D'une ville à l'autre (0068FN0012) : Différence entre versions

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|Resume_fr=Voyage commenté de Mulhouse à Belfort par le train et la route en 1947. Alex Schwobthaler passe par Zillisheim, Illfurth, Altkirch, Ballersdorf et Pérouse. Il filme les paysages naturels, l'activité industrielle et agricole, le patrimoine religieux et les monuments relatifs aux trois guerres contre l'Allemagne.
 
|Resume_fr=Voyage commenté de Mulhouse à Belfort par le train et la route en 1947. Alex Schwobthaler passe par Zillisheim, Illfurth, Altkirch, Ballersdorf et Pérouse. Il filme les paysages naturels, l'activité industrielle et agricole, le patrimoine religieux et les monuments relatifs aux trois guerres contre l'Allemagne.
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« Idyllique » : le terme revient plusieurs fois dans les cartons rédigés par le cinéaste amateur à la suite de son voyage avec son épouse Gil. Volontiers facétieux, il est peu avare de clins d’œil à son public, qui aura noté que le mot inclut le nom de la principale rivière alsacienne, l’Ill. La caméra s’attarde longuement sur les panoramas qu’offre le sud de l’Alsace, une région qu’il a souvent parcourue avant-guerre pour son activité de photographe. On note une prédilection pour l’horizon brumeux de Vosges, les grandes futaies d’arbres anciens, les branches à contre-jour qui viennent souligner le choix du cadre. Les essais d’effets visuels sur le cours de l’Ill suggèrent un rapport très pictural, souvent naturaliste, aux paysages visités.
 
« Idyllique » : le terme revient plusieurs fois dans les cartons rédigés par le cinéaste amateur à la suite de son voyage avec son épouse Gil. Volontiers facétieux, il est peu avare de clins d’œil à son public, qui aura noté que le mot inclut le nom de la principale rivière alsacienne, l’Ill. La caméra s’attarde longuement sur les panoramas qu’offre le sud de l’Alsace, une région qu’il a souvent parcourue avant-guerre pour son activité de photographe. On note une prédilection pour l’horizon brumeux de Vosges, les grandes futaies d’arbres anciens, les branches à contre-jour qui viennent souligner le choix du cadre. Les essais d’effets visuels sur le cours de l’Ill suggèrent un rapport très pictural, souvent naturaliste, aux paysages visités.
  
Si nombre de plans se focalisent sur une nature apparemment intacte ou sur des bâtiments isolés, Schwobthaler prend aussi soin de faire vivre ces lieux en incluant dès que possible des personnages - une démarche déjà sensible dans ''Ça, c'est chez nous!'', sa première réalisation en 1937 (0068FN0001). À plusieurs reprises, il filme les animaux domestiqués par l’homme – bovins, chèvre, chevaux – et les activités agricoles, dont les moissons permettant de préciser la date de tournage : sans doute la fin de l’été 1947. L’idylle, c’est donc celle de l’Arcadie chantée par Virgile, et qui fait de l’Alsace une terre d’abondance généreuse avec l’homme qui vit en paix : promeneurs, cyclistes, pêcheurs, amateurs de loisirs nautiques, paysans allant au rythme des saisons et du pas des bœufs. Cette paix, nous révèle petit à petit le cinéaste, est une paix récemment retrouvée.
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Si nombre de plans se focalisent sur une nature apparemment intacte ou sur des bâtiments isolés, Schwobthaler prend aussi soin de faire vivre ces lieux en incluant dès que possible des personnages - une démarche déjà sensible dans ''[[Ça!_C'est_chez_nous_(0068FN0001)]]'', sa première réalisation en 1937. À plusieurs reprises, il filme les animaux domestiqués par l’homme – bovins, chèvre, chevaux – et les activités agricoles, dont les moissons permettant de préciser la date de tournage : sans doute la fin de l’été 1947. L’idylle, c’est donc celle de l’Arcadie chantée par Virgile, et qui fait de l’Alsace une terre d’abondance généreuse avec l’homme qui vit en paix : promeneurs, cyclistes, pêcheurs, amateurs de loisirs nautiques, paysans allant au rythme des saisons et du pas des bœufs. Cette paix, nous révèle petit à petit le cinéaste, est une paix récemment retrouvée.
  
