ancré dans l’inconscient collectif alsacien avant l’inauguration officielle de la route. Cette excursion est l’occasion de rencontres et de partages, mais contrairement à l’excursion du groupe filmée l’année précédente (voir Cinq cent Club Heiligenstein tourné en 1951), cette sortie est plutôt destinée aux adultes, très peu d'enfants sont visibles à l’écran.
Le groupe se rassemble d’abord sur la place Gutenberg de Strasbourg. On aperçoit ses « Grandes Arcades » caractéristiques ainsi que le restaurant « Zuem Stadtwappe » toujours en activité aujourd’hui. Les gens qui le composent semblent venir de quartiers différents de Strasbourg. Certains viennent de la Porte et de la Place de l’Hôpital comme on peut le constater au début de la séquence. La Rue d’Or qui la prolonge permet d’ailleurs au réalisateur de filmer un magnifique plan de la cathédrale de Strasbourg. D’autres personnes arrivent de la Rue des Serruriers qui mènent à la place Gutenberg. Un bâtiment est en travaux le long de cette rue. Il est possible qu’il s’agisse d’une reconstruction d’après-guerre encouragée par le plan Marshall signé en 1947.
Les gens qui composent le groupe sont apprêtés et se réunissent autour d’un autocar de la compagnie « Astra Voyages ». Là, Charles Veltz lui-même, une liste à la main, fait monter les personnes dans l'autocar. Cela laisse envisager qu'il organise sans doute l'excursion du groupe en collaboration avec la compagnie de transports. La société « Astra Voyages », autrement appelé « Société des Transports Automobiles Strasbourgeois » fut créée par la CTS (Compagnie des Tramways Strasbourgeois) en 1932. Elle avait pour vocation d’organiser des excursions à travers la région entière, mais également sur de grande distance en France et à l’étranger. L’autocar dans lequel rentre le groupe, et filmé par Charles Veltz est un véhicule Renault de type R2163. Flambant neuf, il fut acquis par la société en 1951, soit un an avant l’excursion filmée dans la séquence. En revanche, il disposait de peu de places (ce qui explique sûrement l'absence des enfants pour réduire le nombre de personnes qui partent en excursion).
Une excursion au début des Trente Glorieuses
La période de forte croissance économique de 1946 à 1975, rétrospectivement baptisée « Trente Glorieuses » par l’économiste Jean Fourastié, témoigne d’une évolution importante dans les comportements et les mœurs. En 1950, le salaire minimum est instauré et permet alors de garantir un minimum vital aux plus démunis. Tout au long de la période, les salaires nominaux augmentent de manière importante (+ 4,6% /an pour le salaire moyen de 1946 à 1976). Tandis que de nouveaux produits apparaissent sur un marché de plus en plus diversifié et large, la consommation s’envole. Ainsi, le taux d’équipement des foyers en voiture, en électroménager et en matériels audiovisuels s’accroit rapidement. En 1955, on dénombre une voiture pour quinze Français. Trente ans plus tard, en 1985, le ratio passe à une voiture pour trois Français. En 1952, 24.000 postes de télévision sont installés dans les ménages de l’Hexagone. En 1959, on en dénombrera 1,3 millions (J.-C. DAUMAS, La révolution matérielle …).
Autre dépense qui s’accroit dans le budget des ménages et dont le film témoigne, la part associée aux loisirs et à la culture passe de 6,3% en 1949 à 8,6% en 1974. L’offre de service proposée par la CTS, et utilisée par le club, est un parfait exemple de l’augmentation de la consommation de culture et de loisirs par les Français.
Dambach-la-Ville
La première étape du groupe est à Dambach-la-Ville, l’une des plus grandes communes viticoles d’Alsace. Ils passent notamment par la chapelle Saint-Sébastien, située aux milieux des vignes au Nord-Ouest de la ville. Il s’agissait de l’église paroissiale du village d’Oberkirch, dont la population fut absorbée au XIIIe siècle par le bourg fortifié. L’édifice, remanié plusieurs fois, daterait du XIIe siècle et fut un lieu de pèlerinage fréquenté.
Outre offrir un large point de vue sur la plaine d'Alsace, la chapelle comporte un ossuaire parmi ses grands intérêts touristiques. Celui-ci se situe dans une cave voûtée à son pied, d’où le groupe semble partir. Plusieurs hypothèses coexistent sur l’origine des ossements qu'elle contient. La population de Dambach avait pris part au Bundschuh de 1493 et à la Guerre des Paysans de 1525. Ces crises s’étaient terminées par une bataille qui tourna mal pour les paysans le 25 mai 1525 près de Scherwiller (localité peu éloignée). Selon la première proposition, les os seraient ceux des gens tombés lors de l'hécatombe. Autre hypothèse, les ossements pourraient être antérieurs à 1525 et simplement venir du cimetière de l’ancien village d’Oberkirch. À l’entrée de l’ossuaire, une inscription est notée à destination des visiteurs : « Ce que vous êtes, nous l’étions, Et ce que nous sommes, vous le deviendrez ».
Charles Veltz filme l’une des trois portes gothiques de la ville médiévale, derniers vestiges de l’enceinte épiscopale datant du XIVe siècle. La beauté de ses maisons à colombages attire les touristes, même locaux. Parfois, on la nomme la « Riquewihr » du Nord. En 1920, Dambach est renommée Dambach-la-Ville.
