Randonnée à la découverte des ruines du Griffon dans les Vosges (0021FN0002) : Différence entre versions
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|Description_fr=Toute une famille à la queue leu leu sur un chemin passant devant une maison, les hommes équipés avec de gros sac à dos. Passage devant un autre groupe de randonneurs. Un homme et un petit garçon posent assis sur les ruines du Greifenstein devant la caméra en se serrant la main. L’opérateur suit les ruines en montant et filme un autre homme et un jeune garçon posant et saluant. Retour sur le premier duo : le petit garçon se met le doigt de le nez avant de se faire reprendre par l’homme, sourires. Plan sur un homme souriant en chemise et bretelles. Pano droite gauche sur les montagnes alentours (un jeune homme de profil). Ruines du Griffon de haut en bas avec petit garçon assis. Tour (donjon ?) en ruine. Moment de détente au pied des ruines : toute la famille est allongée (restes de pique-nique) et pose. Le groupe marche sur un sentier arboré et salue l’opérateur. | |Description_fr=Toute une famille à la queue leu leu sur un chemin passant devant une maison, les hommes équipés avec de gros sac à dos. Passage devant un autre groupe de randonneurs. Un homme et un petit garçon posent assis sur les ruines du Greifenstein devant la caméra en se serrant la main. L’opérateur suit les ruines en montant et filme un autre homme et un jeune garçon posant et saluant. Retour sur le premier duo : le petit garçon se met le doigt de le nez avant de se faire reprendre par l’homme, sourires. Plan sur un homme souriant en chemise et bretelles. Pano droite gauche sur les montagnes alentours (un jeune homme de profil). Ruines du Griffon de haut en bas avec petit garçon assis. Tour (donjon ?) en ruine. Moment de détente au pied des ruines : toute la famille est allongée (restes de pique-nique) et pose. Le groupe marche sur un sentier arboré et salue l’opérateur. | ||
|Contexte_et_analyse_fr='''Les Vosges, nouvel espace de loisirs des citadins''' | |Contexte_et_analyse_fr='''Les Vosges, nouvel espace de loisirs des citadins''' | ||
− | Les Vosges deviennent à la fin du XIXe siècle grâce à l’extension du réseau ferroviaire secondaire un espace de loisirs pour les élites urbaines. Ces dernières partent à l’assaut de la montagne afin d’échapper aux nuisances de la ville et de prendre le « grand air », comme le prescrivent les discours hygiénistes de l’époque. La rupture avec la représentation classique de la nature proposée par les poètes romantiques du début du siècle a contribué à créer l’attrait de la montagne, non plus considérée comme milieu hostile mais comme espace pittoresque à découvrir. C’est à ce moment que la marche, pratiquée de tout temps par l’homme pour se déplacer, dans un but utilitaire donc, devient une activité de loisir populaire pour les citadins. Les associations jouent un rôle primordial dans la promotion du tourisme pédestre en Alsace, en particulier le Club Vosgien. Fondée en 1872 par un juge d’origine allemande, l’association se donne dès le départ pour mission de rendre la montagne accessible en créant, balisant et entretenant des sentiers de randonnée. Elle entreprend en outre de dégager des points de vue et de construire refuges et chalets pour accueillir les nouveaux visiteurs. L’excursion en montagne devient rapidement une pratique de loisir très appréciée des Alsaciens. Pour preuve, le Club Vosgien qui compte 8 000 membres en 1909, double quasiment ses effectifs en l’espace de trente ans, atteignant 15 000 membres en 1939<ref>RAUCH André (dir.), Sports et loisirs en Alsace au 20ème siècle, Revue EPS ; Strasbourg : Centre de recherches européennes en éducation corporelle, 1994, p.83</ref> . Bien qu’elle concerne surtout la petite bourgeoisie venue de Strasbourg avant la Seconde Guerre mondiale, cette activité dominicale se démocratise lentement avec l’arrivée de la voiture. Les Breesé constituent l’exemple typique de ces familles de la classe moyenne qui disposent d’une automobile et en profitent pour parcourir les Vosges les dimanches et jours fériés ensoleillés. Signe de la fréquentation croissante du massif avant la guerre, un autre groupe de randonneurs qui fait une halte au bord du chemin est visible au début de la séquence. | + | |