 
'''Une histoire dramatique'''
 
'''Une histoire dramatique'''
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Plus on approche du Territoire, en effet, plus affleurent les signaux de l’histoire militaire des dernières décennies. À la sortie d’Altkirch se dresse un monument involontaire : la carcasse du char Sherman du 4e escadron de la 2e RC, victime d’un obus antichar le 21 novembre 1944 lors de la libération de la ville<ref>https://www.chars-francais.net/2015/index.php/classement-individuel/m-4-sherman?task=view&id=1078</ref>.
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Plus on approche du Territoire, en effet, plus affleurent les signaux de l’histoire militaire des dernières décennies. À la sortie d’Altkirch se dresse un monument involontaire : la carcasse du char Sherman du 4e escadron de la 2e RC, victime d’un obus antichar le 21 novembre 1944 lors de la libération de la ville<ref>https://www.chars-francais.net/2015/index.php/classement-individuel/m-4-sherman?task=view&id=1078</ref>. Il est resté quelques temps gisant sur le bas-côté, visité par les passants, avant d'être déplacé et érigé en symbole local de l’âpre lutte avec la Wehrmacht pour le contrôle de l’Alsace et du Rhin.
Il est resté quelques temps gisant sur le bas-côté, visité par les passants, avant d'être déplacé et érigé en symbole local de l’âpre lutte avec la Wehrmacht pour le contrôle de l’Alsace et du Rhin.
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Plus loin, plus tragique, le village de Ballersdorf que Schwobthaler affectionne car trois ans plus tôt, il y a entendu pour la première fois le dialecte alsacien du Sundgau de retour après la guerre. Et on lui a sans doute narré alors l’histoire de ces 18 jeunes ayant tenté de fuir l’incorporation en partant de nuit pour la Suisse le 12 février 1943. Finalement arrêtés après qu’une patrouille les a surpris et tués trois d’entre eux, 14 passent en procès et sont fusillés au Struthof le 17 février. Pour l’exemple, on ne peut plus clair. Le viaduc de la Largue a lui été détruit à quatre reprises, notamment pendant la Première Guerre mondiale, et reconstruit à chaque fois.  
Plus loin, plus tragique, le village de Ballersdorf que Schwobthaler affectionne car trois ans plus tôt, il y a entendu pour la première fois le dialecte alsacien du Sundgau de retour après la guerre. Et on lui a sans doute narré alors l’histoire de ces 18 jeunes ayant tenté de fuir l’incorporation en partant de nuit pour la Suisse le 12 février 1943. Finalement arrêtés après qu’une patrouille les a surpris et tués quatre d’entre eux, ils passent en procès et sont fusillés au Struthof le 17 février. Pour l’exemple, on ne peut plus clair. Le viaduc de la Largue a lui été détruit quatre fois, notamment pendant la Première Guerre mondiale, et reconstruit à chaque fois.  
 
  
Enfin, à Belfort, quatre monuments écrivent l’histoire de cette ville assiégée quatre fois et sans cesse bombardée. Le monument aux morts de la Grande Guerre, ensemble sculpté de tonalité très patriotique dû à Georges Vérez, a été inauguré le 27 novembre 1920 en l’honneur des Belfortains morts pour la France, représente toutes les armes dans lesquelles ils ont servi. En 1928, l’entrée du square du Souvenir a été doté d’une statue de Poilu financée par souscription privée. Si Schwobthaler n’a pas filmé, voire pas rendu visite au Monument des trois sièges de Belfort réalisé en 1913 par l’Alsacien Auguste Bartholdi, il n’a pu manquer deux monuments ancrés dans la culture locale : la statue « Quand même » et le Lion sculpté à flanc de colline par le Bartholdi entre 1875 et 1880. La première, réalisée par Antonin Mercié (1845-1916) en mémoire de la résistance de la ville et du territoire, seule portion de l’Alsace a être restée française après la défaite de 1870, représente une Alsacienne à coiffe soutenant d’une main un soldat blessé, reprenant de l’autre son fusil en signe de résistance. Le Lion réalisé en blocs de grès rose de Pérouse surplombe la ville du haut de ses 11 mètres, à l’à-pic de la falaise défendant le château. Rompant avec la gravité de cette histoire, le cinéaste fait un pied de nez au noble animal symbolique de puissance en montant son profil en alternance avec celui de sa femme. Il prend aussi soin de filmer les touristes qui viennent voir un haut-relief exceptionnel, et n’hésitent pas aussi à l’escalader pour profiter du panorama.
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Enfin, à Belfort, quatre monuments écrivent l’histoire de cette ville assiégée quatre fois et sans cesse bombardée. Le monument aux morts de la Grande Guerre présente un ensemble sculpté de tonalité très patriotique dû à Georges Vérez (1877-1933). Inauguré le 27 novembre 1920 en l’honneur des Belfortains morts pour la France, il représente toutes les armes dans lesquelles ils ont servi. En 1928, l’entrée du square du Souvenir aménagé pour le monument a été dotée de la Statue de Poilu financée par souscription privée. Si Schwobthaler n’a pas filmé, voire pas rendu visite au Monument des trois sièges de Belfort réalisé en 1913 par l’Alsacien Auguste Bartholdi (1834-1904), il n’a pu manquer deux monuments ancrés dans la culture locale : la statue « Quand même » et le Lion érigé par Bartholdi entre 1875 et 1880. La première a été conçue en mémoire de la résistance de la ville et du territoire, seule portion de l’Alsace a être restée française après la défaite de 1870.  Antonin Mercié (1845-1916) a sculpté une Pietà de guerre, une Alsacienne à coiffe soutenant d’une main un soldat mobile blessé, reprenant de l’autre son fusil et le combat. Le Lion réalisé en blocs de grès rose de Pérouse surplombe la ville du haut de ses 11 mètres, à l’à-pic de la falaise défendant le château. Rompant avec la gravité de cette histoire, le cinéaste fait un pied de nez au noble animal symbole de puissance en montant son profil en alternance avec celui de sa femme. Il prend aussi soin de filmer les touristes qui viennent voir un haut-relief exceptionnel, et n’hésitent pas à l’escalader pour profiter du panorama.
  