Orschwiller
Lors du trajet, filmé par le réalisateur, l’église Saint-Maurice d’Orschwiller apparaît à l’écran sur une colline de vignes. L’autocar semble en effet longer ce village viticole et touristique dont l’église néo-classique remonte à 1782. On le reconnaît en partie grâce au point de vue caractéristique vers le château du Haut-Koenigsbourg. L’histoire de la forteresse est liée à celle du village. Elle est d’ailleurs située sur son territoire communal. Outre montrer les localités touristiques alsaciennes de premier ordre, ces éléments montrent aux spectateurs que le groupe se dirige vers le Sud de l’Alsace, en direction de Ribeauvillé et Riquewihr, deux autres villes majeures de la culture alsacienne.
Riquewihr
Autre étape de l’excursion, le groupe s’arrête à Riquewihr, gros bourg viticole du Haut-Rhin. La localité est un haut lieu de visite en Alsace. Depuis longtemps, il y est entretenu une certaine animation et un « décor » afin que le village se présente comme la vitrine de l’Alsace.
Charles Veltz filme en contre-plongée un élément crucial du rempart : le Dolder, ou Porte Haute qui servait du XIIe au XVIe siècle. Ses colombages font directement échos à ceux des maisons ornées du bourg. Celui-ci dispose de nombreuses fontaines, dont l’une d’elle sert de sujet pour la caméra du réalisateur. En effet, Veltz filme la troupe qui pose devant la fontaine dite « Sinnbrunnen » à côté du Dolder, à la manière d’une photo de groupe pour immortaliser la journée. On y reconnaît les armes des anciens seigneurs de Wurtemberg et de Montbéliard, auxquels le village appartenait dès le XIVe siècle.
Ribeauvillé
Dernière étape de l’excursion, Ribeauvillé est la plus grande des localités visitées par le groupe. C’est là que le groupe se restaure, et y boit, car Ribeauvillé est également un lieu important de la viticulture, et ce, depuis le Moyen Âge. Difficile de savoir si le groupe est enivré ou s’il feint de l’être, sur cet escalier d’Hôtel-Restaurant. En tout cas, le réalisateur a voulu capturer ce moment pour montrer que l’on boit bien sur la route du vin.
La ville est connue pour ses nombreuses fêtes estivales : Fête du Kougelhopf en juin, Foire aux Vins en juillet, Fête des Ménétriers en septembre. Mais il semble que le groupe se soit rendu dans la ville à un autre moment.
Quelques éléments de la séquence nous permettent de situer l’endroit où se restaure le groupe. En effet, pour clore la séquence, Charles Veltz filme la sortie du groupe d’un Hôtel-Restaurant. Au-dessus de sa porte, un blason est visible. Le spectateur peut y remarquer une tête de cheval blanc. Plus tard, le groupe danse autour d’une fontaine. Sur ce même plan, un château est visible à l’arrière-plan. Il s’agit du Grand Ribeaupierre (autrement appelé Saint-Ulrich, ou Rappolstein), habitat des anciens seigneurs de Ribeaupierre, qui y exerçaient leur autorité jusqu’en 1673. Il ne fait donc aucun doute que l'établissement est le restaurant « Au cheval Blanc », toujours en activité aujourd’hui, et situé dans la Grand’Rue à côté de la « Fontaine de Ribeauvillé ».
Charles Veltz filme et semble mettre en scène des séquences de joie et de partage : on danse en ronde autour de la fontaine, on plaisante en sortant du restaurant. Si ce film capture de beaux souvenirs de groupe, peut-être pour encourager les activités de ce qui semble être un club, cette séquence ferait également un parfait court-métrage publicitaire pour les excursions de la compagnie « Astra Voyages ».
Lieux ou monuments
Bibliographie
Jean-Claude DAUMAS, La révolution matérielle : une histoire de la consommation : France XIXe – XXIe siècle, Paris, Flammarion, 2018.
C. LEIPP, F. LAMBACH, T. RIEGER, C. FRITZ, « Ribeauvillé » dans Agnès ACKER (dir.), Encyclopédie de l’Alsace, Vol. 11, Strasbourg, Editions Publitotal, 1985, p. 6419-6422.
Nicolas MENGUS et Jean-Michel RUDRAUF, Châteaux forts et fortifications médiévales d’Alsace dictionnaire d’histoire et d’architecture, Strasbourg, La Nuée Bleue, 2013, p. 264-266.
J.M. MONTAVON, P. FLUCK, T. RIEGER, M. DOERFLINGER, « Dambach-la-Ville » dans Agnès ACKER (dir.), Encyclopédie de l’Alsace, Vol. 4, Strasbourg, Editions Publitotal, 1983, p. 2222-2229.
J.M. MONTAVON, P. FLUCK, T. RIEGER, R. REINBOLD, « Orschwiller » dans Agnès ACKER (dir.), Encyclopédie de l’Alsace, Vol. 9, Strasbourg, Editions Publitotal, 1984, p. 5728-5730.
H. NONN, F. LAMBACH, T. RIEGER, etc., « Riquewihr » dans Agnès ACKER (dir.), Encyclopédie de l’Alsace, Vol. 11, Strasbourg, Editions Publitotal, 1985, p. 6458-6461.
D. RAY, « Ribeaupierre (Grand) » dans Agnès ACKER (dir.), Encyclopédie de l’Alsace, Vol. 11, Strasbourg, Editions Publitotal, 1985, p. 6416-6417.
Lucien SITTLER, La route du vin d’Alsace, Colmar-Ingersheim, Éditions SAEP, 1969.
Article rédigé par
Arthur Durand, 28 décembre 2019
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