+ | Les Vosges deviennent à la fin du XIXe siècle grâce à l’extension du réseau ferroviaire secondaire un espace de loisirs pour les élites urbaines. Ces dernières partent à l’assaut de la montagne afin d’échapper aux nuisances de la ville et de prendre le « grand air », comme le prescrivent les discours hygiénistes de l’époque. La rupture avec la représentation classique de la nature proposée par les poètes romantiques du début du siècle a contribué à créer l’attrait de la montagne, non plus considérée comme milieu hostile mais comme espace pittoresque à découvrir. C’est à ce moment que la marche, pratiquée de tout temps par l’homme pour se déplacer, dans un but utilitaire donc, devient une activité de loisir populaire pour les citadins. Les associations jouent un rôle primordial dans la promotion du tourisme pédestre en Alsace, en particulier le Club Vosgien. Fondée en 1872 par un juge d’origine allemande, l’association se donne dès le départ pour mission de rendre la montagne accessible en créant, balisant et entretenant des sentiers de randonnée. Elle entreprend en outre de dégager des points de vue et de construire refuges et chalets pour accueillir les nouveaux visiteurs. L’excursion en montagne devient rapidement une pratique de loisir très appréciée des Alsaciens. Pour preuve, le Club Vosgien qui compte 8 000 membres en 1909, double quasiment ses effectifs en l’espace de trente ans, atteignant 15 000 membres en 1939<ref>RAUCH André (dir.), ''Sports et loisirs en Alsace au 20ème siècle'', Revue EPS ; Strasbourg : Centre de recherches européennes en éducation corporelle, 1994, p.83</ref> . Bien qu’elle concerne surtout la petite bourgeoisie venue de Strasbourg avant la Seconde Guerre mondiale, cette activité dominicale se démocratise lentement avec l’arrivée de la voiture. Les Breesé constituent l’exemple typique de ces familles de la classe moyenne qui disposent d’une automobile et en profitent pour parcourir les Vosges les dimanches et jours fériés ensoleillés. Signe de la fréquentation croissante du massif avant la guerre, un autre groupe de randonneurs qui fait une halte au bord du chemin est visible au début de la séquence. | ||
'''Un regard codifié sur la montagne''' | '''Un regard codifié sur la montagne''' | ||
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Emile Breesé nous donne à voir dans cette séquence une nature bien précise : celle que l’homme a aménagée depuis la fin du XIXe siècle. Son regard sur les montagnes vosgiennes est en effet codifié puisqu’il filme exactement ce que les sentiers balisés par le Club Vosgien amènent à contempler. Le caméraman porte d’abord son attention sur les sommets avoisinants à partir d’un point de vue dégagé. Grâce au mouvement lent de caméra de gauche à droite, il donne de l’ampleur, voire une certaine solennité, au paysage, que seul la tête d’un jeune de la famille vient perturber. Apparaissent ensuite les ruines du château du Griffon, aussi appelé château du Greifenstein, dont on admire le donjon dans un magnifique plan panoramique. Le mouvement de caméra de bas en haut et la prise de vue en contre-plongée contribuent en effet à accentuer l’impression de hauteur du donjon carré surplombant le rocher. Ce dernier se trouve être en fait le seul vestige du Petit-Greifenstein, château construit au XIIIe siècle en contrebas du Grand-Greifenstein érigé un siècle plus tôt. Leur classement au titre des Monuments historiques en 1898 a certainement contribué à faire connaître le site et à ce que le Club Vosgien balise des sentiers y menant. On a donc ici affaire à un caméraman averti qui sait construire l’image en choisissant les prises de vue et en les cadrant avec soin. Emile Breesé compose ainsi un regard pittoresque sur la nature qui vise à monumentaliser les Vosges et ses ruines médiévales. | Emile Breesé nous donne à voir dans cette séquence une nature bien précise : celle que l’homme a aménagée depuis la fin du XIXe siècle. Son regard sur les montagnes vosgiennes est en effet codifié puisqu’il filme exactement ce que les sentiers balisés par le Club Vosgien amènent à contempler. Le caméraman porte d’abord son attention sur les sommets avoisinants à partir d’un point de vue dégagé. Grâce au mouvement lent de caméra de gauche à droite, il donne de l’ampleur, voire une certaine solennité, au paysage, que seul la tête