 
'''Un art du mouvement'''  
 
'''Un art du mouvement'''  
  
Cette mobilité du regard et des points de vue rend le film particulièrement dynamique. Les transports fournissent à la fois les moyens de se déplacer et des transitions entre étapes (le train filmé au ras des voies) ou entre plans (voitures, bicyclettes). Cette manière de filmer n’est pas sans rappeler le style soviétique que le cinéaste amateur a peut-être découvert en salles avant ou après-guerre. Dans les plans réalisés à la cimenterie d’Altkirch, le ballet des wagonnets suspendus dans un cadre saturé de lignes géométrique rappelle l’esthétique constructiviste. Une influence allemande, celle de la Symphonie d’une ville de Walter Ruttmann ou du Métropolis de Fritz Lang, tous deux sortis en 1926, n’est pas non plus à exclure. La séquence des éclusiers et de la péniche, liant l’eau et le métal, la puissance mécanique et la force humaine, s’inscrit dans la série des documentaires en milieu urbain et professionnel des années 1930. Trois regards se mêlent donc dans ce court métrage : celui du reporter fin connaisseur de sa région, toujours à l’affût de belles images, celui de l’Alsacien à la biographie chahutée par l’histoire récente, et celui de l’opérateur qui, armé d’une simple Pathé baby, s’amuse à imiter les maîtres du grand cinéma.
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Cette mobilité du regard et des points de vue rend le film particulièrement dynamique. Les transports fournissent à la fois les moyens de se déplacer et des transitions entre étapes (le train filmé au ras des voies) ou entre plans (voitures, bicyclettes). Cette manière de filmer n’est pas sans rappeler le style soviétique que le cinéaste amateur a peut-être découvert en salles, avant ou après-guerre. Dans les plans réalisés à la cimenterie d’Altkirch, le ballet des wagonnets suspendus dans un cadre saturé de lignes géométrique confine à l’esthétique constructiviste. Une influence allemande, celle de la ''Symphonie d’une ville'' de Walter Ruttmann ou du ''Métropolis'' de Fritz Lang, tous deux sortis en 1926, n’est pas non plus à exclure. La séquence des éclusiers et de la péniche, liant l’eau et le métal, la puissance mécanique et la force humaine, s’inscrit dans la série des documentaires en milieu urbain et professionnel des années 1930. Trois regards se mêlent donc dans ce court métrage : celui du reporter fin connaisseur de sa région, toujours à l’affût de belles images, celui de l’Alsacien à la biographie chahutée par l’histoire récente, et celui de l’opérateur qui, armé d’une simple Pathé baby, s’amuse à imiter les maîtres du grand cinéma.
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|Contexte_et_analyse_de=<big>'''Von einer Stadt zur anderen'''</big>
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Seit weniger als drei Jahren war das Elsass von der deutschen Besatzung befreit. Zwar hatte die Besetzung diesmal nur vier Jahre gedauert, aber sie war besonders schmerzhaft. Die konstante politische Unterdrückung unter der Naziherrschaft, mit Internierungen im KZ Natzweiler-Struthof, brutaler Enteignung und Vertreibung der Juden, Zwangsrekrutierung der jungen Männer in die Wehrmacht und Kollaboration hinterließen tiefe Wunden. Die Region wurde durch die Bomben der Alliierten zerstört, die Bevölkerung fühlte sich wegen der Beteiligung der zwangsrekrutierten Elsässer in der Waffen-SS, den sogenannten „Malgré-nous“, an der Zerstörung von Oradour-sur-Glane gebrandmarkt. Das Elsass war innerhalb von 75 Jahren Schauplatz von drei Kriegen, ein riesiges Schlachtfeld unter freiem Himmel. Hier entwickelte sich ein einzigartiges Gedenken an die deutsche Zeit und die französischen Bemühungen, dieses Gebiet, das seit Ludwig XIV. zu Frankreich gehörte und zu einer Grenzregion geworden war, Stück für Stück „zurückzuerobern“.
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Alex Schwobthaler (1914-2002) war Teil dieser Geschichte. Dieser Fotograf und Reporter der Vorkriegszeit war ein Reisender, den die Geschichte eingeholt hat. Er wurde 1939 in der Nähe von Lyon eingezogen, desertierte, während sich die Niederlage der französischen Armee abzeichnete und kehrte nach Hause zurück. 1943 wurden die Männer der annektierten Region vom NS-Regime zwangsrekrutiert und an die russische Front geschickt. Im Sommer 1944 wurde er nach Paris und dann in die Normandie versetzt, wo er von amerikanischen Soldaten gefangen genommen wurde. Nach einem Aufenthalt in zwei verschiedenen  Gefangenenlagern wurde er von Abgesandten von De Gaulle in die freien französischen Streitkräfte rekrutiert. Befreit, weil er über 30 Jahre alt war, kehrte er 1945 in eine Region zurück, die gerade zurückerobert worden war, nahm seine Dreharbeiten wieder auf und wurde  Filmvorführer in seinem Dorf Zillisheim.
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'''Eine „idyllische“ Landschaft'''
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„Idyllisch“: Dieser Begriff taucht mehrmals in den Kartons auf, die der Hobbyfilmer nach seiner Reise mit seiner Frau Gil beschriftet hat. Die Kamera verweilt lange Zeit auf den Panoramen des südlichen Elsass, einer Region, die er vor dem Krieg oft als Fotograf bereist hatte. Man bemerkt eine Vorliebe für den nebligen Horizont der Vogesen, die großen Wälder mit alten Bäumen, die Zweige im Gegenlicht, die das gewählte Motiv umrahmen. Die versuchten visuellen Effekte an der Ill  deuten auf eine sehr malerische, oft naturalistische Beziehung zu den besuchten Landschaften hin. Schwobthaler achtete auch darauf, diese Orte lebendig erscheinen zu lassen, indem er immer wenn möglich Personen einbezog. Er filmte die vom Menschen domestizierten Tiere  - Rinder, Ziegen, Pferde - und landwirtschaftliche Aktivitäten, darunter die Ernten, die eine Datierung des Films auf das Ende des Sommers 1947 zulassen. Der Filmer zeigt das von Virgil besungene Arkadien, das Elsass als ein Land großzügiger Fülle für die in Frieden lebenden Menschen: Wanderer, Radfahrer, Angler, Wassersportler, Bauern, die im Rhythmus der Jahreszeiten und im Tempo der Ochsen leben. Dieser Frieden, so enthüllt uns der Film allmählich, ist ein erst seit kurzem gefundener Frieden.