d’un jeune de la famille vient perturber. Apparaissent ensuite les ruines du château du Griffon, aussi appelé château du Greifenstein, dont on admire le donjon dans un magnifique plan panoramique. Le mouvement de caméra de bas en haut et la prise de vue en contre-plongée contribuent en effet à accentuer l’impression de hauteur du donjon carré surplombant le rocher. Ce dernier se trouve être en fait le seul vestige du Petit-Greifenstein, château construit au XIIIe siècle en contrebas du Grand-Greifenstein érigé un siècle plus tôt. Leur classement au titre des Monuments historiques en 1898 a certainement contribué à faire connaître le site et à ce que le Club Vosgien balise des sentiers y menant. On a donc ici affaire à un caméraman averti qui sait construire l’image en choisissant les prises de vue et en les cadrant avec soin. Emile Breesé compose ainsi un regard pittoresque sur la nature qui vise à monumentaliser les Vosges et ses ruines médiévales. | ||
|Bibliographie=CORBIN Alain « Les vacances et la nature revisitée (1830-1939) », dans : CORBIN Alain (dir.), ''L'avènement des loisirs : 1850-1960'', Paris, Flammarion, 2009 | |Bibliographie=CORBIN Alain « Les vacances et la nature revisitée (1830-1939) », dans : CORBIN Alain (dir.), ''L'avènement des loisirs : 1850-1960'', Paris, Flammarion, 2009 |
Version du 27 février 2019 à 09:38
Résumé
Description
Toute une famille à la queue leu leu sur un chemin passant devant une maison, les hommes équipés avec de gros sac à dos. Passage devant un autre groupe de randonneurs. Un homme et un petit garçon posent assis sur les ruines du Greifenstein devant la caméra en se serrant la main. L’opérateur suit les ruines en montant et filme un autre homme et un jeune garçon posant et saluant. Retour sur le premier duo : le petit garçon se met le doigt de le nez avant de se faire reprendre par l’homme, sourires. Plan sur un homme souriant en chemise et bretelles. Pano droite gauche sur les montagnes alentours (un jeune homme de profil). Ruines du Griffon de haut en bas avec petit garçon assis. Tour (donjon ?) en ruine. Moment de détente au pied des ruines : toute la famille est allongée (restes de pique-nique) et pose. Le groupe marche sur un sentier arboré et salue l’opérateur.
Contexte et analyse
Les Vosges, nouvel espace de loisirs des citadins
Les Vosges deviennent à la fin du XIXe siècle grâce à l’extension du réseau ferroviaire secondaire un espace de loisirs pour les élites urbaines. Ces dernières partent à l’assaut de la montagne afin d’échapper aux nuisances de la ville et de prendre le « grand air », comme le prescrivent les discours hygiénistes de l’époque. La rupture avec la représentation classique de la nature proposée par les poètes romantiques du début du siècle a contribué à créer l’attrait de la montagne, non plus considérée comme milieu hostile mais comme espace pittoresque à découvrir. C’est à ce moment que la marche, pratiquée de tout temps par l’homme pour se déplacer, dans un but utilitaire donc, devient une activité de loisir populaire pour les citadins. Les associations jouent un rôle primordial dans la promotion du tourisme pédestre en Alsace, en particulier le Club Vosgien. Fondée en 1872 par un juge d’origine allemande, l’association se donne dès le départ pour mission de rendre la montagne accessible en créant, balisant et entretenant des sentiers de randonnée. Elle entreprend en outre de dégager des points de vue et de construire refuges et chalets pour accueillir les nouveaux visiteurs. L’excursion en montagne devient rapidement une pratique de loisir très appréciée des Alsaciens. Pour preuve, le Club Vosgien qui compte 8 000 membres en 1909, double quasiment ses effectifs en l’espace de trente ans, atteignant 15 000 membres en 1939[2] . Bien qu’elle concerne surtout la petite bourgeoisie venue de Strasbourg avant la Seconde Guerre mondiale, cette activité dominicale se démocratise lentement avec l’arrivée de la voiture. Les Breesé constituent l’exemple typique de ces familles de la classe moyenne qui disposent d’une automobile et en profitent pour parcourir les Vosges les dimanches et jours fériés ensoleillés. Signe de la fréquentation croissante du massif avant la guerre, un autre groupe de randonneurs qui fait une halte au bord du chemin est visible au début de la séquence.