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'''Eine dramatische Geschichte'''
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Der Film beginnt mit der Freude der Reisenden im Bahnhof Mulhouse und endet mit der Freude der Touristen, darunter Gil Schwobthaler, beim Besuch des Löwen von Belfort. Im Laufe des Films entsteht eine Kulturgeschichte der Region, die sich an den Kirchengebäuden aus dem Mittelalter und der Renaissance orientiert: Burnkirch-Kapelle, Priorat Saint Morand, einfache Dorfkirchen. Für die Gestaltung des achteckigen Beckens des Brunnens der Jungfrau von Altkrich (1857) wurde der Stil der Spätgotik kopiert. Diese religiösen Gebäude, die teilweise noch geweiht sind, haben eine wichtige soziale Funktion: Unterricht am Bischofskolleg Zillisheim seit 1866, Krankenhaus in Altkirch seit 1828.
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Je näher wir dem Territoire de Belfort kommen, desto sichtbarer werden die Zeichen der Militärgeschichte der letzten Jahrzehnte. An der Ausfahrt von Altkirch steht ein unfreiwilliges Denkmal: das Wrack des Sherman-Panzers der 4. Schwadron des 2. Jägerregiments, der bei der Befreiung der Stadt am 21. November 1944 einer Panzergranate zum Opfer gefallen war. Er blieb lange Zeit das lokale Symbol für den erbitterten Kampf mit der Wehrmacht um die Kontrolle des Elsass und des Rheins. Noch tragischer ist die Geschichte des Dorfes Ballersdorf, das Schwobthaler liebt, weil er dort drei Jahre zuvor nach seiner Rückkehr aus dem Krieg zum ersten Mal wieder den elsässischen Dialekt des Sundgau gehört hatte. Und wahrscheinlich war ihm die Geschichte der 18 Jugendlichen erzählt worden, die versucht hatten, der Zwangsrekrutierung zu entfliehen und in der Nacht vom 12. Februar 1943 in die Schweiz aufgebrochen waren. Sie wurden von einem Spähtrupp überrascht, vier von ihnen wurden getötet, die anderen verhaftet und vor Gericht gebracht. Am 17. Februar wurden sie im Lager Struthof erschossen. Man hätte kein deutlicheres Exempel statuieren können.
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In Belfort schließlich schreiben vier Denkmäler die Geschichte dieser viermal belagerten und unentwegt bombardierten Stadt. Das Denkmal für die Toten des Ersten Weltkriegs, ein sehr patriotisches Werk des Bildhauers Georges Vérez, wurde am 27. November 1920 zu Ehren der für Frankreich gefallenen Belforter eingeweiht. 1928 wurde der Eingang zum Gedenkplatz mit einer privat finanzierten Soldatenstatue geschmückt. Zwar hat Schwobthaler das 1913 vom elsässischen Künstler Auguste Bartholdi geschaffene Denkmal der drei Belagerungen von Belfort nicht gefilmt, aber die Statue „Quand même“ und den von Bartholdi zwischen 1875 und 1880 aus Stein direkt am Berg gemauerten Löwen konnte er nicht übersehen. Die Statue, die von Antonin Mercié (1845-1916) zum Gedenken an den Widerstand der Stadt und des Gebiets, des einzigen Teils des Elsass, der nach der Niederlage von 1870 französisch geblieben war, realisiert worden war, stellt eine elsässische Frau mit einer typischen Kopfbedeckung dar, die mit einer Hand einen verwundeten Soldaten hält und mit der anderen Hand ihr Gewehr als Zeichen des Widerstands ergreift. Der Löwe aus rosa Sandsteinblöcken aus Pérouse überragt die Stadt mit seinen 11 Metern Höhe am Fuße des Felsens und verteidigt die Zitadelle. Der Filmer bricht mit dem schweren Ernst dieser Geschichte und macht sich ein bisschen lustig über das edle Tier, das Symbol der Macht, indem er dessen Profil abwechselnd mit dem seiner Frau zeigt. Er filmt auch die Touristen, die dieses außergewöhnliche Hochrelief besichtigen und sogar am Kunstwerk hochklettern, um das Panorama zu genießen.
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'''Eine Kunst der Bewegung'''
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Diese Beweglichkeit des Blicks und der Blickwinkel verleiht dem Film eine besondere Dynamik. Die Verkehrsmittel werden sowohl als Fortbewegungsmittel genutzt als auch als Motive für die Übergänge zwischen den Etappen (Filmaufnahme des Zugs auf Höhe der Gleise) oder zwischen den Aufnahmen (Autos, Fahrräder). In den Aufnahmen am Zementwerk Altkirch erinnert das Ballett der Hängewagen in einer mit geometrischen Linien gesättigten Bildeinstellung an die konstruktivistische Ästhetik. Die Sequenz mit den Schleusenwärtern und  dem Lastkahn, die Wasser und Metall, mechanische Kraft und menschliche Stärke miteinander verbindet, entspricht dem Stil der Dokumentarfilme in städtischen und industriellen Umgebungen der 1930er Jahre. In diesem Kurzfilm vermischen sich drei Perspektiven: die des Reporters, der ein profunder Kenner seiner Region und immer auf der Suche nach schönen Bildern ist, die des Elsässers mit einer von der jüngeren Geschichte gezeichneten Biographie und die des Filmers, der mit einer einfachen Pathé-Baby Spaß daran hat, die Meister des Kinofilms nachzuahmen.
 