Un regard codifié sur la montagne
Emile Breesé nous donne à voir dans cette séquence une nature bien précise : celle que l’homme a aménagée depuis la fin du XIXe siècle. Son regard sur les montagnes vosgiennes est en effet codifié puisqu’il filme exactement ce que les sentiers balisés par le Club Vosgien amènent à contempler. Le caméraman porte d’abord son attention sur les sommets avoisinants à partir d’un point de vue dégagé. Grâce au mouvement lent de caméra de gauche à droite, il donne de l’ampleur, voire une certaine solennité, au paysage, que seul la tête d’un jeune de la famille vient perturber. Apparaissent ensuite les ruines du château du Griffon, aussi appelé château du Greifenstein, dont on admire le donjon dans un magnifique plan panoramique. Le mouvement de caméra de bas en haut et la prise de vue en contre-plongée contribuent en effet à accentuer l’impression de hauteur du donjon carré surplombant le rocher. Ce dernier se trouve être en fait le seul vestige du Petit-Greifenstein, château construit au XIIIe siècle en contrebas du Grand-Greifenstein érigé un siècle plus tôt. Leur classement au titre des Monuments historiques en 1898 a certainement contribué à faire connaître le site et à ce que le Club Vosgien balise des sentiers y menant. On a donc ici affaire à un caméraman averti qui sait construire l’image en choisissant les prises de vue et en les cadrant avec soin. Emile Breesé compose ainsi un regard pittoresque sur la nature qui vise à monumentaliser les Vosges et ses ruines médiévales.Lieux ou monuments
Bibliographie
CORBIN Alain « Les vacances et la nature revisitée (1830-1939) », dans : CORBIN Alain (dir.), L'avènement des loisirs : 1850-1960, Paris, Flammarion, 2009
RICHEZ Jean-Claude, « Les Vosges comme espace de loisir au XIXe siècle », dans : RAUCH André (dir.), Sports et loisirs en Alsace au 20ème siècle, Revue EPS ; Strasbourg : Centre de recherches européennes en éducation corporelle, 1994, p.91-102
RICHEZ Jean-Claude, STRAUSS Léon, « Promenades et excursions dominicales des ouvriers alsaciens avant la Seconde Guerre mondiale », dans : RAUCH André (dir.), Sports et loisirs en Alsace au 20ème siècle, Revue EPS ; Strasbourg : Centre de recherches européennes en éducation corporelle, 1994, p.79-89
RICHEZ Jean-Claude, STRAUSS Léon, « Tradition et renouvellement des pratiques de loisirs en milieu ouvrier dans l’Alsace des années 1930 », Revue d’Alsace, n°113, 1987, Strasbourg, p.217-237
HUCK Joseph Louis (dir.), Les Vosges et le Club Vosgien : autour d’un centenaire, 1872-1972, Strasbourg, Club Vosgien, 1972 Cent ans du Club vosgien, du Grand au Petit Ballon : histoire, étymologie, géologie, économie, botanique, Club Vosgien, Guebwiller, 1972
-« Le château de Greifenstein », Châteaux forts Alsace, Disponible en ligne : https://www.chateauxfortsalsace.com/fr/chateau/chateau-de-greifenstein/ [consulté le 10/02/2019]
Article rédigé par
Amélie Kratz, 20 février 2019