|Bibliographie=Odile Gozillon-Fronsacq, "Le regard d'Alex", ''Saisons d'Alsace'', 1999???
 
|Bibliographie=Odile Gozillon-Fronsacq, "Le regard d'Alex", ''Saisons d'Alsace'', 1999???
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|descripteurs=Train; Édifices religieux; Armement; Monument aux morts; Monument historique; Travaux agricoles; Usine
 
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Version actuelle datée du 14 mars 2019 à 22:54

Résumé


Voyage commenté de Mulhouse à Belfort par le train et la route en 1947. Alex Schwobthaler passe par Zillisheim, Illfurth, Altkirch, Ballersdorf et Pérouse. Il filme les paysages naturels, l'activité industrielle et agricole, le patrimoine religieux et les monuments relatifs aux trois guerres contre l'Allemagne.

Description


Départ d’un train en gare (le chef de gare siffle). Sur fond de train en marche, apparaissent les cartons suivants :

« Les actualités REX présentent »

« D’une ville à l’autre » (avec deux clochers dessinés) »

« Découpage et prises de vues Alex Schwobthaler »

« Assistant photographique Gil Schwobthaler »

La locomotive filmée en plan rapprochée passe avec le mécanicien à la porte. Les wagons avec les passagers à la fenêtre faisant signe de la main. Les voies à la sortie de Mulhouse.

« Nous longeons le Canal du Rhône au Rhin… »

Le train en perspective filmé par la fenêtre. Le train et son panache de fumée passe en ombre chinoise sur le ciel.

« … et atteignons le Séminaire de Zillisheim, dans son cadre de verdure. »

Le séminaire (panoramique rapide vers le haut. Un homme passe en kayak avec un enfant à bord. Des pêcheurs au bord du canal. Des Canards nagent. Une péniche passe. Une barque avec trois jeunes gens. Un tracteur passe sur le chemin de halage. Plan large du canal avec le tracteur, la péniche et le Séminaire. Plan serré sur les portes de l’écluse laissant apsser l’eau. L’éclusière actionne les portes. La péniche "Anerbach" s’avance, filmée en plongée. Gros plan sur l’eau qui monte. La péniche et l’éclusier actionnant les portes. Le train filmé à ras des voies dépasse la caméra sur la droite.

« Plus loin, vers Illfurth, la vieille église du Burn, poétique et solitaire… »

La Chapelle du Burnkirch vue depuis le chemin y menant ; une femme et un homme à bicyclette arrivent de derrière la caméra ; deux femmes se promènent près de l’église, léger recadrage sur la gauche et vers le haut pour capter à la fois le bâtiment et les personnages. Panoramique droit sur la toiture. Plan fixe sur la façade, les deux femmes franchissent la porte ouverte ; panoramique gauche vers le clocher. Le train filmé en contre-plongée à ras des voies dépasse la caméra sur la gauche. À ras des voies, les wagons passent vers la droite de l’écran. Reflet d’un bovin dans l’eau, plan de bovins dans un pré.

« Et partout l’Ill, sinueuse et cristalline, reflète les chromes de ce coin de France. »

Reflets du soleil sur l’eau (douze plans avec mouvement de caméra), effets visuels, canards, ajoncs, propagation d’une onde. Panoramique droit sur la plaine embrumée. Un pêcheur lance sa ligne. Panoramique sur une église, arbres fruitiers au premier plan, apparaît un homme et son char à bœuf, deux cyclistes au dernier plan. Images tournées depuis le train. Le train passe en contrebas d’une église. Plan de travers d’une usine et de ses deux immenses cheminées. « SA des chaux et ciments Portland du Haut-Rhin ». Les cheminées et les lignes électriques. Les wagonnets du téléphérique de l’usine filmés d’en dessous (trois plans). La fontaine de la Vierge à Altkirch ; gros plans sur le griffon et le (robinet). Gros plan sur un écusson sculpté : « Anno Domini 1857 ». Des enfants jouent autour de la fontaine. Plan vers le bas sur une maison étroite au-dessus d’un passage où se faufile un char à bœuf. Un homme s’engage, filmé depuis le passage.

« Non loin d’Altkirch, l’Hospice St Morand, dans son décor idyllique, plein de fraîcheur. »

Plan sur le clocher ; reflet d’un bâtiment sur un étang ; des hommes bavardent dans une rue ; plan rapproché sur les trois qui sont assis, plutôt âgés.

« La guerre aussi a passé par là ! »

Un char d’assaut échoué sur le bord d’une route. Plan sur la tourelle. Plan sur le flanc avec l’inscription : « St-Quentin/Fidèle à son poste même dans la mort ». Des vaches et leurs gardiens passent sur un chemin en terre. Panoramique gauche : frondaisons, clocher.

« Laissant le train poursuivre sa course… »

L’Hospice Saint Morand filmé depuis le train en marche.

« Je quittai Altkirch par la route. La nature était trop belle et l’air si pur ! »

Plan de la route avec Altkirch au loin, une voiture dépasse la caméra à droite. Panoramique droite sur l’horizon des Vosges, nuages dans le ciel.

« … me voici bientôt à BALLERSDORF VILLAGE MARTYR »

Plan général de l’horizon du village avec le clocher.

« ICI 14 JEUNES GENS FURENT VICTIMES DE LA GESTAPO… » ; le carton comporte le dessin de trois croix chrétiennes.

La rue principale du village avec des personnes marchant de dos. Une chèvre attachée mâche de l’herbe dans un pré. Le train passe sur le viaduc de la Largue près de Dannemarie en ombre chinoise. Même plan pris de l’autre côté du viaduc sous un arbre, court panoramique droite.

« Toujours par la route, j’approche de Belfort. Région fertile, paysages idylliques. »

Viaduc à l’arrière plan avec un train qui passe ; au premier plan, une charrette de blés s’avance tirée par deux chevaux et leur guide. Les meules de blé dans un champ. Plan en contre-plongée sur les épis de blé agités par le vent. Panoramique gauche sur le paysage de la vallée avec les Vosges au dernier plan. Un panneau routier annonce « Territoire de Belfort. N19. BESSONCOURT 7. BELFORT 14 ». Panoramique gauche sur une étendue d’eau. Une croix de pierre.

« Ce charmant village c’est PEROUSE. »

Le clocher. L’église à partir d’un jardin.

« Place forte, cette ville au nom glorieux est également un centre commercial… »

Rue de Belfort, circulation urbaine, cyclistes, passants le long des vitrines. Façade du syndicat d’initiative. Plan sur un rémouleur. Un tramway franchit un carrefour.

« Mais un peu partout la main du sculpteur a ciselé pour les générations futures, le souvenir des époques héroïques. »

Fresque sculptée du monument aux morts : « Aux héros de la victoire » ; statue « Au poilu de la Grande Guerre ».

« Ainsi le célèbre Monument ″Quand même″ »

Plan de la statue, le piédestal dit « Aux défenseurs de Belfort ». Vue de profil. Plan rapproché sur le haut du corps de l’Alsacienne. Plan rapproché sur le buste du soldat en train de tomber.

« Et là-haut, au flanc du coteau, le non moins célèbre : LION DE BELFORT »

Panoramique gauche et haut de la patte vers la gueule. Ascension derrière une femme ; une femme s’avance vers le pied du monument et sourit à l’opérateur. Gros plan sur son visage de profil, près du monument. Profil du Lion. Panoramique droite sur les toits de la cité. Le Lion en contre-plongée. Des visiteurs en train de le photographier. Des visiteurs avec des fleurs perchés sur la tête du Lion.

« Fin »

Métadonnées

Contexte et analyse


Depuis moins de trois ans, l’Alsace a été libérée de l’occupant allemand. Si cette période n’a duré cette fois que quatre ans, elle a été particulièrement douloureuse : la répression politique constante avec l’internement au camp du Struthof, l’expulsion brutale des Juifs spoliés, l’incorporation de force des jeunes hommes dans la Wehrmacht et la collaboration laissent des traces profondes. La région sort meurtrie des bombardements alliés, la population se sent stigmatisée du fait de la mise en cause des « Malgré-nous » dans la destruction d’Oradour-sur-Glane ; les faits de collaboration, notamment l’engagement dans le SS et les mouvements de jeunesse nazis, sont tus comme partout en Europe mais ne s’oublient pas. Au cœur de trois conflits en 75 ans, l’Alsace est un immense champ de bataille à ciel ouvert où se développe une mémoire singulière des périodes allemandes et des efforts français pour « reprendre » ce territoire petit à petit conquis depuis l’époque de Louis XIV, devenu région frontière.

Alex Schwobthaler (1914-2002) fait pleinement partie de cette histoire[1]. Photographe reporter avant-guerre, c’est un voyageur que l’Histoire a rattrapé. Mobilisé en 1939 du côté de Lyon, il déserte alors que se dessine la défaite de l’armée française et rentre chez lui. De cette époque datent de très beaux films qui laissent penser que le jeune homme a retrouvé la paix. C’est sans compter sur le régime nazi, qui incorpore de force les hommes de la région annexée en 1943 et les envoie sur le front russe. Muté à Paris à l’été 1944, son repos est de courte durée : il part pour la Normandie, où des soldats américains le capturent. Après deux camps de prisonniers successifs, il se voit recruté par des émissaires de De Gaulle au sein des Forces françaises libres. Il n’a pas le temps de combattre : âgé de plus de 30 ans, il rentre en 1945 dans une région tout juste reconquise, reprend ses tournages et devient projectionniste dans son village de Zillisheim. Si en 1946 il s'est rendu à Poligny dans le Jura (0068FN0009), cette fois, il opère à rebours le parcours qui l'a ramené chez lui après presque deux ans d'absence. De Mulhouse à Belfort, il relie à nouveau les parties trop souvent séparées de son Alsace natale.

Un paysage « idyllique »

« Idyllique » : le terme revient plusieurs fois dans les cartons rédigés par le cinéaste amateur à la suite de son voyage avec son épouse Gil. Volontiers facétieux, il est peu avare de clins d’œil à son public, qui aura noté que le mot inclut le nom de la principale rivière alsacienne, l’Ill. La caméra s’attarde longuement sur les panoramas qu’offre le sud de l’Alsace, une région qu’il a souvent parcourue avant-guerre pour son activité de photographe. On note une prédilection pour l’horizon brumeux de Vosges, les grandes futaies d’arbres anciens, les branches à contre-jour qui viennent souligner le choix du cadre. Les essais d’effets visuels sur le cours de l’Ill suggèrent un rapport très pictural, souvent naturaliste, aux paysages visités.

Si nombre de plans se focalisent sur une nature apparemment intacte ou sur des bâtiments isolés, Schwobthaler prend aussi soin de faire vivre ces lieux en incluant dès que possible des personnages - une démarche déjà sensible dans Ça!_C'est_chez_nous_(0068FN0001), sa première réalisation en 1937. À plusieurs reprises, il filme les animaux domestiqués par l’homme – bovins, chèvre, chevaux – et les activités agricoles, dont les moissons permettant de préciser la date de tournage : sans doute la fin de l’été 1947. L’idylle, c’est donc celle de l’Arcadie chantée par Virgile, et qui fait de l’Alsace une terre d’abondance généreuse avec l’homme qui vit en paix : promeneurs, cyclistes, pêcheurs, amateurs de loisirs nautiques, paysans allant au rythme des saisons et du pas des bœufs. Cette paix, nous révèle petit à petit le cinéaste, est une paix récemment retrouvée.

Une histoire dramatique

Le film commence dans la joie du départ des voyageurs en gare de Mulhouse, et s’achève dans celle des touristes en visite au Lion de Belfort, Gil Schwobthaler comprise. Au fil des étapes se dessine une histoire culturelle de la région dont les points de repère sont les bâtiments ecclésiastiques datant du Moyen Âge et de la Renaissance : Chapelle du Burnkirch, Prieuré Saint Morand, simples églises de village. Même la Fontaine de la Vierge d'Altkirch, plus récente (1857), a vu son bassin octogonal réalisé en imitation de gothique flamboyant, référence à la colonne qui supportait l’abside de l’ancienne église détruite en 1844. Parfois encore consacrés, ces édifices religieux ont une fonction sociale importante : enseignement au Collège épiscopal de Zillisheim depuis 1866, hôpital à Altkirch depuis 1828. À Pérouse, le clocher datant du XVIIIe siècle que fixe avec insistance la caméra a été détruit par les bombardements du siège de Belfort en 1870.

Plus on approche du Territoire, en effet, plus affleurent les signaux de l’histoire militaire des dernières décennies. À la sortie d’Altkirch se dresse un monument involontaire : la carcasse du char Sherman du 4e escadron de la 2e RC, victime d’un obus antichar le 21 novembre 1944 lors de la libération de la ville[2]. Il est resté quelques temps gisant sur le bas-côté, visité par les passants, avant d'être déplacé et érigé en symbole local de l’âpre lutte avec la Wehrmacht pour le contrôle de l’Alsace et du Rhin. Plus loin, plus tragique, le village de Ballersdorf que Schwobthaler affectionne car trois ans plus tôt, il y a entendu pour la première fois le dialecte alsacien du Sundgau de retour après la guerre. Et on lui a sans doute narré alors l’histoire de ces 18 jeunes ayant tenté de fuir l’incorporation en partant de nuit pour la Suisse le 12 février 1943. Finalement arrêtés après qu’une patrouille les a surpris et tués trois d’entre eux, 14 passent en procès et sont fusillés au Struthof le 17 février. Pour l’exemple, on ne peut plus clair. Le viaduc de la Largue a lui été détruit à quatre reprises, notamment pendant la Première Guerre mondiale, et reconstruit à chaque fois.

Enfin, à Belfort, quatre monuments écrivent l’histoire de cette ville assiégée quatre fois et sans cesse bombardée. Le monument aux morts de la Grande Guerre présente un ensemble sculpté de tonalité très patriotique dû à Georges Vérez (1877-1933). Inauguré le 27 novembre 1920 en l’honneur des Belfortains morts pour la France, il représente toutes les armes dans lesquelles ils ont servi. En 1928, l’entrée du square du Souvenir aménagé pour le monument a été dotée de la Statue de Poilu financée par souscription privée. Si Schwobthaler n’a pas filmé, voire pas rendu visite au Monument des trois sièges de Belfort réalisé en 1913 par l’Alsacien Auguste Bartholdi (1834-1904), il n’a pu manquer deux monuments ancrés dans la culture locale : la statue « Quand même » et le Lion érigé par Bartholdi entre 1875 et 1880. La première a été conçue en mémoire de la résistance de la ville et du territoire, seule portion de l’Alsace a être restée française après la défaite de 1870. Antonin Mercié (1845-1916) a sculpté une Pietà de guerre, une Alsacienne à coiffe soutenant d’une main un soldat mobile blessé, reprenant de l’autre son fusil et le combat. Le Lion réalisé en blocs de grès rose de Pérouse surplombe la ville du haut de ses 11 mètres, à l’à-pic de la falaise défendant le château. Rompant avec la gravité de cette histoire, le cinéaste fait un pied de nez au noble animal symbole de puissance en montant son profil en alternance avec celui de sa femme. Il prend aussi soin de filmer les touristes qui viennent voir un haut-relief exceptionnel, et n’hésitent pas à l’escalader pour profiter du panorama.

Un art du mouvement

Cette mobilité du regard et des points de vue rend le film particulièrement dynamique. Les transports fournissent à la fois les moyens de se déplacer et des transitions entre étapes (le train filmé au ras des voies) ou entre plans (voitures, bicyclettes). Cette manière de filmer n’est pas sans rappeler le style soviétique que le cinéaste amateur a peut-être découvert en salles, avant ou après-guerre. Dans les plans réalisés à la cimenterie d’Altkirch, le ballet des wagonnets suspendus dans un cadre saturé de lignes géométrique confine à l’esthétique constructiviste. Une influence allemande, celle de la Symphonie d’une ville de Walter Ruttmann ou du Métropolis de Fritz Lang, tous deux sortis en 1926, n’est pas non plus à exclure. La séquence des éclusiers et de la péniche, liant l’eau et le métal, la puissance mécanique et la force humaine, s’inscrit dans la série des documentaires en milieu urbain et professionnel des années 1930. Trois regards se mêlent donc dans ce court métrage : celui du reporter fin connaisseur de sa région, toujours à l’affût de belles images, celui de l’Alsacien à la biographie chahutée par l’histoire récente, et celui de l’opérateur qui, armé d’une simple Pathé baby, s’amuse à imiter les maîtres du grand cinéma.

Lieux ou monuments


Collège épiscopal de Zillisheim; Chapelle de Burnkirch; Prieuré Saint Morand; Fontaine de la Vierge (Altkirch); Monument "Quand même"; Lion de Belfort

Bibliographie


Odile Gozillon-Fronsacq, "Le regard d'Alex", Saisons d'Alsace, 1999???


Article rédigé par

ALEXANDRE SUMPF, 30 octobre 2018